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Arrêtez de nous prendre pour des cons…

12 mars 2017, 13:57

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Quelle valeur accorde-t-on à la parole de la présidente de la République ? Son intervention télévisée autour de l’affaire Sobrinho ne fut-elle finalement qu’une farce ? Question logique après que plusieurs ministres – et pas des moindres – sont montés au créneau pour défendre le multimilliardaire angolais.

D’un côté, Ameenah Gurib-Fakim, elle-même au centre de la polémique de par son implication dans cette histoire, réclame «une enquête avec un rapport dans les plus brefs délais». De l’autre, des membres du gouvernement mettent volontairement leur main au feu pour défendre vigoureusement Alvaro Sobrinho avant même les conclusions de l’enquête. Certains, à l’instar d’Ivan Collendavelloo, n’hésitent pas à se couvrir de ridicule. Ainsi, le ministre de l’Énergie affirme, sur les ondes de Radio Plus, qu’Alvaro Sobrinho lui a dit : «Pa trakase, larzan ki mo pe investi, se pa larzan kokin.»

Alors qu’il y a une enquête en cours, réclamée par la présidence de Maurice,  et que le nom de cet homme est associé à des détournements de fonds, du blanchiment d’argent et des malversations, le nº 2 du gouvernement n’a rien trouvé de mieux à faire que de courir le rencontrer dès son arrivée à Maurice. Question idiote : s’il y avait une possibilité qu’Alvaro Sobrinho ne soit pas si innocent que cela, est-ce qu’il l’aurait confié au leader du Mouvement Liberater ? Deuxième question idiote :
est-ce que nous ne sommes pas devant une preuve flagrante d’ingérence dans une enquête ?

À moins que l’intervention d’Ameenah Gurib-Fakim à la MBC ne soit que de la poudre aux yeux, n’aurait-il pas été plus prudent que les membres du gouvernement illustrent leur bonne foi (s’il leur en reste) en demeurant neutres, tout en laissant les enquêtes suivre leur cours ? Cela dit, on ne pouvait attendre mieux de Collendavelloo quand le Premier ministre, après avoir qualifié toutes les critiques envers Sobrinho d’allégations la semaine dernière, revient à la charge pour réclamer des excuses à Bérenger, Reza Uteem et Radio Plus pour ce qu’il qualifie de «faussetés». Nommé au poste de Premier ministre (et de quelle manière) depuis seulement deux mois, voilà que Pravind Jugnauth menace déjà la presse, annonçant des sanctions contre Radio Plus. 

Une posture appuyée par sir Anerood Jugnauth qui, pour mieux soutenir l’Angolais, s’en prend aux politiciens (oubliant que lui aussi fait partie de cette classe qu’il dénonce) et journalistes. Position classique de ceux qui, hier dans l’opposition, se montraient en ardents défenseurs de la presse indépendante mais qui, une fois au pouvoir, renouent avec l’arrogance et ne comprennent plus les interrogations légitimes des médias.

À croire que c’est la presse qui a inventé le partenariat entre Planet Earth Institute et la présidente de la République. À croire que jamais Alvaro Sobrinho n’a été suspecté d’irrégularités au Portugal. À croire que ce sont les médias qui ont mal rapporté le ministre Seesungkur quand il a déclaré, dans deux supports différents (Radio Plus et l’express), que la banque de Maurice avait refusé d’octroyer un permis à l’homme d’affaires. À croire que ce sont les journalistes qui ont fabriqué le communiqué de la FSC dans lequel il est écrit que la commission a demandé à la société de l’homme d’affaires de suspendre ses activités après avoir eu des informations.

Autant le gouvernement veut défendre Alvaro Sobrinho à tout prix, autant il réussit l’opération contraire : semer le doute dans la tête des Mauriciens qui ne voient que des épisodes opaques dans ce feuilleton politico-financier, dont le dernier rebondissement en date est une histoire d’usurpation d’identité référée à la police par la FSC.

En l’absence d’une Freedom of Information Act, devant le refus de la présidente de la République de s’expliquer et face à l’attitude d’un Alvaro Sobrinho qui, du haut de son arrogance, se croit tout permis, allant jusqu’à exclure des journalistes de la presse écrite de son monologue, que nous reste-t-il si ce n’est notre vigilance journalistique et citoyenne pour continuer à exiger des comptes de la part de ceux qui confondent leur rôle avec une monarchie ?

En ce jour de 49e anniversaire de l’Indépendance et de 25e anniversaire de la République de Maurice, continuons à réclamer des réponses à nos interrogations, continuons à faire avancer notre démocratie, continuons à libérer nos paroles en prenant part aux débats, en ne restant pas uniquement spectateurs mais en participant activement à la vie de Maurice. Indignons-nous, engageons-nous ! Et soyons des citoyens libres de dire à ceux qui nous gouvernent d’arrêter  de nous prendre pour des cons…