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Qui sera le chef suprême ? Quand ?

10 décembre 2016, 07:15

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L’urgence d’une «opposition unifiée» ou d’un «pacte républicain» semble se dissiper, du moins pour le moment. Le pays, suspendu jusqu’ici aux déclarations des Jugnauth, relatives à la transition premier ministérielle, semble avoir intériorisé le fait que sir Anerood resterait, encore un peu, aux commandes. Jusqu’à quand ? Nul ne le sait encore. Les spéculations vont toujours bon train dans la rue, dans les rangs dispersés du gouvernement et de l’opposition, dans les milieux des affaires et du corps diplomatique. Certains bookies prendraient même des paris sur la mystérieuse date.

Ce que l’on sait, en revanche, c’est que le fils avance, aujourd’hui, qu’il souhaite que son père n’abandonne pas le fauteuil suprême de sitôt, alors que son entourage montrait, jusqu’ici, des signes d’impatience. La pression exercée par les «Pravinistes» a provoqué un malaise au sein de l’alliance Lepep d’une part (Roshi Bhadain étant l’illustration la plus parlante), et entre Lepep et le peuple d’autre part (le sentiment de déception généralisée est palpable au sein du public et sur la Toile, surtout après le sort réservé à Megh Pillay).

On aura tort de minimiser cette transition au sommet de l’État. Ses implications tant économiques que politiques sont sérieuses et seront durables. Elles chambouleront la donne politique chez nous et impacteront, à n’en point douter, sur notre image à l’international. Ce sera, en effet, difficile pour notre pays de prétendre jouer, sur le registre démocratique, au «role model» en Afrique en termes de bonne gouvernance, si les Jugnauth vont de l’avant avec leur plan de succession familiale sans passer par les urnes, sans écouter la voix du peuple.

Face à la possibilité que le «deal papa-piti» rapproche les partis de l’opposition, l’alliance au pouvoir a réalisé, sur le tard certes, qu’elle a tout intérêt à ne pas brusquer les choses et, ainsi, exposer en public leurs nombreuses vulnérabilités. Celles-ci peuvent facilement les conduire à leur perte.

La première vulnérabilité : Lepep est en train de récolter la démagogie qu’elle a semée pour se hisser au pouvoir. Prenons la compensation salariale. Alors qu’il était convenu, selon une logique économique, qu’aucune compensation ne sera accordée si le taux d’inflation est inférieur à 5 %, Pravind Jugnauth n’a eu d’autre choix que de céder aux pressions syndicales alors que l’inflation n’est qu’à 1%. Et cela ne suffit pas ! Les Rs 200, au lieu de créer un «feel-good factor», ont surtout soulevé une vague de mécontentement populaire. Quelle ironie !

C’est ainsi pour tout gouvernement qui, comme Lepep, crée des attentes démesurées et promet monts et merveilles, comme l’eau 24/24, un Freedom of Information Act, une croissance qui devait culminer en un miracle économique, la fin du népotisme et une MBC digne des redevances que nous payons, des appels à candidatures pour les emplois, etc., etc. Toutes ces promesses sont restées des… promesses jusqu’ici.

L’autre vulnérabilité de Lepep est ce glissement décrié vers un État policier, digne d’un régime totalitaire. Les amendements au Prevention of Terrorism Act – une loi déjà suffisamment dure – viennent conforter ce sentiment.

Au début du mandat de Lepep, on a vu les tentatives échouées de faire partir le DPP – une véritable épine dans le pied de ce gouvernement déterminé à exterminer Navin Ramgoolam et son principal bailleur de fonds. On a aussi vu l’exces de zèle de la police lorsqu’elle agit sur les ordres des ministres pour intimider les adversaires du pouvoir en place ou, plus récemment, ce besoin de placer des caméras de surveillance à l’auditorium Octave Wiehe…

D’autres actualités viennent se greffer aux désillusions de l’homme de la rue. Par exemple pourquoi l’on écope de six mois de prison pour le vol de 200 letchis alors que Rakesh Gooljaury obtient, lui, des travaux communautaires et voit ses dettes, par centaines de millions, «written off». Et puis il y a l’affaire Boskalis qui dépasse l’entendement de la plupart d’entre nous !

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En présentant Dev Virahsawmy et Brian Glover, hier à La Louise, Navin Ramgoolam, qui plus que jamais fait l’unanimité au sein de son parti, a voulu démontrer qu’il prépare son équipe pour aller seul aux élections - si son «pacte républicain» ne galvanise pas l’opposition. Si le premier nommé sera un sérieux obstacle pour tout rapprochement avec le MMM, le second entend bien chasser Xavier Duval du numéro 18.

À mesure que les charges provisoires contre Ramgoolam sont rayées, il faut s’attendre à une remontée des rouges. On a constaté cela hier. Les Mauriciens sont friands de «soap opéras» à la sauce mauricienne et sont venus, assez nombreux, écouter ce que Ramgoolam avait à dire sur les Jugnauth. Dans les rues de Quatre-Bornes, les banderoles «Non au Deal Papa-Piti» semblent avoir déjà chassé les images du clip «Vire Mam» de la mémoire collective…

Ramgoolam, pour revenir au pouvoir, devra, sans doute, verser dans du populisme. Paul Bérenger, par rapport à la ligne politique qu’il a tracée, et à son langage de vérité sur le plan économique, ne pourra pas lui emboîter le pas.

Si Ramgoolam veut en découdre avec les Jugnauth, quel rôle jouera alors le MMM cette fois-ci ? Se dirige-t-on vers une lutte à trois (MSM, PTr, MMM – sans les béquilles, dont le PMSD) finalement ? Avec des possibilités d’alliances post-électorales – sous le sceau d’un «pacte républicain» ou d’un «front uni» ?

C’est le seul changement politique – avec pratiquement les mêmes acteurs – que nous entrevoyons à l’horizon… Mais ce changement butera sur le sempiternel os : qui sera éventuellement le chef suprême après le départ «inévitable» de SAJ ?