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D'une plaisanterie à président des États-Unis...

13 novembre 2016, 11:57

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Comment est-ce que le citoyen fait son choix de vote ? Est-ce que les mensonges avérés d'un candidat ont un effet sur son devoir civique ou est-il plutôt préoccupé par son avenir ? Cette question post-élection Trump,  posée par Alexios Mantzarlis, directeur de l'International Fact Checking Network, rencontré dans un atelier de travail pour journalistes en Floride où nous séjournons, n'est pas anodine. 

Du moins, elle démontre, après la défaite de Clinton, que les informations vérifiées n'ont pas de grande valeur face au désarroi et à l'angoisse que peut vivre et ressentir une partie de n'importe quelle population, fut-elle américaine ou autre. Comment expliquer sinon, qu'en dépit du fait qu'il a été prouvé, que ce soit par les médias ou les fact checkers indépendants, que Trump a menti dans bon nombre de ses déclarations publiques, celui-ci a gagné les élections haut la main ?

L'éclairage nous vient du sympathique Frank, chauffeur de taxi, électeur du Républicain le plus célèbre de la planète, avec qui nous avons fait un brin de causette à Tampa, en Floride : «J'ai voté Trump parce que je pense que l'emploi devient un réel problème pour nous, les gens issus de la classe moyenne. Et je crois qu'il va en créer.»  

Son avis sur les bêtises ou plutôt mensonges (que ce soit sur l'Obamacare, la création de l'État islamique, l'arsenal nucléaire, etc.) de son désormais nouveau président ? «Clinton aussi a menti. Pour moi, cela n'a pas d'importance. J'ai voté pour l'avenir. Et je fais partie de ceux qui ne croient plus dans les leaders politiques traditionnels», explique Frank que nous ne pouvons qualifier de bête, méchant, raciste ou ignorant uniquement parce qu'il a voté contre Clinton.

D'ailleurs, c'est parce que des voix et des histoires comme Franck n'ont peut-être pas été suffisamment entendues et prises à leur juste mesure que plusieurs titres des journaux ont avoué n'avoir pas vu venir la victoire de Trump. Et nous pouvons confirmer, après avoir rencontré une bonne dizaine de journalistes politiques, à Washington ou à Minneapolis, que l'ex-secrétaire d'Etat a toujours été donnée favorite. «La façon de voter des grands électeurs va l'avantager. Elle va gagner. Ce ne sera pas avec une grande marge mais elle sortira vainqueur. Et puis, elle a plus de ressources sur le terrain», nous disait-on à chaque fois. Un peu comme à Maurice, en 2014, où la presse et les observateurs, de manière générale, n'avaient pu mesurer l'impact du vire mam, aux États-Unis, ils sont très peu, voire inexistants, à avoir vu venir la marche de Trump vers le bureau ovale.  

Et les leçons qu'il faut tirer en toute humilité sont valables pour tous : les instituts de sondage ne sont pas fiables, les gens hésitant à dire la vérité de leur choix, le fait de gagner un, voire deux ou trois, débats télévisuels ne conduisent pas forcément à une victoire finale, le soutien de la presse (ici la plupart des journaux, y compris ceux à tendance républicaine, ont «endorsed» Hillary) n'a pas d'influence sur une opinion publique qui fait son choix de manière indépendante, et la question de l'égalité du genre ici, même si le challenge représente l'élection d'une première femme présidente, n'est pas un enjeu national. Tout ça our dire que, malgré les imperfections du système électoral – Hillary étant plus populaire dans la rue que chez les grands électeurs, la moitié de l'Amérique se retrouve dans la politique de Trump, qui, paradoxalement, ne vient pas du monde politique mais a pu provoquer une symbiose avec une grande majorité de citoyens.

Et ceux-là, séduits par son discours, ont décidé de lui accorder leur soutien. Clinton avait toute la presse avec elle mais Trump a eu la meilleure part : la population elle-même. D'une distraction, Donald Trump est devenu président des Etats-Unis. Et ce n'est pas un joke. Si nous ne tirons pas de grands enseignements après ce qui s'est passé en Amérique, nous serons incapables d'avoir de bonnes lectures à l'avenir. Car il est clair que pour les dernières élections américaines, la question la plus fondamentale était : comment est-ce que le citoyen fait son choix de vote ?