Publicité

Je pars mais je reste...

9 octobre 2016, 13:46

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Tout animal politique qu’il est, SAJ reste un homme. Ses larmes incontrôlables vendredi, à l’évocation d’une période mélancolique de sa vie, traduisent la force de ces êtres qui n’ont aucun mal à montrer leur sensibilité. Et on ne peut que respecter cette émotion sincère et intime d’un Premier ministre qui nous laisse voir un peu de son âme, quand il regarde ses années d’enfance et d’adolescence dans le rétroviseur.
 
Si cet émoi est concevable, en revanche, le reste du discours (très attendu) de SAJ renvoie l’image d’un chef à bout de souffle, et qui ne semble pas savoir de quoi l’avenir sera fait, lui-même s’en remettant à Dieu. S’il est vrai que tant qu’il s’agit de sa vie, qui ne regarde strictement que lui, il peut invoquer qui il veut, par contre, quand il est question de Prime ministership, de gouvernement, de leadership et du pays, les citoyens ne peuvent se contenter d’un «sa nou ava gete apre» ou encore d’un «Bondie ki kone». D’autant que c’est SAJ lui-même qui a évoqué son départ avant la fin de ce mandat, son remplacement par celui qui commande la majorité, soit son fils, et un remaniement ministériel qui allait arriver «very soon».  
 
Ajoutons à cela la position de Pravind Jugnauth qui, devant les réactions négatives de la rue et de l’opposition face à une transition au sommet de l’État, a débuté sa propre opération marketing, affirmant qu’il est un élu du peuple, que le système westminstérien lui permet d’occuper le poste suprême, citant l’exemple de l’Angleterre où Theresa May a remplacé David Cameron en juillet dernier. Le leader du MSM a juste oublié de dire que, d’un côté, Cameron a soumis sa démission parce qu’il a été désavoué après le Brexit, que sa démarche traduit plutôt une leçon de démocratie et que, de l’autre, ça se saurait si May était sa fille.
 
Bref, la situation prêterait à rire s’il ne s’agissait pas de notre destin commun lié malheureusement à la politique. Car nous voilà ainsi devant une surprenante situation : (i) un père qui annonce son départ à la tête du pays mais qui veut rester, découvrant qu’il a des «unfinished business», mais affirmant en même temps, à propos d’un éventuel remaniement que «si mo pou alé, mo pou laisse sa pou prosen Premier ministre»,  (ii) un fils qui se voit déjà locataire de Clarisse House, ayant donné le coup d’envoi de sa propre campagne et ce, peu lui importe qu’il accède à ce poste sans détenir un mandat populaire. Y avait-il meilleur moyen d’illustrer une confusion déplacée ?
 
En attendant, l’incertitude plane, chacun se demandant qui, du père ou du fils, gouverne actuellement, tant SAJ ne donne pas l’impression de pouvoir gérer les conflits internes qui tiraillent son gouvernement. Interrogé sur un nouveau bras de fer qui oppose cette fois le serial bagarreur Bhadain à Collendavelloo, voilà qu’il répond qu’il n’en sait rien. Bref, comme d’habitude, il reste loin des conflits comme c’était le cas dans les épisodes précédents. Le drame de Jugnauth père, c’est qu’il ne semble pas seulement être loin de son cabinet, mais coupé de toutes les réalités et incapable de bien gouverner ce pays comme il avait promis. Après presque deux ans qu’il est au pouvoir, la médiocrité et l’amateurisme de son gouvernement a juste réussi à favoriser un espoir chez Ramgoolam qui se positionne déjà en alternative. C’est dire !
 
SAJ aura beau affirmer qu’«il faut avoir de la patience, qu’il a fallu d’abord nettoyer le pays, que des emplois vont être bientôt créés, etc», le peuple, lui, voit une politique de copinage, le recrutement d’incompétents qui, parfois s’en mettent des millions plein les poches, des ministres voyageurs, un gaspillage de l’argent public, une économie qui stagne, une série de promesses non tenues et plus important, ne trouve plus de différence entre la gestion de l’ancien gouvernement et celui de Lepep. Si la transition est proche, comme veulent l’attester les rumeurs, ni la sortie du père ni l’entrée du fils ne se feront avec les honneurs…