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Choisir son mal

14 août 2016, 09:00

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Choisir son mal

Le monde est en ébullition.

Difficile d’affirmer, en l’absence d’une étude statistique précise, s’il va plus mal ces jours-ci qu’il y a une année ou qu’il y a dix ou cinquante ans, mais ce qui est sûr, c’est que l’humanité a la mémoire de plus en plus courte – possiblement parce qu’il y a pléthore grandissante d’événements à digérer et à assimiler – ce qui a pour résultat que les événements du passé immédiat se démarquent de manière encore plus vive dans notre conscient.

Citons, en vrac, le putsch manqué en Turquie, la bataille dévastatrice (notamment pour les civils ) à Aleppe, les bombes qui explosent en Thaïlande, y compris à Phuket, la loi du Far West qui s’est établie aux Philippines avec le nouveau président, Rodrigo Duterte – qui, ce lundi, invitait plus de 150 officiels du gouvernement, inclus des juges, des policiers et des membres du congrès du pays à se rendre à la police sous les 24 heures, faute de quoi ils seraient pourchassés par les forces de l’ordre et l’armée ! Ajoutez-y la xénophobie qui s’installe en Angleterre après le Brexit, le scandale du dopage institutionnalisé en Russie, l’explosion d’une centrale à charbon, à Dangyang en Chine (21 morts), la rhétorique explosive de Trump aux USA, les attentats divers de Nice à Quetta et vous verrez sûrement qu’il n’y a pas de quoi se réjouir.

Ça ne vous arrive pas des fois d’être heureux d’être à l’abri de tout cela, en vivant à l’île Maurice, dans notre petit confetti de pays, où les badamiers bourgeonnent à nouveau, dans toute leur gloire ? Et où nos maux les plus douloureux ne s’appellent, pour le moment, que fièvre aphteuse, fièvre du gain et fièvre d’ego – des maux desquels on peut encore guérir, si on le souhaite encore vraiment ?

On ne demande pas au ministre de l’Agriculture de démissionner, mais il y a sûrement au sein de son ministère, qui comprend 2 700 fonctionnaires payés des deniers publics et 1 700 autres se retrouvant sous huit corps parapublics, quelques protocoles longtemps discutés et sagement mûris pour prévenir l’importation de la fièvre aphteuse qui tue notre bétail ? Alors ? A-t-on établi ce qui a permis à cette maladie dévastatrice de faire son entrée chez nous ? Qui n’a pas fait son boulot ? Disent-ils, comme toujours : «Pas moi ça, li ça !» ? Y a-t-il jamais des responsables, des sanctions, des licenciements ou est-ce que le ministre est satisfait que son budget annuel de Rs 2 milliards 611 millions est bien employé et que chaque sou dépensé l’a été à bon escient ? Notons, en passant, que parmi les KPIs de ce ministère pour 2016/17, on retrouvait l’objectif de produire 2 400 tonnes additionnelles… de viande. Manque de pot !

On ne demande pas au conseil d’administration de l’ICTA, ni à son ministre de tutelle de démissionner en bloc non plus, au vu de la note scandaleuse de Rs 19 M payée à Me Trilochun dans le cas légal institué par Emtel, mais le public a quand même le droit de demander des comptes ! Est-il vrai, par exemple, que Me Trilochun était sur une base de «retainer» avant que son contrat précédent ne soit terminé (pour quelles raisons ?) et que son nouveau contrat, obtenu après une visite en haut lieu, dûment libéré de plafonnement, lui a alors permis d’étaler ses appétits ? À qui s’adressaient ses factures et qui prenait la décision de les payer ? Est-il vrai qu’il y a eu des «pressions» pour le dernier paiement en date de Rs 12 M ? Si oui, pourquoi et qui a cédé ? Cette facture de Rs 19 M, qui a des allures de ce que l’on paie occasionnellement sur la base d’un «success fee» (parce que l’avocat prenait le risque de ne pas être payé s’il perdait son affaire…) peut-elle, d’aucune manière, être justifiée par les heures y consacrées et la qualité des conseils impartis ? Ou s’agit-il, en effet, d’une forte fièvre d’avidité galopante à laquelle certains seulement ont droit ? Qui va être tenu responsable des paiements effectués ? Qui sera «accountable» ?

Ça ne vous arrive pas des fois d’être heureux d’être à l’abri de tout cela, en vivant à l’île maurice, dans notre petit confetti de pays, où les badamiers bourgeonnent à nouveau, dans toute leur gloire ? Et où nos maux les plus douloureux ne s’appellent, pour le moment, que fièvre aphteuse, fièvre du gain et fièvre d’ego – des maux desquels on peut encore guérir, si on le souhaite encore vraiment ? .

 

On ne demandera pas non plus la démission du ministre de la Bonne gouvernance pour la débandade de Heritage City. Il avait, jusqu’au vendredi 5 août, le soutien du Cabinet, après tout ! Encore que ce soit ce même Cabinet qui, voyant le vent tourner avec la prise de position de Pravind Jugnauth (à travers Sanspeur), décide… de changer de position. Par conviction aussi ? Avaient-ils fait leur «homework» jusque-là et s’étaient-ils prononcés en toute conscience comme sont supposés le faire des ministres de la République ? Il est donc nécessaire de constater comment une fièvre d’ego surdimensionné nous a menés aussi loin ! Le projet Heritage City a été, à divers moments, présenté comme un cadeau du PM à la postérité. Dès lors que l’on avait collé cette étiquette au projet, le ministre Bhadain semblait avoir la voie ouverte et il ne s’est pas fait prier pour s’y engouffrer. Il est possible que le gel du projet relève de l’affrontement éventuel de deux ego, par la suite fatal à l’un d’eux, puisque le «risque» évoqué du barrage de Bagatelle n’est aucunement documenté de manière crédible et responsable. Le public n’a-t-il pas droit à des explications ? À la vérité ? D’autant que l’on a perdu beaucoup de temps nationalement précieux et déjà flingué 4,3M USD (soit Rs 153 M) en redevances à Stree Consulting ?

 

Mais le ministre de la Bonne gouvernance aura peut-être assez honte pour avoir subtilisé (ou l’ait fait), sans permission aucune, la vidéo de sa dernière conférence de presse du site de lexpress. mu, malgré le «watermark» ostensible, de l’avoir plantée illicitement sur sa page personnelle Facebook et d’avoir vu cette vidéo être enlevée de force, quelques jours plus tard, par le modérateur de Facebook, dûment alerté ?

Assez honte pour demander des excuses ? Pour donner le bon exemple la prochaine fois ?

Il faut oser l’espérer. Car, c’est en n’assumant pas ses responsabilités chez soi, systématiquement, que l’on finit inévitablement, comme partout ailleurs, avec les mêmes dévergondages : mauvaise gouvernance, mensonges coûteux, défaillances, iniquité, déceptions, haine, puis… violences.

On peut presque comprendre ceux qui préfèrent encore se réfugier ailleurs, dans les vapeurs de l’alcool, dans les promesses de l’au-delà, dans les frissons des stades !