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Nominations politiques: l’honneur et l’image de la communauté

15 mai 2016, 08:35

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Nominations politiques: l’honneur et l’image de la communauté

 

Il y a des nominations dites politiques qui sont justifiées. Puis, il y a celles qui sont incomprises, illogiques et scandaleuses, et auxquelles on finit par s’habituer. Mais, la pire catégorie des nominations politiques est celle qui est méprisante, celle qui insulte l’intelligence, l’honneur et la dignité. Il en est ainsi lorsque la nomination est faite sur la base d’une appartenance à une communauté. Cette dernière peut se taire, mais il faut se méfier de ce silence. Car chez elle s’installe une sourde révolte, expression d’un sentiment d’être l’objet d’un traitement peu digne, voire dégradant, de la part de ceux qui croient pouvoir tout acheter.

Il est donc nécessaire que ceux qui nomment quelqu’un, non seulement pour sa proximité partisane, mais aussi en vertu de son appartenance à une communauté, tiennent compte de l’honneur et la dignité de celle-ci. Car, en croyant faire plaisir à une communauté, c’est un tout autre signal qu’ils risquent d’envoyer.

BOUCLIER DE PROTECTION

Toutes les nominations politiques ne sont pas nécessairement révoltantes. Une nomination justifiée ou justifiable démontre un minimum de respect vis-à-vis de la population. Elle met à un poste un personnage qui, tout en ayant des affinités partisanes évidentes, détient aussi des qualifications supérieures, ou au moins égales, à ses concurrents, le profil approprié, soit un passé propre. Ce nominé-là possède des qualités qui lui servent de bouclier de protection contre la critique.

En se protégeant de la réprobation populaire à son égard, le nominé politique protège aussi ceux qui l’ont nommé. Les nominations de ce type n’insultent pas l’intelligence de la population. Elles montrent envers elle ce minimum de considération dont elle a droit.

Dans un même registre, lorsque la communauté est un facteur important dans le choix du nominé, les qualités de ce dernier, sa compétence, ses qualifications, sa culture, son passé sont autant d’arguments qui peuvent être mis en avant pour offrir une protection à tous ceux concernés par cette nomination. Et il n’y a pas seulement le politicien qui nomme ou le nominé qui doit être protégé. Il y a aussi la communauté d’où est issu le nominé puisque l’appartenance communale a pesé dans le choix fait par le politicien.

Cette logique nous a été bien expliquée il y a quelques mois, lorsque s’exerçait une pression pour la nomination d’un candidat inapproprié à un poste suprême. Dans ce cas, il fallait protéger le pays et aussi de manière indirecte le postulant déchu, et ceux qui l’auraient nommé, de la critique et de la risée populaires : «Ki dimoun pou dir. Dimoun pou riy nou !»

Ce qui veut dire que, lorsque le critère d’appartenance à un groupe entre dans le choix du nominé, la protection doit s’étendre au groupe aussi, car l’opinion publique va le juger sur ce qu’il offre comme échantillon. L’opinion ne se focalisera plus sur ceux derrière la nomination et traitera le nominé comme étant représentatif du groupe dont il est issu. Et c’est le groupe qui finit par devenir la cible de la critique et des moqueries publiques.

ENVOYER UN SIGNAL FORT

En croyant pouvoir attirer la sympathie d’une communauté en poussant un de ses membres dans une position nettement au-dessus de ses mérites, l’auteur de la nomination montre au pays ce que ce groupe peut produire comme fleuron, comme crème de l’intelligence. Il rend alors un mauvais service à cette communauté.

On ne sait si ceux qui choisissent un élément médiocre d’un groupe le font expressément pour dénigrer le groupe, et l’exposer aux sarcasmes. Toutefois, ils doivent savoir que leur choix s’assimile à l’offense du mépris vis-à- vis de cette communauté. Et en croyant lui faire une faveur, ils sont en train de l’envoyer sur le bûcher de la critique pour que d’autres la regardent griller.

Afin de protéger une communauté, il serait nécessaire d’envoyer un signal fort aux politiciens qui font des nominations méprisantes ou ceux qui les poussent à installer des médiocres à des postes disproportionnés à leurs compétences. Il s’agit de leur dire le mal qu’ils font à la communauté en choisissant un élément qui sera fortement, mais à juste titre, critiqué par l’opinion et qui fera l’objet des caricatures les plus hilarantes dans les médias.

Ceux qui font d’une nomination un investissement pour gagner le soutien d’un groupe à leurs ambitions politiques doivent comprendre qu’on ne peut dénigrer un groupe en mettant un de ses membres sur la place publique pour qu’il soit vilipendé, pour qu’on découvre son niveau et les moyens qu’il aurait utilisés pour asseoir ses ambitions personnelles. S’il n’y a pas ce rappel à qui de droit, les nominations méprisantes persisteront. Et l’opinion finira par croire que tel groupe est facilement achetable et qu’il est entièrement fait de la même trempe que celle du nominé médiocre.

Certains critiqueront peut-être l’élitisme à peine voilé qui caractérise les propos ci-dessus. Mais il faut l’assumer. Lorsqu’on prend un nominé, c’est pour remplir une mission publique : aider à construire un pays. Et si le politicien veut construire en puisant dans les ressources d’une communauté donnée, on ne peut que lui dire : par respect pour cette communauté, prenez parmi les plus grands de ses architectes. Et non le plus petit de ses tireurs plans…. Même si affinités.