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Doing Business 2015 - Le cas mauricien: bien, mais doit mieux faire!

21 octobre 2015, 13:30

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Doing Business 2015 - Le cas mauricien: bien, mais doit mieux faire!

Les indicateurs sur la fiscalité sont encourageants pour Maurice avec une 11place plus qu’honorable, que le pays doit à tout prix conserver.

 

Le dernier rapport de la Banque mondiale comparant l’environnement des affaires de Maurice en 2015 est benchmarked à juin 2014 et contient nombre d’enseignements utiles. Surtout au vu de nos ambitions nationales de sortir de notre statut de «middle income country» à l’horizon de 2030 et de rejoindre ainsi les pays dit de «high income», c.-à.-d. ceux dont le PNB/tête est au-dessus de 12 735 $ /an **. Le PNB/tête de Maurice pour 2014 est estimé, rappelons-le, à 9 710 $/an. Les dix indicateurs clés autour desquels s’effectue une analyse des 59 critères sélectionnés sont résumés au Tableau I.

 

BONNE PERFORMANCE

 

Mais commençons d’abord par les bonnes nouvelles. Le pays serait, pour 2015, le 28e meilleur pays au monde pour entreprendre et mener des affaires. C’est certes un classement très satisfaisant et on le doit à diverses réformes entreprises dans le pays dans le passé, notamment celles menées par Rama Sithanen en 2005-2006, principalement sur le plan de l’ouverture de  l’économie, du Companies Act et de la simplification fiscale et bureaucratique …. Avant lui, il y avait eu Lutchmeenaraidoo à partir de 1983.

 

Que ce classement soit dominé par Singapour, la Nouvelle-Zélande ou Hong Kong aux trois premières places n’étonnera personne. Par contre, il faut souligner, parmi les pays que l’on retrouve avant nous, la Géorgie (15e), l’Estonie (17e), la Malaisie (18e), l’UAE (22e) ou même la Thaïlande (26e) pour suggérer que nous pouvons mieux faire encore, si seulement on se focalisait sur l’amélioration additionnelle des critères qui nous gênent.

 

En attendant, on peut évidemment se glorifier, mais non se satisfaire… du fait que globalement, nous faisons mieux que le Japon (29e !), la France (31e), Israël (40e), l’Afrique du Sud (43e), la Turquie (55e), l’Italie (56e), le Botswana (74e), les Seychelles (85e) ou même la Chine (90e). Car il est clair qu’un investisseur ne se précipitera pas à Maurice, basé sur ce seul critère. La taille du marché intérieur, le pouvoir d’achat relatif, le positionnement géographique, les lois du travail, les gains de productivité, autant de facteurs supplémentaires qui aideront, entre autres, un investisseur à se décider, en sus du classement de la BM. À souligner aussi que nous avons déjà été mieux classés dans le passé : c’était en 2013 et nous étions alors 19e.

 

 

Le Tableau I montre essentiellement trois choses :

1. Là où le bât blesse, c’est principalement pour les permis de construction (où notre classement déjà mauvais de 117e en 2014, se détériore à 128e en 2015 – ce qui est inquiétant à la veille d’un miracle économique qui dépend autant de l’immobilier !) et pour l’enregistrement des biens immobiliers.

 

2. Les deux indicateurs où notre classement s’est détérioré sont la loi des contrats (de 44e à 53e) et les permis de construction (117 à 128).

 

3. Par contre, les indicateurs montrant du progrès sont la résolution des situations de faillite (+ 3 rangs), la fiscalité (de 13e à un étonnant 11e rang, un véritable fleuron international à ne pas perdre !) et l’obtention de crédit (où l’on passe du rang de 36e meilleur mondial au 30e meilleur mondial).

 

OÙ ÇA CALE ENCORE…

 

Ce tableau indique aussi, là où c’est disponible, le nombre d’étapes ou de procédures pour obtenir un service et spécifie les délais moyens pour l’obtention de ce service. Clairement, si nous voulons améliorer notre classement de «Ease of doing business», les objectifs sont de réduire les 519 jours indiqués pour faire appliquer la loi des contrats, les 245 jours requis pour  l’obtention d’un permis de construction et les 84 jours de délai pour se connecter au réseau électrique, ces deux derniers critères étant bien évidemment cruciaux quand la relance économique dépend aussi centralement de projets immobiliers, de smart cities et du développement portuaire.

 

À cet effet, la Banque mondiale, prenant l’exemple de la loi des contrats, note que Maurice a appliqué 4 petites réformes l’an dernier, mais que celles-ci  n’améliorent pas notre classement à ce critère (qui passe de 44e à 53e). Les autres pays ont dû se réformer encore plus vite ! Le listing détaillé des 36 procédures nécessaires avant la résolution d’une affaire en cour paraît lourd et mériterait l’attention accélérée des intervenants légaux afin d’en améliorer l’efficience.

 

Le listing détaillé des 36 procédures nécessaires avant la résolution d’une affaire en cour by L'express Maurice

 

 

Prenant pour exemple la construction d’un warehouse de Rs 14,2 millions à Port-Louis, la Banque mondiale fait le constat que c’est la connexion au tout-à-l’égout (Wastewater Management Authority) qui plombe la procédure pour obtenir les permis de construction, ajoutant à lui seul 180 jours de délai, soit 73,4 % du cycle total de 245 jours pour les 13 procédures engagées (Tableau II). Les lecteurs-entrepreneurs, au gré de leur propre expérience jugeront (et diront ?) si les autres délais envisagés par la BM sont, en passant, crédibles ou pas. On aimerait bien les entendre à l’express….

 

 

Cette même analyse appliquée à l’obtention d’une connexion électrique (Tableau III) indique des délais pas trop déraisonnables, mais ne souffle mot sur les difficultés potentielles du CEB à répondre à des demandes de connexion massives dans le sillage du développement des smart cities et de la zone portuaire.

 

 

Il serait d’ailleurs peut être seyant que les ministères appropriés s’entendent sur la cadence à laquelle les Rs 100 milliards de projets déjà identifiés par le Fast Track Committee vont se développer sur le territoire, afin de s’assurer que les besoins en électricité, en eau, en tout-à-l’égout etc… soient à la mesure de la demande vu, en particulier, les insuffisances actuelles de la CWA et de la WMA, ainsi que les retards de déploiement de nouvelles capacités électriques qui engendrent des discours de plus en plus inquiétants de délestage, de baisse de voltage ou, Dieu nous en garde, de black-out !

 

** La liste des pays ayant, plus récemment, franchi le pas du «high income » est intéressante : Argentine (2014), Estonie (2006), Russie (2012), Seychelles (2014), Uruguay (2012) et Venezuela (2014). Gageons que la Russie et le Venezuela ont surtout émergé grâce aux prix du gaz et du pétrole et qu’ils risquent donc de rejoindre bientôt les rares pays déclassés comme Mayotte (1990) et Gibraltar (2010).