Publicité

Le tournant

24 décembre 2014, 12:18

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

2014 prend fin après un marathon électoral qui a épuisé le pays. Mais, elle restera gravée dans les annales car les événements qui ont marqué ces 12 derniers mois pourraient bouleverser à jamais le paysage politique de Maurice.

 

Déjà au début de l’année, on pouvait prévoir que 2014 serait politique. Les premiers jours de janvier ont, d’ailleurs, témoigné d’une rencontre d’apaisement entre l’ancien Premier ministre, Navin Ramgoolam et le leader du PMSD, Xavier-Luc Duval dans le sillage de l’affaire Sik Yuen/Desvaux.

 

A couteaux tirés sur la politique monétaire, Rundheersing Bheenick, Gouverneur de la Banque centrale et Xavier-Luc Duval, ministre des Finances à l’époque en font de même quelques semaines plus tard.

 

Entretemps, les relations entre le MSM et le MMM au sein du Remake 2000 battent de l’aile. La faute à la réforme électorale, carotte que Navin Ramgoolam brandit à chaque fois qu’il se sent en danger politiquement. La rupture sera consommée lorsque Paul Bérenger, leader du MMM s’élève contre la ligne de défense adoptée par Pravind Jugnauth, le leader du MSM dans l’affaire Medpoint. Du coup, le Remake 2000 vole en éclats et le meeting conjoint MSM/MMM du 1er Mai est annulé.

 

Commence alors un long flirt entre Paul Bérenger et Navin Ramgoolam autour de la proposition de réforme électorale et du projet de deuxième république poussant le pays dans une période d’incertitude. Pour couronner le tout, alors que l’économie est reléguée au second plan, Xavier-Luc Duval claque la porte du gouvernement et laisse le Trésor public entre les mains de Navin Ramgoolam.

 

Survient alors une longue période de tractations entrecoupées de on and off avant que Navin Ramgoolam et Paul Bérenger décident finalement de conclure. Avec la concrétisation de l’alliance PTr/MMM, le pays amorce un tournant majeur car elle pousse non seulement le PMSD dans les bras du MSM mais elle provoque aussi des remous au sein du MMM. Ivan Collendavelloo, le numéro deux du parti démissionne pour aller fonder le Muvman Liberater.

 

La suite, nous la connaissons. La population a envoyé un signal fort à la classe politique dans son ensemble lors du scrutin du 10 décembre dernier. A tel point que le leadership — jusqu’ici incontesté — des partis traditionnels s’est retrouvé ébranlé et remis en cause. Des faits assez rares pour être soulignés.

 

Quelles leçons doit-on en tirer ?

 

D’abord qu’un changement s’est opéré au niveau de la psychologie de l’électorat car si les Mauriciens ont fait le choix de l’alternance en rouvrant grandes les portes de l’hôtel du gouvernement à sir Anerood Jugnauth et à ses alliés, il est clair aujourd’hui qu’ils n’hésiteront pas à reprendre les clefs dans cinq ans. Les nouveaux locataires gagneraient à garder cet élément en tête.

 

Ces élections ont aussi démontré qu’il n’y a plus de chasse gardée. La défaite de poids lourds tels que Navin Ramgoolam, Arvin Boolell, Anil Bachoo et Paul Bérenger qui se retrouve à la troisième place dans son fief à Rose- Hill tandis que le MMM mord la poussière dans la circonscription numéro 1, témoigne de ce shift psychologique. Ce qui ne fait qu’augmenter la pression sur le nouveau gouvernement.

 

Les premiers signes indiquent une volonté de bien faire avec notamment la création d’un ministère dédié aux Services financiers et à la bonne gouvernance mais aussi un ministère pour l’économie océanique. Toutefois, c’est dans la durée que la population pourra juger le nouveau régime. Les attentes sont grandes et le fait d’être confronté à l’exercice du pouvoir dans un contexte économique morose constitue un réel défi.

 

Reste aussi à voir dans le temps si les dirigeants ne seront pas tentés de verser dans les travers de leurs prédécesseurs. En attendant d’être fixés, nous pouvons estimer que le grand gagnant de l’année 2014 est le pays et sa population pour avoir montré la voie aux politiques sans avoir eu à descendre dans les rues.