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Devenir un pays riche

21 juin 2014, 10:40

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Devenir un pays riche

Le rêve est à notre portée, à en croire un analyste de l’U.S Trust Bank of America. Selon lui, Maurice réunit les ingrédients pour se situer dans le cercle très fermé des pays riches. Une analyse qui rejoint celle du Secrétaire financier, Dev Manraj. Ce dernier a déclaré récemment que Maurice deviendra une Inclusive High Income Economy d’ici à cinq ou six ans.

 

Confronté à ces commentaires, le citoyen lambda ne trouve rien de plus rassurant, d’autant plus qu’il aspire depuis des années à un meilleur niveau de vie pour lui et ses enfants. Mais en même temps, il ne peut s’empêcher de se demander : comment accède-t-on à ce fameux statut de pays riche alors qu’il fait face à l’érosion de son pouvoir d’achat ?

 

Dans la conjoncture actuelle, la réponse la plus évidente est : certainement pas avec les vieilles recettes du passé ! Car les faits ont prouvé que le modèle économique post indépendance consistant à se protéger et à dépendre des marchés garantis est révolu. La croissance économique a pris la pente descendante et le gouvernement peine à redresser la barre. Les échéances qui se rapprochent, notamment pour le secteur sucrier avec la fin des quotas betteraviers en 2017, et la menace qui plane sur le secteur offshore à travers les General Anti-Avoidance Rules (GAAR), nous rappellent également la nouvelle réalité.

 

Pour éviter de trop s’exposer aux aléas de la globalisation, voire pour atténuer son impact, il est important de se doter d’un modèle économique qui permet de générer une croissance durable. Ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. La preuve : c’est le secteur non productif qui s’est installé depuis quelques années déjà comme le moteur des investissements directs étrangers (IDE).

 

Un simple calcul démontre, par exemple, que plus de 62% des IDE ont été dirigés vers le secteur du développement foncier en 2013. La même tendance a été observée durant le premier trimestre de cette année. Sur les Rs 1,8 milliard que le pays a attirées, Rs 1,5 milliard, soit plus de 79%, ont été investies dans ce que la Banque de Maurice qualifie de « Real estate activities ». En revanche, le secteur productif n’a pas reçu une seule roupie durant cette période. Il en est de même pour les activités ayant trait à la science et à la recherche.

 

Se pose alors la question : à quel genre de richesse aspirons-nous ? Une richesse basée sur la spéculation contribue déjà à creuser les inégalités existantes et représentera tôt ou tard une menace pour la paix sociale. D’ailleurs, elle est à l’origine des fléaux que nous vivons actuellement, comme la recherche de l’argent facile, la fraude et la corruption.

 

Il n’est donc pas dans notre intérêt de perpétuer un tel modèle de développement si nous voulons vraiment devenir une Inclusive High Income Economy. Non seulement il n’y a rien d’inclusif avec un développement axé sur la spéculation sous toutes ses formes, mais il ne favorise pas non plus le transfert de technologie. Ne parlons pas de la valeur ajoutée !

 

Par contre, une économie basée sur l’innovation et la recherche ouvrira la voie à une croissance inclusive et à de nouvelles perspectives pour les jeunes en quête d’un emploi, contribuant ainsi à freiner la fuite des cerveaux.

 

En l’absence d’une culture de prise de risque et sans l’institutionnalisation de la réflexion stratégique, cela ne servira à rien de dresser le profil de la nouvelle architecture d’une Inclusive High Income economy.

 

Il ne suffit pas de faire provision pour des milliards de roupies si en parallèle nous n’avons pas des gens à plein temps qui réfléchissent et qui planifient l’avenir du pays, comme ce fut le cas dans le passé. Le drame, c’est que tout le monde en est conscient mais aucun changement de cap ne semble se profiler à l’horizon. Il n’y a qu’à voir la configuration politique actuelle pour s’en rendre compte.