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Incitation au dégoût politique

19 mai 2014, 07:26

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Imaginons un jeune qui, pour la première fois, votera aux prochaines législatives. Imaginons son envie réelle de participer à la construction de son pays, imaginons ses rêves, ses attentes, ses espoirs… Après avoir assisté ces dernières semaines à une guerre inépuisable de tous les blocs traditionnels, obsédés par le troublant exercice du pouvoir et son corollaire : les intérêts personnels, ce jeune apprend lundi dernier que le Premier ministre de son pays a décidé de proroger l’Assemblée nationale pour une histoire floue de deadline non tenue après trois semaines de congés parlementaires forcés, payés des fonds publics.

 

Réagissant au quart de tour, le voilà qui crie au scandale. Mais c’est avec surprise qu’il découvre le lendemain, qu’au final, ce sont uniquement les citoyens qui poussent des cris d’effroi devant ce mépris de la démocratie. L’opposition parlementaire, à travers son leader, a préféré donner le bénéfice du doute au Premier ministre en faisant preuve d’une compréhension incompréhensible sur la fermeture douteuse du Parlement.

 

Pourtant, c’est ce même Bérenger qui, la semaine dernière, se montrait prêt pour la rentrée parlementaire, allant jusqu’à brandir une question qui allait, semble-t-il, acculer le Premier ministre : une soi-disant interrogation sur les avoirs de Ramgoolam, y compris la Rolls Royce, avait-il jugé utile de préciser dans sa bande-annonce. Mais ceux qui ont écouté le leader de l’opposition sur les ondes de Radio One, mardi matin, pouvaient difficilement croire que la prorogation du Parlement fût une grande surprise pour lui. Si ce n’était pas de la comédie, en tout cas, ça y ressemblait. Pendant combien de temps, les politiciens vont-ils se croire plus malins que le peuple ?

 

L’autre scène burlesque ce jour-là fut la parfaite communion entre les «kamarad» Ganoo et Assirvaden, (toujours sur Radio One) qui parlaient d’une seule voix sur la réforme électorale en dirigeant leur hargne contre le MSM, parti qui a fini par comprendre – plutôt tardivement –, depuis vendredi dernier, que le remake est bel et bien chose du passé. Un constat provoquant du coup un changement de ton drastique de SAJ, celui-ci traitant désormais Bérenger de «fezer», «menter» et «ipokrit». La guerre est donc déclarée du côté de la Caverne. Et chacun revoit ainsi son rapport de force, sa capacité de chantage, alors que la réforme électorale devient le prétexte idéal, ici, pour une alliance électorale, et là, pour un divorce, quitte à préférer le monstrueux best loser system. Dans ce jeu du «tout le monde veut gouverner, tout le monde veut le pouvoir, je voterai la réforme uniquement pour avoir une place au côté du monarque», les cartes semblent se redistribuer pour la énième fois. Ainsi donc Ramgoolam ne se gêne plus pour tirer sur et humilier publiquement les Bleus («le PMSD n’est pas au courant de beaucoup de choses. (..) il réécrit l’histoire») – ceux-là qui vont préciser leur position aujourd’hui, après la parution d’un communiqué plutôt laconique et une étrange interview du Bleu Jacques Panglose, sur Radio Plus, jeudi dernier, qui n’avait visiblement rien à dire.

 

Dans l’intervalle, on aura entendu Pravind Jugnauth affirmer hier en conférence de presse qu’il faut reconnaître la contribution de Gaëtan Duval dans le développement du pays. Une déclaration annonciatrice d’un rapprochement soleil-coq, les deux dommages collatéraux d’une probable alliance rouge-mauve ? Allez savoir qui montera dadak sur le dos de l’autre ? Dans l’intervalle, l’on retient aussi de la traditionnelle conférence de presse, mauve d’hier que Bérenger est encore plus pressé que Ramgoolam sur la question de deuxième République.

 

Finalement, celui qui votera pour la première fois aux prochaines législatives aura bien du mal à faire son choix : les blocs traditionnels sont dégoûtants et leur politique ne se résume qu’à une question de places. Quant aux autres forces dispersées actuellement sur l’échiquier, elles ne représentent pas encore une alternative crédible pouvant prendre la destinée de notre pays. Au final, est-ce que le jeune ira seulement voter ?