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Chagos: encore 51 ans de lutte…

28 février 2019, 14:01

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L’on est en train de se complaire dans de faux espoirs en estimant que les Anglais cèderont la souveraineté des Chagos à Maurice et que les Chagossiens pourront retrouver leurs îles. On ne veut aucunement freiner les jubilations suite à l’opinion émise par la Cour internationale de justice (CIJ), mais un brin de réalisme aiderait à tempérer les attentes, et surtout à nous empêcher d’être conclusifs sur la récupération de notre souveraineté sur les Chagos.

Il est bon de rappeler que l’opinion de la CIJ porte sur la décolonisation et non sur la souveraineté. Brièvement, deux raisons expliquent que l’opinion de la CIJ n’est qu’une victoire relative, et que le fond du problème est loin d’être résolu, que l’es- sence de notre revendication est loin d’être satisfaite : elles portent sur la faiblesse d’une éventuelle résolution des Nations Unies (NU) sur les Chagos et l’intransigeance des Anglais sur la question de la souveraineté. 

Résolution des NU :

sans effets Si la prochaine étape est une résolution de l’Assemblée générale des NU, celle-ci invitera les deux parties à négocier, quoiqu’il n’est pas exclu que les Anglais, aidés en cela par les USA, fassent pression pour influer sur les votes des pays en brandissant l’arme de la sanction économique. Mais même si la résolution est votée, cela ne garantit aucunement que les Anglais nous remettront cette partie de notre territoire excisé. 

Lorsqu’une résolution intéresse deux pays, elle se limite à une invitation aux deux parties d’entamer un dialogue sur la question qui les oppose. Ainsi, les négociations entre la Grande-Bretagne et Maurice seront proposées pour régler le différend. Mais la résolution ne pourra anticiper le outcome des négociations, c’està-dire, le résultat final à espérer. La résolution des NU ne pourra que suggérer une sorte d’obligation de moyens et non de résultat.

Par ailleurs, il faut savoir qu’une résolution des NU ne veut pas dire grand-chose sur le plan juridique contre n’importe quel pays, surtout si c’est un des pays puissants qui est en cause et qui doit céder. Il en est de même lorsqu’il s’agit d’un petit pays, mais soutenu par un des cinq membres du Conseil de sécurité des NU. De multiples exemples nous le prouvent. Il y a eu 68 résolutions des Nations unies prises à pour régler le conflit entre Palestiniens et Israéliens : on connaît la suite. Le Droit International Public, étant la loi du plus fort, sa considération par les puissants change lorsqu’ils sont sur le banc des accusés ou lorsqu’ils veulent jouer au gendarme du monde. 

Certes, l’opinion de la CIJ constitue une étape juridique remportée par le pays. Or, avec les limites du droit, il devient évident que la stratégie pour régler le problème avec les Anglais relèverait plus de la politique et de la diplomatie que du droit. Mais là aussi, il ne faut pas être naïf : en politique internationale, comme dans les affaires, il n’y a pas d’amis mais que des intérêts.

Les intérêts Anglais

Brièvement, il y a au moins deux raisons pour expliquer pourquoi les Anglais ne céderont pas la souveraineté. D’abord, il y a le bail avec les USA, et la présence des Américains dont l’administration ne reconnaît pas Maurice sur ce dossier-là, et qui obligera les Anglais à respecter le bail plutôt que de s’immiscer entre la Grande-Bretagne et Maurice pour régler leur différend. Les Anglais ne céderont pas les Chagos aussi long- temps que les USA auront besoin de Diego Garcia pour leur base.

Puis, il y a le fait que les Anglais considèrent que les Chagos font partie de leur territoire. Comme le dit le bureau responsable du Foreign and Commonwealth Affairs :“…the underlying constitutional structure between the UK and the Territories, which form an undivided realm…”. Ce qui annonce la détermination des Anglais à conserver la souveraineté sur les Chagos, une indication sur le bottom line des négociations à venir. Il y a lieu de ne pas berner la population en faisant croire que le outcome des négociations sera notre souveraineté sur les Chagos.

On ne voit aucune source de pression pouvant forcer un gouvernement britannique à détacher une partie du territoire de Sa Majesté. On ne voit pas un gouvernement anglais dans les circonstances actuelles proposer au peuple de la GrandeBretagne un référendum pour céder une partie de ce qu’ils considèrent comme leur propriété, leur territoire.

 Perspective

Mais rien n’est perdu en matière de lutte. Notre revendication peut réussir sous d’autres conditions, si elle est mise dans une plus grande perspective susceptible d’avoir d’autres puissances à nos côtés. La démilitarisation de l’océan Indien peut être un agenda rassembleur, par exemple.