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Puiser des fonds de pension: quelle protection légale contre les risques?

11 octobre 2018, 07:40

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Dans une réponse à une question parlementaire, le public aura appris qu’au CEB, a été puisé des fonds de pension des travailleurs, un montant de plus d’un milliard de roupies pour payer quelque dette. Il n’y a eu peu ou pas de réactions de ceux qui contribuent à ces fonds : peut-être qu’ils n’y entrevoient aucun risque et, qu’arrivée l’heure de leur départ à la retraite, dans un certain nombre d’années, ils n’entendront pas dire qu’il n’y a pas suffisamment d’argent dans les caisses pour leur payer «lump sum», retraite et autres allocations. Leur optimisme leur suffit pour être rassurés.

Toutefois, de manière générale, les risques autour de la gestion des caisses de retraite sont réels : qu’ils s’agissent des fonds de pension gérés dans le secteur privé, public ou parapublic. Et sans vouloir jouer au marchand de la peur, il serait utile d’attirer l’attention sur une réalité qui menace ces fonds et qui mène parfois à des tragédies.

Nous pensons qu’il y a lieu de faire prendre conscience à tout salarié qui contribue à un fonds de pension que plusieurs facteurs peuvent intervenir qui font dérailler le système, avec pour conséquence que l’institution dans laquelle il aura contribué pendant de longues années se trouve dans l’impossibilité d’honorer ses engagements financiers le moment venu, soit après 30 ans lorsqu’il va prendre sa retraite. Parmi les facteurs qui peuvent mener à cette situation, il y a l’incapacité de l’institution gestionnaire d’investir judicieusement, de manière la moins risquée possible, les contributions, afin de les faire rapporter le maximum en termes d’intérêt et de dividendes.

Absence de cadre légal

Pour prévenir que les risques de faillite n’accablent le salarié, il y a lieu d’imposer à tout gestionnaire de fonds de pension l’obligation d’investissement intelligent. Pour ce faire, il y a nécessité d’imposer que le système opère dans un cadre légal adéquat, cela afin de bloquer tout usage abusif de la contribution des salariés et employeurs aux caisses de retraite. Surtout lorsque l’on sait que cet usage abusif est l’œuvre des personnes qui ne seront visiblement pas aux commandes des institutions dans 30 ans, et qui n’auront pas à répondre de leur mauvaise pratique professionnelle.

Il y a nécessité de voir le rôle des régulateurs dans les décisions d’investissement faites par les gestionnaires des fonds de pension et des conseils d’administration des institutions. Le simple fait de dire que l’usage de l’argent en provenance du fonds de pension a été fait sur recommandation des auditeurs ne change rien à la problématique. Tout comme le fait de nommer un actuaire au «board» d’un corps paraétatique ne va pas empêcher l’avènement d’une catastrophe résultant du mauvais usage du fonds.

L’audit des comptes, brandi comme une cure au problème, n’est même pas une panacée. C’est un faux remède qui ne voit qu’un aspect partiel de l’usage des fonds. Un exercice d’audit ne fait qu’examiner les transactions financières de l’institution pour vérifier si elles sont conformes aux lois du pays. Même si l’audit rassure en certifiant que les dispositions de la Statutory Bodies (Accounts and Audit) Act et du Code of Corporate Governance ont été respectées, le risque demeure. La raison : ces dispositions ne répondent pas aux questions liées à l’investissement sûr et à l’utilisation rentable du fonds de pension.

C’est ainsi que même si c’est approuvé par l’audit, l’on ne peut s’empêcher de se demander comment lorsqu’un fonds de pension prête un milliard de roupies «interest free», il s’enrichit !

Solution immédiate

Le mal provenant d’une mauvaise utilisation du fonds de pension ne sera ressenti que sur le long terme. Et puisque «dans le long terme, nous serons tous morts», comme l’avait dit Keynes, c’est dans l’immédiat que se met en place la solution, si l’on veut éviter le pire. C’est l’application de la logique du conjoncturel qui consiste à s’attaquer à la cause d’une tragédie dès son émergence, afin de ne pas en subir les conséquences.

C’est un cadre légal applicable aujourd’hui qui empêchera les fonds de pension de se transformer en Ponzi institutionnel. Il fera éviter l’éclatement de scandales dont les auteurs ne seront plus là. Et même s’ils y sont toujours, ils pourront avoir recours à leur dementia que leur procure l’âge vis-à-vis d’un peuple qui, lui, sera, comme toujours, amnésique.