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L’épée de Damoclès

25 juin 2017, 08:49

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Pour ceux qui ne le savent pas, l’expression «avoir une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête» relève d’une situation, tirée d’un épisode de la mythologie grecque, où Damoclès, un courtisan qui enviait la situation de celui qui dirigeait sa ville, eut à passer un très long moment assis à la place de ce dernier, avec une épée suspendue au-dessus de lui, qui ne tenait que par le crin d’un cheval. Damoclès avait littéralement sa vie qui ne tenait plus qu’à un fil. C’est une situation particulièrement pénible pour celui qui la vit. Bon, toi lecteur qui se dit que je vais parler de la situation dans laquelle se trouve Pravind Jugnauth depuis quelques jours, tu te fourres le doigt dans l’oeil, jusqu’au coude ! 
  
Je ne vais pas commenter un jugement de la Cour suprême, qui a trouvé que le Directeur des poursuites publiques (DPP) a eu raison de faire appel contre le jugement d’acquittement prononcé en faveur du Premier ministre dans l’affaire MedPoint, en mai 2016. Et que le DPP peut désormais porter l’affaire devant le Conseil privé de la Reine. Non. La situation est déjà assez compliquée comme ça. Attendons encore quelques mois pour connaître la suite de cette histoire politico-médiatique. 

L’épée de Damoclès que j’évoque est celle suspendue au-dessus de la tête du gouvernement, avec l’élection partielle désormais confirmée à Belle-Rose–Quatre-Bornes. Comme évoqué dans ma précédente chronique, Roshi Bhadain a joint le geste à la parole. Et il a offert sa démission comme député du n° 18 à la présidente de l’Assemblée nationale. 

Saluons le panache de l’homme. Les personnes qui le qualifient de grande gueule et d’arrogant reconnaissent néanmoins son intelligence et ses qualités de fonceur et de travailleur. On peut l’aimer ou le détester mais Roshi Bhadain a eu le mérite de flanquer un grand coup de pied dans la fourmilière. Et les dégâts ne font que commencer. 

Effectivement, la partielle qui se tiendra dans quelques mois n’est pas la bienvenue dans les rangs du gouvernement. Le MSM et le ML se seraient bien passés de ce cadeau empoisonné à mi-mandat. Il se chuchote de plus en plus que le gouvernement n’alignera pas de candidat à cette élection que Bhadain qualifie de «référendum» contre le projet Métro Express et contre le gouvernement. C’est une situation cornélienne pour le Premier ministre, une situation à la «pile je gagne, face tu perds !» 

En effet, s’il aligne un candidat et que ce dernier se fait battre, Pravind Jugnauth aura bien des soucis à se faire pour les prochaines élections générales. Si la majorité n’aligne pas de candidat, leurs adversaires verront cela comme un aveu de faiblesse et de peur d’affronter l’électorat. Quant à gagner l’élection partielle, cela ne sera pas une partie de plaisir… Et semble même impossible, au vu du visage que le gouvernement nous a offert ces derniers temps. 

Alors, à qui profite le crime ? Je dirais qu’en premier lieu, c’est à Roshi Bhadain que cela profite. Paradoxal, mais pas difficile à comprendre. Bhadain a démissionné pour se construire une légitimité politique. S’il est réélu, il le sera en tant que «leader» d’un nouveau parti. Avec de nouvelles idées et de grandes ambitions. Il l’a aussi fait parce qu’il croit qu’il se fera facilement réélire. Même contre plusieurs candidats, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition. 

Un Roshi Bhadain hors du Parlement est une munition de choix de moins pour l’opposition. Pour avoir fréquenté de prés la cuisine interne du gouvernement, et avoir aussi été – ne l’oublions pas – un de ses généraux les plus actifs, Roshi Bhadain fera plus de dégâts contre la majorité s’il se trouve l’intérieur de l’Hémicycle. Le scénario politique qui se dessinera dans quelques jours au n° 18 va donner une indication de la configuration des prochaines élections générales. 

Je disais récemment que l’art de la guerre consistait, des fois, à ne pas attaquer trop tôt. Il consiste aussi à savoir comment utiliser ses adversaires d’hier pour en faire des alliés de demain. Et, à ce jeu, je vois bien, par exemple, les rouges du PTr et les bleus du PMSD ne pas s’engager dans la bataille tout en apportant un soutien non-désintéressé à Roshi Bhadain. Et l’aider à se faire réélire. C’est un scenario qu’il nous faut prendre en considération...