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Manière de voir: pourquoi pas le mentor à la barre ?

24 juin 2017, 12:37

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Pravind Jugnauth a eu tort de narguer l’opposition au Parlement, la semaine dernière, en rappelant comment la Cour suprême a administré une magistrale claque à ses détracteurs en l’acquittant sur l’affaire MedPoint. Le mot claque prononcé de façon sonore et dramatique et ad nauseam n’a pas tardé d’inspirer des créations de tous genres sur les médias sociaux, prenant pour cible le Premier ministre et le dénigrant à la manière du clip viré mam de 2014. On appelle cela un retour de manivelle.

Mais voilà que jeudi matin, la claque a changé de direction pour assommer le Premier ministre. Sa cause a reçu un magistral revers des mains de la Cour suprême, qui autorise le Directeur des poursuites publiques (DPP) à contester une décision précédente de cette même instance, acquittant le Premier ministre.

Le sort de Pravind Jugnauth est maintenant lié à la claque que les Law Lords vont donner à Londres. Soit une gifle au Premier ministre, soit une claque au DPP. La gifle au Premier ministre sera fatale car il aura à démissionner. Comme son oncle Ashock qui l’a précédé dans une aventure semblable, Pravind Jugnauth pourrait faire acte de candidature lors d’une partielle au n°8. Mais contrairement à 2009, il ne doit pas compter sur Navin Ramgoolam et l’artillerie travailliste pour l’aider.

Les avis sont partagés quant au statut juridique et politique du Premier ministre après le jugement de la Cour suprême. Ses hommes prétendent que c’est «business as usual». Ses adversaires réclament son «stepping down» au nom de l’éthique et de la moralité politique, en attendant que l’affaire soit entendue devant le Conseil privé de la Reine.

Une bien étrange coïncidence a voulu que le jour même où Pravind Jugnauth est réduit au statut de «lame duck», le père Anerood, lui, triomphe face aux redoutables Britanniques et Américains lors d’un vote aux Nations unies. Même les adversaires les plus coriaces du chef de la famille Jugnauth n’auraient pas manqué d’admirer son courage, à son âge, de voyager jusqu’à New York, y passer plusieurs jours pour s’engager dans un exercice de lobbying et finalement prendre la parole à cette tribune historique des Nations unies. Et qui est le Mauricien qui n’a pas ressenti un grand frisson de fierté en entendant le président de la séance annoncer le décompte des votes et apprendre que Maurice a bénéficié du soutien de 94 pays et les Anglo-Américains de seulement 15 votants ?

Il est vrai que c’est le MMM qui a, en premier, conscientisé les Mauriciens sur le dossier Chagos et a mené un long combat contre l’excision d’une partie de notre territoire par les Britanniques, avant l’Indépendance du pays. Il est vrai aussi que Navin Ramgoolam a scoré une première grande victoire légale et diplomatique en contestant la démarche des Britanniques de faire des Chagos une pseudo-zone de protection marine, ce qui aurait radicalement diminué les chances de Maurice d’avoir accès a son propre territoire. Mais il faut aussi reconnaître que quel que soit l’aboutissement du vote de New York, sir Anerood Jugnauth en sort un homme requinqué et ragaillardi. Lui, que les spin doctors du fils avaient placé dans un coin, tel un téléviseur analogique qui avait servi son temps.

Pravind Jugnauth a eu beaucoup de peine à s’affirmer depuis sa nomination comme Premier ministre. Les institutions, mêmes des régulateurs, ont presque cessé de fonctionner quand on ne prend pas de mauvaises décisions comme à la Financial Services Commission. Fragilisé, Pravind Jugnauth aura encore des difficultés à asseoir son autorité.

Si le MSM veut éviter une catastrophe, le parti n’a d’autre solution que de faire appel au «bonhomme» pour qu’il reprenne la barre et sauve la barque. Si sir Anerood a terrassé le lion britannique et l’aigle américain à New York, il n’éprouvera aucune difficulté à rabattre le caquet à des Sesungkur et Sinatambou au Conseil des ministres. L’épisode premier ministériel de Pravind Jugnauth sera alors vu dans l’histoire comme un mauvais épisode de sortie de route avec quelques dommages.

Quant aux amateurs de psychologie freudienne, ils seront réconfortés dans le postulat que le fils n’a pas réussi à tuer son père pour prouver qu’il est un homme.