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Le Théâtre de Port Louis : l’attente des sans-temps

30 novembre 2015, 14:44

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Ionesco disait que le théâtre est miroir. Pendant plus d’un siècle et demi, celui de Port Louis disait sans peine l’attachement des mauriciens à la culture. Puis ses portes se sont fermées d’un temporaire qui semble durer. En attendant se joue en coulisses la valse des financiers, des pseudo- visionnaires et d’une administration de la ville tiède à souhait. L’âme de Port Louis est en sursis.

Plus que leur savoir-faire et leur ingéniosité, et parfois même mettant la main à la poche, l’architecte  Pierre Poujade et le décorateur Pierre Thullier ont surtout mis leur cœur dans la réalisation du théâtre de Port Louis. Cette commande venue d’une poignée de personnes issues de la bourgeoisie mauricienne d’alors avait été fortement encouragée par les autorités coloniales. Après deux ans de travaux acharnés et 50 000 piastres investis, cet écrin de la culture va se tenir debout, au centre de Port Louis, place Foch. Le mardi 11 juin 1822, devant une assistance considérable, le gouverneur britannique Farquhar qui avait fort bien saisit que notre île était grande amatrice des arts soulignait que ce théâtre est « dédié aux plaisirs les plus purs et les plus délicats de l’esprit ».

Ainsi l’Hémisphère sud se dotait pour la première fois d’un théâtre. Maurice avait son temple de l’art, rempli de promesses pour une capitale qui ne demandait que cela.  Dans ce théâtre à l’italienne, des troupes successives y ont joué opéras et opérettes. Les partitions les plus connues, les plus célèbres y ont fait vibrer cette armature de bois, largement inspirée de l’architecture navale, qui soutient son toit.  Tout était pensé pour que ce lieu resplendisse. Le lustre qui, dit-on pourrait provenir de l’ancienne salle qui était aux limites du Jardin de la Compagnie, faisait briller de mille feux cet «hôtel de l’art lyrique ». Pour en faire un véritable écrin, les administrateurs feront appel à un peintre décorateur belge. Henri Théodore Vandermeerch transformera le dôme du théâtre en une véritable œuvre d’art.

En ces temps lointains, le théâtre était sans doute vu comme la pépite de notre capitale.  Convaincu par son importance dans la ville, la Corporation municipale de Port Louis en fera l’acquisition le 30 décembre 1854. Une loterie spéciale avait même été organisée pour soulever des fonds et permettre aux habitants de la ville de contribuer à faire entrer cet édifice culturel dans la liste des biens de l’agglomération.

Sur ces planches les saisons lyriques défilaient, devenaient des rendez-vous incontournables. Un auteur mauricien disait joliment que c’était « une sorte de festival de Cannes avant l’heure ». On cite les noms de Claude Piéplu qui y démarra sa carrière et qui a fait palpiter tant de cœur dans notre capitale. La génération qui a connu cet âge d’or se remémore aussi les brillantes performances de Max Moutia. Ne citer que le fait qu’il fit venir, pour célébrer le centenaire de municipalité de Port Louis, une troupe qui joua divinement bien Rigoletto de Verdi, relève d’une mise en bouche à peine suffisant.  Connaitre les grands hommes du théâtre local c’est aussi rendre hommage au travail qu’ils ont fait et voulu nous léguer !

Le théâtre de Port Louis s’était en 1981 affranchit de ses traditions pour accueillir le fameux Zozef ek so palto l’arc-en-ciel. La comédie musicale avait connu un triomphe. Les années passèrent, et les grands hommes avec…On ferma le théâtre pour rénovation. Depuis a commencé l’attente des sans-temps, comme dans le théâtre de Beckett. Godot attend…