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Rima Hitié, criminologue : Le sensationnalisme donne l’impression que la criminalité augmente

18 août 2011, 00:00

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Rima Hitié, criminologue : Le sensationnalisme donne l’impression que la criminalité augmente

Huit Mauriciens sur 10 nourrissent la perception que le taux de criminalité a augmenté alors que c’est l’inverse qui est vrai. Qu’en pensez-vous ?

- Les statistiques compilées par la police ont des limites. Elles sont établies sur le nombre de cas rapportés. Qu’en est-il des cas qui, pour diverses raisons, ne sont pas rapportés à la police ? D’où la nécessité de tenir compte de ce facteur par rapport aux statistiques de la police. Ce n’est pas un obstacle insurmontable. Il est possible de faire un état des lieux scientifique de la criminalité en ayant recours à un système de collecte de données réalisé auprès d’un échantillon représentatif de la population. C’est ce qu’on appelle un ‘victim survey’. Une des difficultés à surmonter avec cette approche, est la fréquence de sa mise en œuvre. Une autre approche peut faire l’affaire même si elle est  un peu plus difficile à mettre en œuvre. Elle consiste à mener une étude auprès des personnes engagées dans les délits de criminalité. Venons à la question de perception. La recherche du sensationnalisme à tout prix par bon nombre de titres de presse donne l’impression que la criminalité est un phénomène envahissant. Le message qui émerge est que la criminalité est en augmentation

Cette peur est-elle justifiée ou erronée ?

- La question ne se pose même pas, pour la simple raison que cette peur-là est là. Elle existe. C’est un fait. Donc puisqu’elle est là, elle est justifiée. Cependant, elle n’aurait pas dû exister.

Que faut-il faire pour que ce sentiment de peur puisse redescendre et atteindre un niveau acceptable et non alarmiste ?

- La population a besoin d’être rassurée par les autorités que sa sécurité est prise en charge et qu’il ne sert à rien de s’alarmer. Il faut lui donner des raisons de croire qu’elle est en sécurité et recourir à tous les moyens susceptibles d’exercer un effet de dissuasion sur les auteurs potentiels de délits criminels. La prévention est primordiale. Elle peut se faire de différentes manières. Faut-il encore que les autorités aient les moyens nécessaires pour mettre en place toutes les pratiques de prévention appropriées qui seraient à la hauteur de l’attente de la population en proie à des doutes quant à sa sécurité. L’îlotage ou plus précisément le « community policing » est un excellent outil de prévention contre la criminalité et une voie idéale pour faire intervenir cet indispensable partenariat entre la police et la communauté.

Que se passe-t-il si, pour des raisons qui peuvent être objectivement justifiées et défendues, les autorités ne parviennent pas à assurer la sécurité de la communauté ?

- La communauté doit être partie prenante de sa sécurité. Il ne faut pas tout attendre des autorités et jeter tout le blâme sur elles lorsqu’un problème d’insécurité surgit.

- La perception que la criminalité est partout telle une fatalité envahissante est incompatible dans une société où les communautés sont prêtes à prendre une part active à sa propre sécurité.

- Cela ne sert à rien à tout attendre des autorités. Cependant, il est du devoir des autorités de mettre en place le mécanisme devant permettre à la communauté de jouer le rôle qui est le sien en matière de sécurité.