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Redevance télé : pour quoi faire ?

18 juin 2013, 06:28

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Redevance télé : pour quoi faire ?

L’augmentation de la redevance télévisuelle est contestée de toutes parts. L’opposition et l’ACIM comptent notamment dénoncer avec force cette décision.

 

«N’est-ce pas une violation de mes droits si l’on me force à acheter quelque chose dont je ne veux pas?» L’avocat Raouf Gulbul estime qu’il devrait être possible pour un citoyen de contester en cour la décision du gouvernement d’augmenter la redevance télé de Rs 100 à Rs 150 par mois.

 

Or, cette question a, dans le passé, été débattue en cour et la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) a eu gain de cause. «Effectivement, la Cour avait décidé que c’était parfaitement légal que la redevance télé soit incluse dans la facture d’électricité mais je crois que depuis, la donne a changé», explique l’avocat.

 

Cette explication vient rejoindre celle de l’opposition parlementaire. Le leader de l’opposition Alan Ganoo a fait savoir que son parti compte déposer une «motion of disallowance» à l’Assemblée nationale, pour forcer le gouvernement à reculer sur la question. Une prise de position qu’ont applaudie ceux – nombreux – qui disent «mo pa get MBC». D’ailleurs, l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM) va dénoncer avec force cette décision à travers une conférence de presse aujourd’hui.

 

«Le principe d’une redevance télé n’est pas un problème en soi ; il est applicable dans tous les pays. C’est l’usage que fait le gouvernement de la télévision nationale, en la transformant en un outil de propagande qui pose problème. Le service public est devenu service du gouvernement et on ne peut raisonnablement pas imposer cela à tous les spectateurs», explique un ancien responsable de la MBC. Me Gulbul est, lui, plus direct : «Je n’ai jamais entendu quelqu’un dire BBC la pa bon, mais j’entends tous les jours, MBC pa bon

 

Mais c’est une considération que le gouvernement semble ne pas avoir prise en considération. Car le Premie ministre a affirmé à plusieurs reprises au Parlement que «la redevance télé aurait dû avoir été augmentée», qu’elle «n’est pas chère».

 

À la MBC, l’on n’est pas étonné de la décision annoncée par le gouvernement. «La situation financière de la MBC est désastreuse et depuis des années la direction est engagée dans une opération cut cost qui fait beaucoup jaser», indique une source à la MBC.

 

L’opacité entoure cependant cette «situation financière désastreuse». La MBC ne soumet plus son rapport annuel à l’Assemblée nationale alors que la loi l’y oblige. Le dernier rapport concernait l’année 2007-2008 et il a été soumis en… 2010 !

 

En sus, la MBC ne soumet plus ses rapports financiers au Financial Reporting Council pour qu’ils soient audités. Avec pour résultats que personne, sauf le directeur général et les membres du Board, ne contrôle la gestion des finances de la MBC.

 

Et pourtant, on parle là de sommes importantes. La MBC perçoit Rs 365 millions par an à travers la redevance (chiffre qui devrait être gonflé si la décision d’augmenter par 50 % la redevance va de l’avant). Et des sources fi ables à la MBC indiquent que les revenus de la station nationale en termes de publicités «tournent entre Rs 500 000 et Rs 1 million par jour

 

Malgré cela, la MBC, dit la direction, est en situation financière grave. «L’on fait des économies de bouts de chandelle. Ainsi, alors que l’on coupe par-ci et par-là, l’on recrute Nanda Armoogum sur contrat. Ce dernier perçoit une pension parce qu’il a pris une retraite anticipée de la MBC. Et l’ancien directeur de l’information, Datta Ramyead, qui est toujours grassement payé, ne fera désormais rien, étant relégué au placard. Mais il va quand même toucher son salaire», disent des sources dignes de foi.

 

D’autres montrent du doigt le fait que certaines nouvelles recrues de la rédaction, «protégées par la direction», qui étaient jusqu’ici employées sur contrat, viennent d’être «titularisées». En d’autres mots, elles ont dorénavant droit aux privilèges qu’accorde le Pay Research Bureau, «même si elles ne sont pas qualifiées et qu’elles sont médiocres dans leur travail. L’on récompense ceux qui sont disposés à faire ce qu’on leur demande sans poser de questions», dénoncent nos sources.

 

C’est, entre autres, ce que l’augmentation de la redevance télé va financer. «Non, on ne peut définitivement pas forcer les gens à acheter la MBC, faute de quoi on les prive d’électricité. Cela doit être discrétionnaire», conclut Me Gulbul.