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Projet de raffinerie à Mahébourg : Entre impératifs économiques et risques écologiques

6 février 2011, 00:00

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Projet de raffinerie à Mahébourg : Entre impératifs économiques et risques écologiques

Un parc de stockage de produits pétroliers et une raffinerie de pétrole. Il s’agit là du projet, encore embryonnaire, estimé à Rs 60 milliards, qu’envisagent le gouvernement mauricien et la compagnie pétrolière indienne Mangalore Refinery and Petrochemicals Limited dans le Sud du pays.

Des discussions pour l’aménagement de réservoirs de produits pétroliers à Maurice datent de juin 2010, lors de la visite du ministre de l’Industrie et du Commerce Showkutally Soodhun en Inde. Ce dernier avait évoqué le sujet avec le Premier ministre indien, Manmohan Singh.

Partant pour ce deal, le Chef du gouvernement indien avait, quant à lui, envisagé la possibilité d’y faire aussi construire une raffinerie de pétrole, pour le traitement du brut aux produits finis, et qui sera utile à la Grande Péninsule. Le site convoité se trouve dans le sud du pays, et Mahébourg a été cité dans un premier temps pour la construction du parc de stockage et de la raffinerie.

Lors d’une déclaration à la presse en janvier dernier, le ministre Soodhun avait avancé que ce projet sera bénéfique à Maurice, qui, valeur du jour, importe autour de 1, 1 million de tonnes métriques de produits pétroliers par an.

«La vision est de faire de Maurice un hub pétrolier dans la région, ce qui apportera des investissements directs étrangers et créera de l’emploi. Une raffinerie à Maurice signifie également que Maurice serait un centre d’approvisionnement, puisque le pétrole raffiné serait aussi exporté dans la région et que le pays bénéficiera sur le coût des produits pétroliers», avait indiqué Showkutally Soodhun.

Toujours selon le ministre, si toutes les démarches se concrétisent, la raffinerie sera opérationnelle d’ici fin 2014.
Ce projet est toujours à un stade embryonnaire. Avant qu’il ne se concrétise, une étude de préfaisabilité s’impose. Comme nous l’explique un expert qui souhaite conserver son anonymat. Selon celui-ci, ce n’est que lorsque les différents éléments essentiels seront réunis qu’une étude de faisabilité pourra être entamée.

«A ce jour, on n’en est même pas à ce stade. Ce qui est certain, c’est que l’économie mauricienne n’a pas les moyens d’absorber une raffinerie et devra impérativement avoir le soutien financier d’un marché étranger. En second lieu, il faudra adresser le problème de montage. Ensuite, pour que la raffinerie soit rentable, il lui faudra produire plus de six millions de tonnes de pétrole par an. Elle devra également dépendre de l’exportation, ce qui est tout à fait possible dans la région», précise notre interlocuteur.

Par ailleurs, lexpress.mu a appris qu’aucune modalité d’accord en ce sens ne s’est encore dessinée du côté de la State Trading Corporation (STC).

Dans une déclaration au site professionnel Bloomberg, le Pdg de Mangalore, U.K Basu a confirmé la tenue de discussions autour de tanks de stockage de produits pétroliers dans le pays, mais qu’ils attendent toujours des précisions formelles du gouvernement mauricien en ce qui concerne la raffinerie.

Cependant les militants pour la protection de l’environnement sont loin d’être rassurés. Ils soulignent la nécessité de prendre en compte l’impact environnemental du projet, qui va à l’encontre de Maurice Ile Durable.

Adi Teelock, membre de la Plateforme Maurice Environnement qui regroupe une dizaine d’associations actives dans le domaine de l’environnement, est d’avis que ce projet d’implantation d’une raffinerie de pétrole à Maurice, soulève des questions de deux ordres.

«A commencer, celui du bien-fondé d’une telle implantation dans le contexte de Maurice Ile Durable (MID), car un des principaux messages du MID est de faire en sorte que le pays dépende le moins possible des énergies fossiles. Par la suite, celui des impacts sur l’environnement. L’activité de raffinage de pétrole a des impacts très lourds sur l’environnement terrestre, aquatique, atmosphérique et marin. Sans oublier, l’impact sur la santé des Mauriciens et les risques pour une toute petite île comme Maurice», soutient-elle.

Il est à noter que le raffinage de pétrole a des effets négatifs sur l’environnement, car le processus entraîne le rejet de plusieurs polluants atmosphériques, dont les oxydes de soufre, les oxydes d’azote, les composés organiques volatils, les particules, le monoxyde de carbone et le benzène, de même que de nombreux gaz à effet de serre (GES).

Ceux-ci polluent l’air, mais aussi le sol et l’eau. En outre, compte tenue des matières combustibles mises en œuvre, il y a des risques accidentels comme les explosions de gaz, l’incendie d’hydrocarbures et la pollution aqueuse due aux eaux d’incendie.

A cela, le ministre Soodhun réplique que Maurice suivra les pas de Singapour qui malgré ses cinq raffineries, continue à accueillir plusieurs millions de touristes par an.