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Pirates somaliens: Entre impératifs économiques et pratiques culturelles

6 octobre 2010, 00:00

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Pirates somaliens: Entre impératifs économiques et pratiques culturelles

Maurice accueille, du 6 au 7 octobre, une conférence ministérielle sur la piraterie dans l’océan Indien. En marge de cette conférence, lexpress.mu vous propose une série de trois articles sur cette problématique qui constitue un réel danger pour les pays riverains.

La piraterie autour de la Corne de l’Afrique est une menace pour le transport maritime international depuis le début de la guerre civile en Somalie, immédiatement après la chute du régime dictatorial de Siad Barre, en janvier 1991. Le pays connaît, depuis, une succession de guerres civiles qui perdurent encore de nos jours.

Historique. Après l’effondrement de l’Etat somalien en 1991, les eaux de ce pays étaient  privées de marine et de gardes-côtes. Les chalutiers de pays européens et asiatiques (notamment italiens, grecs, espagnols et japonais) s’adonnaient alors à la pêche illégale et à la surexploitation de ces zones riches en thons et crustacés.

Au début, les attaques des pirates visaient donc les bateaux de pêche. Les pirates étaient  issus de l’ancienne marine ou des gardes-côtes somaliens ou étaient  d’anciens pêcheurs, appartenant souvent à des clans ou des villages qui leur donnaient refuge. Au fil des années, avec l’augmentation de l’activité des groupes, on note la présence d’étrangers parmi les équipages des navires pirates (Yéménites, Kenyans ou ceux qui disent être des anciens militaires britanniques). Les pirates  disposent d’un armement individuel relativement puissant (fusil d’assaut AK-47 et RPG-7).

Jusqu’en 2007, les bases de départ de la piraterie somalienne se concentraient essentiellement dans la région côtière de Mogadiscio. Un rapport des Nations unies indique même que des responsables du port de Mogadiscio auraient transmis à des pirates des informations visant à faciliter des abordages de navires. Mais en raison des combats continus dans cette région, les pirates somaliens ont déplacé leurs bases plus au Nord, principalement dans la région semi-autonome du Puntland, notamment les ports de Boosaaso, de Eyl et de Garacad.

Leur zone d’activité est désormais plus étendue, frappant jusqu’à 1 000 kilomètres des côtes de la Tanzanie et dans la Zone économique exclusive des Seychelles.

Mode d’opération. Ils utilisent de petites embarcations rapides pour se lancer à l’abordage de leurs cibles, lancées lors d’attaques en haute mer depuis un navire-base. Dans la plupart des cas, la cible, si elle n’a pas réussi à s’échapper, est détournée vers la côte et son équipage pris en otage jusqu’à ce qu’une rançon soit versée par l’armateur ou sa compagnie d’assurance.

Il existe en Somalie, autour des réseaux de la piraterie, une microsociété qui tente, à travers la criminalité, de pallier les insuffisances matérielles de la vie dans le pays. Les pirates opèrent pour le compte d’investisseurs (souvent des commerçants) qui fournissent la somme nécessaire à l’équipement d’un bateau-mère, lui-même dissimulant des embarcations rapides (skiffs), destinées à l’abordage. Les navires les plus vulnérables sont donc ceux étant bas ou lents. Une fois le bateau cible piraté, celui-ci est ramené à terre, dissimulé, et des interprètes (peut-être d’anciens enseignants) engagent les négociations pour la libération des otages, lorsque la prédation ne porte pas uniquement sur le fret.

Les causes. Plusieurs facteurs expliquent le phénomène de la piraterie maritime dans l’océan Indien. Il y a d’abord la thèse que la piraterie somalienne s’appuie sur l’absence d’État, celui-ci ne pouvant lutter contre la criminalité s’exerçant sur son territoire.

Une deuxième lecture, économique cette fois, considère que la piraterie en Somalie aurait pour origine la surpêche étrangère qui a accentué la pauvreté des populations locales. Le manque à gagner est estimé à plus de 300 millions de dollars par an.

Une troisième lecture, géographique celle-là, montre que la piraterie somalienne existe car elle bénéficie d’une route commerciale maritime facilement accessible. La Somalie dispose d’une côte maritime importante : 3 025 km et 200 milles nautiques d’eaux territoriales. Cette zone voit passer un trafic maritime important puisque l’essentiel du trafic entre l’Extrême-Orient et l’Europe passe entre la corne de l’Afrique et la péninsule Arabique, dans le golfe d’Aden, afin de rejoindre le canal de Suez. Il s’agit d’une route maritime où transite 12% du commerce mondial et 30% du pétrole brut.

Une quatrième lecture culturelle défend la thèse selon laquelle la piraterie somalienne serait une pratique déterminée par la tradition du pays. En effet, les coutumes et les us de ce pays admettent que les victimes peuvent moralement faire justice elles-mêmes au cas où elles ne sont pas compensées pour les préjudices subies.

(Source : Wikipédia)