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Lindley Couronne «Réinventer la relation homme-femme, parents-enfants, police-hors la loi, société-homosexuels»

8 décembre 2008, 01:00

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Lindley Couronne «Réinventer la relation homme-femme, parents-enfants, police-hors la loi, société-homosexuels»

Le directeur d’Amnesty Maurice, Lindley Couronne, nous évoque le sens profond des droits humains et analyse la perception de ces droits à Maurice, en 2008.

Que signifient les droits humains pour vous?

Ce sont les conditions de vie qui permettent à un être humain de vivre dans la dignité et la justice. Les droits humains, c’est aussi comment nous devons agir en situation avec les autres êtres humains, et surtout connaitre ses droits et ses responsabilités. Car à chaque droit, une responsabilité.

Peut-on dire que les droits humains sont plus respectés aujourd’hui à Maurice?

Certaines personnes pensent que c’est pire maintenant mais moi je choisis de voir le verre à moitié-plein. A Maurice, la société a changé. Le contexte macroéconomique a changé. Oui, ça c’est amélioré.
Maintenant, au moins, les droits humains sont à l’agenda.

Qu’en est-il des droits de la femme mauricienne?

La violence envers les femmes a toujours existé. Il y a eu des progrès en termes de législation. Dans le passé, le viol en temps de guerre était la récompense du soldat. Mais aujourd’hui, cet acte est considéré comme un crime de guerre. Les femmes d’aujourd’hui connaissent davantage leurs droits. Je pense que les femmes ont raison de se plaindre, vu la mentalité des hommes. Elles doivent pouvoir marcher dans les rues à 23h45, si elles le souhaitent, sans courir de danger.

Et quid des droits des enfants à Maurice?

Auparavant, les enfants n’avaient pas de droits et les parents avaient le droit de vie ou de mort sur eux– le droit patriarcal. Ce n’est en 1959 que l’ONU a proclamé la Déclaration des enfants. Personne n’a le droit de les frapper ou de les humilier. Ils doivent être libres de s’exprimer. Le gouvernement signe des lois et des conventions  et les ratifie mais il ne les n’explique pas suffisamment aux citoyens. L’Etat devrait sensibiliser les adultes, les parents et les enseignants. Certains professeurs infligent des punitions corporelles à leurs élèves. Pour certains parents, par exemple, ne pas avoir le droit de frapper leur enfant veut dire ne pas intervenir. Ils pensent alors que les enfants grandiront sans structure, comme de l’herbe sauvage. Heureusement qu’aujourd’hui, les enfants connaissent leurs droits. Par exemple, il y a eu cet enfant de sept ans qui a dénoncé son père à la police pour l’avoir frappé.

Et les droits des homosexuels?

La reconnaissance des droits des homosexuels a aussi progressé. L’île Maurice d’il y a 30 ans n’aurait pas permis de «gay pride». Nous ne sommes toutefois pas totalement ouverts, notre société est encore conservatrice, puritaine. Personnellement, l’orientation sexuelle d’une personne n’est pas mon problème, si cela concerne deux adultes consentants.

Si on devait justifier la partie vide du verre concernant les droits de l’homme à Maurice …

On dirait qu’il faudrait réinventer la relation homme-femme, parents-enfants, police-hors la loi, société-homosexuels. L’homme doit accepter de perdre ses privilèges. Je pense que la mentalité à Maurice aujourd’hui est encore primitive et celle-ci concerne une majorité de Mauriciens. Prenons le cas d’un voleur, nombreux se disent: il a volé, il mérite donc la mort. Je pense qu’il faut opposer les droits humains aux valeurs que nous avons reçues jusqu’à présent.

Que pensez-vous des droits de l’homme dans le monde?

Il y a une chose qui m’agace. Le montant des dépenses en armes aux USA est d’environ $15 milliards par an. Cela parait utopique mais vous imaginez, si on prenait le même montant pour éduquer les enfants du monde… Je suis d’avis que les grands Etats qui parlent de droits humains ont un double langage. C’est très hypocrite.  Par exemple, ce que les USA ont fait en Iraq…