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La collecte de sang évince les homos
Les préjugés sont décidément tenaces. L’acte de solidarité que représente le don de sang est refusé, à Maurice, aux personnes qui reconnaissent avoir des relations homosexuelles, peu importe qu’elles soient en parfaite santé.
«Were you or are you engaged in homosexual activities ? » C’est l’une des questions auxquelles il faut répondre pour pouvoir faire don de son sang à Maurice. Et c’est cette même question qui a amené un jeune homme à deposer une plainte à l’Equal Opportunities Commission contre ce qu’il considère comme une discrimination à l’égard d’une partie de la population .
Car quand le donneur potentiel reconnaît son homosexualité, son don est tout simplement refusé. Pour le président de la Mauritius Blood Donors’ Association (MBDA), Subhanand Seegoolam, ce refus est justifi é. « Des études menées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont démontré que les homosexuels sont des donneurs très à risque. On motive les gens à participer aux collectes de sang, on doit donc aussi s’assurer que les personnes qui bénéfi cieront
de transfusions sanguines ne contracteront pas de maladies », explique-t-il.
Pourtant, tout prélèvement sanguin destiné à alimenter une banque de sang est soumis à des analyses pour empêcher tout risqué de transmission d’une maladie infectieuse. Heureusement, souligne le president de la MBDA. Il n’écarte pas, en effet, la possibilité que des donneurs homosexuels respondent « non » à la question qui fâche et se trouvent autorisés à donner leur sang. « Bien sûr, après analyse, si le sang de ces personnes n’est pas sain, il est rejeté. Quoi qu’il en soit, les donneurs doivent être honnêtes et décliner leur orientation sexuelle », estime-t-il.
Subhanand Seegoolam soutient qu’il ne s’agit pas de stigmatiser la communauté homosexuelle, mais bien d’un problème de santé publique. « S’il est prouvé légalement qu’il y a discrimination contre les homos à ce sujet et qu’ensuite il y a un jour des problèmes liés à la transfusion du sang de ces derniers, les autorités concernées n’auront qu’à prendre leurs responsabilités ! » conclut-il. En attendant, pour lui, il est hors de question d’aller à l’encontre des norms internationales.
UN ACTE CITOYEN
« Quelles normes internationals ? », s’étonne Jean- Daniel Wong, le president du Collectif arc-en-ciel, une association engagée dans la lutte contre l’homophobie et les discriminations liées à l’orientation sexuelle. S’il ne remet pas en question les resultants des études de l’OMS, il précise toutefois que cette organisation international n’a jamais recommandé de prendre en consideration l’orientation sexuelle des donneurs de sang. « Ce sont les comportements à risques qui doivent retenir l’attention, et ils concernent aussi bien les homos que les hétéros. La question du questionnaire de la MBDA s’appuie sur un préjugé et est discriminatoire », déclare-t-il.
« Le don de sang est un acte citoyen auquel tout le monde doit avoir droit de participer, poursuit Jean-Daniel Wong. Au Collectif arc-en-ciel, on salue le geste de la personne qui a dénoncé cette injustice à l’Equal Opportunities Commission, de même que le président de cette instance qui estime que la question devrait être reformulée ». En outre, le president du collectif dénonce une atteinte à la vie privée à travers la question sur l’orientation sexuelle.
« D’autant plus que la sodomie est illégale à Maurice. Répondre à une telle question constitue donc un aveu de culpabilité », ajoute-il.
Par ailleurs, le don de sang permet à une personne de savoir si elle a contracté une maladie sexuellement transmissible (MST). Si l’analyse du sang du donneur révèle les traces d’une pathologie, celui-ci est appelé, en toute confi dentialité, par les services concernés pour subir un deuxième test sanguin et recevoir des conseils. Ainsi, en interdisant aux homosexuels de donner leur sang, on les prive aussi d’une occasion de se découvrir éventuellement une MST et d’être informés des risques qu’ils font courir à leurs partenaires s’ils ne sont pas soignés.
Une plainte pour discrimination
« Je n’ai jamais moi-même été victime de discrimination lors d’un dode sang. Mais je connais des personnes qui l’ont été. D’où ma démarche qui cadre avec le respect des droits humains des homosexuels », déclare le jeune homme qui a porté plainte il y a quelques semaines à l’Equal Opportunities Commission (EOC). Depuis, il a compilé un document de 60 pages qu’il vient de déposer à l’EOC, au bureau du Premier ministre ainsi qu’auprès du leader de l’opposition. « Les hétéros seraient plus à risque que les homos, selon les informations que j’ai trouvées lors de ma recherche.
Je comprends que la Blood Donors’ Association et le ministère de la Santé veuillent prendre des précautions mais il faut aussi comprendre que les spécifi cités du VIH/Sida à Maurice ne sont pas les mêmes qu’ailleurs », fait-il ressortir. « Déjà que peu de personnes acceptent de donner leur sang, c’est triste que l’on refuse celui d’une personne parce qu’elle est homosexuelle. Je ne vois pas pourquoi un gay, une lesbienne ou un(e) bisexuel(le) en bonne santé ne pourraient pas participer à cet acte de solidarité », conclut-il.
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