Publicité

Gaccio : La capacité d’indignation n’empêche pas d’être un bouffeur de dholl-purees

13 mars 2011, 00:00

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Gaccio : La capacité d’indignation n’empêche pas d’être un bouffeur de dholl-purees

Dans sa cinquantaine naissante, Bruno Gaccio a tout le physique du playboy macho : du haut de son 1m85 ou plus, il est sculpté comme un athlète de compétition. Des muscles taillés dans la pratique du golf, de la muscu et du jogging dans les petites ruelles chargées d’histoire de Saint-Germain sans oublier les matchs de foot épiques, sous la pluie, avec ses deux garçons, sur la pelouse d’un bungalow, pieds dans l’eau, loué à Cap-Malheureux.

Le Gaccio, dénicheur de talents pour une unité de production de Canal, ne vit pas à la spartiate : il bouffe raisonnablement, même quand ce sont les dholl-purees surchargés de currys épicés fume à la manière des mauvais garçons - contrairement à Boggie - en tenant la cigarette entre l’index et le pouce dans une main refermée évite les alcools forts, mais que le bon vin compense amplement.

Bruno Gaccio traîne le lourd boulet d’une notoriété qu’il a personnellement bâtie, par son talent, pendant plus de seize ans et qui certainement lui collera à la peau jusqu’à son trépas. Il a été non seulement le directeur des Guignols de l’Info sur Canal Plus, mais aussi l’éditorialiste-acide de Nulle Part Ailleurs sous la houlette de Philippe Gildas. Il proclame qu’on ne peut caricaturer dans la haine.

On lui reproche d’avoir rendu le latex Chirac sympathique. Et il rétorque : «J’ai quitté les Guignols en mai 2007. Il m’était impossible de continuer parce que je n’aime pas Sarkozy qui est la caricature de lui-même», pour expliquer son départ. Loin des Guignols, son humour n’en a pas été altéré pour autant. C’est un véritable régal de l’entendre commenter les vacances tunisiennes de Michèle Alliot-Marie et du contrat commercial que son père de 94 ans a signé avec des hommes d’affaires tunisiens «pour assurer son avenir, parce que c’est qu’on fait habituellement à cet âge».

Cet humour tenace souvent noir, jamais gratuitement méchant, on le retrouve dans son dernier livre La révolution ? On s’rappelle… Chaque chapitre traite d’un problème de société, aborde des thèmes de fond avec ironie, avec un rire en coin, souvent en manière de pied-au-nez aux théoriciens comme pour dire : «Après tout, allez vous faire voir…j’ai dit ce qu’il fallait dire…Même si je dois faire la révolution calé dans un fauteuil confortable de mon salon  !»

Contrairement à beaucoup de sa génération qui ont fait les pavés de 68 et qui ont basculé dans la Sarkozye, Bruno Gaccio a conservé intacte sa capacité d’indignation. Bien avant le phénomène Hessel. Contrairement à celui-ci, il n’est d’aucune chapelle malgré sa proximité et ses frottements avec le PS. Il a gardé une totale indépendance d’esprit. Ce qui lui permet déjà d’intérioriser la défaite de la gauche aux prochaines présidentielles, si les primaires roses devaient être sanglantes.
L’esprit et la disposition naturelle de Bruno Gaccio ne pouvaient être autrement. Il a été écolo avant la lettre. Il hurlait : «Allez, les Verts !» dans les années 70….C’était, il est vrai, à St-Etienne ! Il avait 17 ans et il montait alors à la conquête de Paris pour atterrir au Petit Théâtre de Bouvard où il rencontre Michèle Bernier qui devient sa compagne et la mère de ses deux enfants (Charlotte et Amédéo). Mais Bruno Gaccio n’est l’homme d’une seule femme : «Je suis capable de quitter une ville pour suivre le sourire d’une femme.» C’est ainsi qu’il a un troisième enfant (Enzo) d’une autre femme. On pouvait difficilement s’attendre de celui qui habite l’appartement de Marguerite Duras à Paris qu’il fasse preuve d’abstinence gandhienne !

Comme sa posture politique ne peut être différente de ce qu’elle est. Car il est le produit de la classe ouvrière. Son père, décédé depuis trois ans, était maçon et sa mère, à la retraite, peinait comme ouvrière d’imprimerie. Elle y a laissé un doigt. Cela laisse des empreintes forcément  sur un homme…

Bruno Gaccio… Un homme qui gagne bien sa vie, paie des tonnes d’impôts (en France), fréquente aussi régulièrement le café Flore qu’il vient à Maurice et qui remet en cause la société qui lui donne tant !

Nathalie Olivier