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Des travailleurs sociaux s’insurgent contre la situation des travailleuses de sexe

18 novembre 2009, 00:00

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Des travailleurs sociaux s’insurgent contre la situation des travailleuses de sexe

L’association des travailleurs sociaux dénonce le sort réservé aux travailleuses du sexe à Maurice. Témoignages aussi de la sœur de Marie-Ange Milazar.

Cette association a organisé, ce 18 novembre, une conférence de presse, suite au drame survenu la semaine dernière où Marie-Ange Milazar a perdu la vie. Plusieurs personnes ont intervenu pour partager leur sentiment et apporter leurs témoignages.

Belinda Babet, la petite sœur de Marie-Ange Milazar se dit révoltée par le meurtre sordide de sa sœur. «Tout le monde doit mourir un jour mais pas de cette façon. C’est encore plus difficile pour moi d’accepter que ma sœur ait subi des telles atrocités», confie-t-elle.

Étant elle-même une travailleuse du sexe, Belinda Babet explique que c’est par obligation, et non par choix, que des femmes se retrouvent à faire le trottoir. Les larmes aux yeux, elle raconte la situation de ces femmes. «Les gens nous dévisagent et nous prennent pour des ordures. Ils ne savent pas que personne d’entre nous ne se sent en sécurité et qu’on travaille avec la faim et la peur au ventre. Ma sœur avait six enfants de 4 à 23 ans. Ce n’est pas avec sa pension de Rs 1 500 par mois qu’elle aurait pu nourrir sa famille», fait-elle remarquer.

Selon Belinda Babet, les assassins étaient plus que trois personnes. «Ces trois petits malfrats n’auraient pas pu faire face à ma sœur. Quand j’ai témoigné à la police qu’ils étaient sept ou huit, elle n’en a pas pris compte», affirme-t-elle.

Patricia, une autre prostituée, a eu plus de chance. Les agresseurs de Marie-Ange Milazar lui ont fait subir des sévices semblables dans le même lieu où s’est produit le crime. Heureusement, cette dernière a pu leur échapper de justesse. C’est d’ailleurs grâce à ses témoignages que la police a retrouvé le corps de Marie-Ange Milazar. Elle se dit actuellement en danger car les parents de l’un des agresseurs seraient à sa recherche. Elle espère avoir la protection de la police.

Ali Lazer, secrétaire du centre Idrice Goomany, est aussi intervenu durant la conférence de presse. «Heureusement qu’il y a la presse indépendante sinon ce crime serait passé comme un simple fait divers», explique-t-il. Le centre Idrice Goomany, selon lui, a lutté durant des années contre ce fléau qu’est la prostitution. Il accuse le gouvernement de ne pas porter l’attention nécessaire à ce problème. «Quand nous avons tenté de rendre public un rapport sur la prostitution juvénile, les faits sont restés dans un tiroir car de grandes personnalités étaient impliquées. Mais aujourd’hui, il n’est plus possible d’étouffer le dossier de Marie-Ange Milazar», s’insurge-t-il.

Lors de son point de presse, Imran Dhannoo, président du centre Idrice Goomany, affirme que le centre a noté une forte féminisation de la consommation de drogues par seringue. Ce serait l’un des facteurs qui pousse les femmes à se prostituer. De certains rapports, il note que 60% des patientes qui bénéficient des soins de méthadone «se servent de leurs corps pour gagner leur vie, afin de pouvoir manger et boire». La plupart de ces patientes seraient issues des régions de Port-Louis.

Imran Dhannoo explique que l’initiative du gouvernement avec la distribution de méthadone est très honorable mais que c’est loin d’être suffisante. «Ce programme n’inclut pas un suivi pour encadrer les ex-prostituées afin de les réinsérer dans la société. Il ne prend pas non plus en considération les enfants de ces victimes qui ne peuvent pas laisser leurs enfants seuls à la maison tandis qu’elles subissent un traitement dans les centres de désintoxication. Et la méthadone soulage l’addiction mais ne remplit pas le ventre de ces femmes ainsi que celui de leurs enfants», déclare Imran Dhannoo.

Ali Lazer rappelle que la société, les familles et les autorités rejettent ces femmes et ainsi aggravent leur situation. «Notre société produit des monstres qui veulent ouvrir des ventres pour voir ce qu’il y a à l’intérieur. Il ne faut pas juste survoler les symptômes mais plutôt entrer dans la cause du problème. Nous parlons des droits de l’homme, qu’en est-il aujourd’hui des droits de Marie-Ange, de son bébé qui n’a pas pu voir le jour et des six orphelins qui ont perdu leur seul parent?», s’interroge-t-il en brandissant un article de presse qui montre que la justice a infligé une peine de deux ans de prison pour un récidiviste qui a violé et sodomisé une fille de quatorze ans.