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Combines et galères des clandestins mauriciens

6 avril 2014, 20:50

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Combines et galères des clandestins mauriciens
L’expulsion de Yashika Bageerathi par le Royaume-Uni a donné froid dans le dos à beaucoup de Mauriciens qui vivent clandestinement à l’étranger. Comme elle, ils sont nombreux à s’être envolés pour l’Europe ou d’autres pays à la recherche d’une meilleure vie. 
 
Souvent, ils partent rendre visite à des proches, qui eux sont déjà établis dans ces pays mais ils ne reviennent pas. Du coup, une fois passée la durée de leur séjour, les Mauriciens usent de plusieurs moyens pour pouvoir rester et vivre dans ces pays. Même si cette vie se limite à enchaîner de petits boulots non déclarés.
 
Samantha* vit en France depuis plus de 25 ans. Née à Maurice, elle a quitté l’île par amour. Elle a épousé un Français et ses enfants sont nés en France. Bien que sa situation soit régularisée, Samantha côtoie régulièrement d’autres Mauriciennes qui sont, elles, en situation irrégulière. Elle raconte que pour vivre, ces femmes sont obligées de travailler au noir. «Dans un cas en particulier, une jeune femme, qui était en vacances chez des proches, a décidé de ne pas rentrer à Maurice, abandonnant son époux et sa famille. Aujourd’hui. elle est femme de ménage en France», explique Samantha.
 

TRAVAIL AU NOIR

 
Contactée pour un témoignage, la jeune femme dont elle parle, Bélinda*, a refusé d’avouer sa clandestinité. Elle admet toutefois qu’elle s’est rendue en France pour des vacances en décembre dernier mais qu’elle a finalement décidé de déposer ses valises définitivement. Bélinda affirme même qu’elle a eu tous ses papiers d’un coup. «Je suis venue en vacances et j’ai aimé. Je suis restée. J’ai tous mes papiers et je suis en règle. J’ai d’ailleurs déjà décroché un emploi et ma vie est superbe ici. On appelle cela un coup de chance», raconte la jeune femme. Mais elle refuse catégoriquement de dévoiler le métier qu’elle fait afin de joindre les deux bouts.
 
Bon nombre de clandestins se font «embaucher» comme femme de chambre ou employé de maison. «Les employeurs ont tout à gagner. Ils leur paient un salaire misérable et puisque les employés ne sont pas reconnus, ils ne peuvent pas protester et doivent accepter leurs conditions», explique Samantha.
 
En Angleterre, la situation n’est pas mieux. Yashika Bageerathi peut en témoigner. La jeune fille n’avait pas ses papiers mais comme bon nombre de jeunes et d’enfants en séjour illicite, elle pouvait poursuivre ses études au collège. Pour Jessie*, une Mauricienne qui a émigré en Angleterre il y a une dizaine d’années, l’histoire de Yashika reflète bien le risque que court chaque clandestin au quotidien. Elle est aussi passée par cette situation.
 
«Quand je suis arrivée, j’avais un visa de touriste qui est valable trois mois. Et nous étions hébergés chez des proches. Après les trois mois, nous étions tous en situation illégale. J’avais un proche qui m’avait promis de m’aider à trouver un emploi mais une fois là-bas, rien de tout cela n’était vrai», raconte la Mauricienne.
 

DES PROIES FACILES

 
Passé quelques mois, Jessie décroche un emploi au noir dans une maison de retraite à des kilomètres de Londres où vivait sa famille. Elle décide de s’y rendre tous les jours mais la gérante de la maison de retraite va lui jouer un sale tour. «Elle m’a dit de lui confier tous mes papiers et de l’argent pour qu’elle fasse les démarches dans le but de me faire avoir un work permit. C’est ce que j’ai fait jusqu’à ce que j’apprenne que cette personne m’avait arnaquée. Les immigrés sont des proies faciles pour les arnaqueurs», poursuit la jeune femme.
 
Un jour, alors qu’elle travaillait dans la maison de retraite, les cadres du Home Office sont venus la chercher. «Je suis passée à l’arrière du bâtiment et je me suis enfuie», se rappelle-t-elle.
 
Désespérée, elle décide de rentrer à Maurice et de tout recommencer à zéro. Mais les choses prennent une autre tournure. Au moment où elle rencontre un avoué mauricien qui essaiera toutes sortes de solutions pour lui permettre de rester en Angleterre.
 
Des mois passent et ses enfants sont scolarisés. C’est alors que, suivant le conseil de l’avoué mauricien, le mari de Jessie s’inscrit dans un collège clandestin. La jeune femme raconte qu’auparavant, ce genre de collège poussait comme des champignons. Elle explique qu’il fallait payer les frais d’inscription pour même si, au bout du compte, aucun cours n’était dispensé. Une fois que son époux a été reconnu comme étudiant, toute sa famille a eu le droit de rester une année de plus en toute légalité. Entre-temps, Jessie a entamé ses démarches pour le permis de travail.
 
La jeune femme a fini par décrocher le droit de séjourner au pays de Sa Majesté, une fois qu’elle a fait son entrée dans le service médical. Du coup, depuis l’obtention de son work permit, elle a eu droit à un logement à tarif réduit, ses enfants poursuivent leurs études au secondaire et son époux a décroché un travail dans une collectivité locale.
 
 
*prénom fictif