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Centres commerciaux : Promesses de paysages transformés et de nouvelles habitudes de vie
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Centres commerciaux : Promesses de paysages transformés et de nouvelles habitudes de vie
La construction de nouveaux centres commerciaux connaît un boom, actuellement. Les régions rurales comme les zones péri-urbaines accueillent des édifices qui demain changeront les paysages et le mode de vie des Mauriciens.  
Bagatelle, Cascavelle, Ebène, Trianon, Helvetia, Rivière Noire. Tant d’endroits ou le paysage mauricien se redessine, les champs de cannes font place au béton. L’impact de ce développement immobilier qui sera considérable sur l’avenir des petits commerces et sur le schéma de consommation des Mauriciens.
Les projets rivalisent de promesses. Les uns annoncent des architectures qui hausseront Maurice au niveau international, tandis que d’autres proposent des loisirs pour améliorer la qualité de vie. Par exemple, 95 pourcent des espaces de Bagatelle ont déjà été loués avant même que le site soit achevé. Ce qui selon Gilbert Espitalier Noel, directeur général de ENL Property, est un signe de la viabilité du projet. «Nous sommes très heureux que la pré-location des espaces connaisse une tournure remarquable. 95 % des espaces sont déjà loués, ce qui est au delà de nos espérances », affirme-t-il.
Cependant si ces projets immenses font des heureux, les petits commerçants, eux, s’inquiètent pour l’avenir de leur boutique. lexpress.mu est allé à la rencontre de Michel,  commerçant d’Helvetia. Sa boutique se situe sur la route principale, à proximité du centre commercial qui est actuellement en chantier.
Il est 13hr15. La petite boutique de Michel, Helvetia Store, est silencieuse. Contraste flagrant avec les bruits de moteur, de marteau et de la poussière du chantier à côté. C’est un vieil homme, fatigué déjà, qui se tient derrière son comptoir. Interrogé sur ce centre commercial qui sort de terre, non loin de sa boutique, le commerçant ne cache pas sa crainte.
«Je tiens énormément à ma boutique, je l’ai hérité de mon père et cela fait plus de 80 ans que notre famille la dirige. Nous avons évidemment des clients fidèles, mais ce centre commercial qui se développe, me fait peur. Il va définitivement affecter mon commerce, mais on ne peut pas empêcher le développement», soutient-il.
Michel ajoute que le centre commercial, qui comprendra également un hypermarché, sera apte à avoir ses marchandises en gros et ainsi les prix seront plus attirants. Ce qui baissera radicalement sa clientèle.
Uma, habitante du village d’Helvetia, avance qu’elle n’hésitera pas à aller là où elle trouve le moins cher même si c’est une cliente fidèle de l’Helvetia Store. «Chacun cherche son avantage. La vie devient chère, il faut chercher les prix les plus bas», affirme Uma.
Comme Michel, sur cette même route, tout près du centre commercial, quatre autres commerces craignent de devoir fermer boutique, à cause de la rude concurrence.
Sur la grande route vers Quatre-Bornes, le paysage démontre un autre immense terrain vague, parsemé de Billboards qui annoncent l’arrivée proche d’un complexe commercial, Le «Ebène Mall of Mauritius». Non loin de ce site, encore un autre site le Trianon Centrepoint. Ce dernier, en construction depuis avril 2009, est arrivé à 50 pourcent de l’achèvement. Pourtant, à quelques mètres de là, il existe déjà le Trianon Shopping Park, très prisé par les Mauriciens.
Ashwin Chinnayya, directeur du Trianon Shopping Park, avoue que de gros efforts seront essentiels pour hausser le niveau de son complexe commercial, afin de ne pas perdre sa clientèle. «Nous étudions un plan stratégique pour améliorer le centre, dans le but de continuer à attirer les mauriciens», soutient le directeur.
Cependant, Ashwin Chinnayya fait ressortir que cela prendra du temps avant que les Mauriciens changent leurs habitudes. «Il y a deux types de clentèle, la grande masse, qui fait du shopping à chaque fin de mois et ceux qui n’attendent pas forcément leur salaire pour acheter. Or, avec la crise, nous avons tendance à favoriser les produits de base, comme l’alimentation. Mais ces grands centres commerciaux ne seront pas forcément adaptés au pouvoir d’achat des Mauriciens», affirme Ashwin Chinnayya.
Que les Mauriciens se mettent alors à dépenser plus. C’est justement ce que craint Nicholas Ragoodoo, sociologue. Egalement chargé de cours à l’Université de Maurice, Nicholas Ragoodoo, affirme plus il y aura de centres commerciaux, plus les gens seront tentés d’acheter.
«Ces centres ne sont pas forcément mauvais pour ceux qui sont en bonne situation financière. Mais, ceux qui sont au bas de l’échelle voudront également jouir de ce qu’offrent ces centres. Il y a alors, le risque d’endettement, voire de surendettement», soutient le sociologue.
A long terme, la société mauricienne rimera avec société de consommation. Un cercle vicieux, selon Nicholas Ragoodoo. «Plus les gens voudront acheter, consommer, plus ils seront obligés de travailler. Bientôt Maurice ressemblera à Singapour, il y aura de nombreux centres commerciaux mais les gens auront à travailler plus pour avoir accès aux produits offerts», lance le sociologue.
Maurice sera-t-elle une « Duty-Free Island » ? Le sociologue affirme que s’il faut en arriver jusque là, les Mauriciens n’ont pas vraiment le choix. «En effet, les dirigeants visent un tourisme haut de gamme. Il faut cependant pouvoir les accueillir dans le pays. Et ces complexes commerciaux attireront davantage de touristes. Mais bien sûr, tous les Mauriciens ne seront pas capables de profiter de ce progrès», conclut le sociologue.
Lire aussi " Maurice Paradis du shopping" dans l''express dimanche
http://www.lexpress.mu/esubscribe.html
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