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Canal Dayot: la peur d’une inondation toujours présente

6 février 2014, 20:42

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Canal Dayot: la peur d’une inondation toujours présente

Le passage du cyclone Edilson a réveillé de vieux démons chez les habitants de Canal Dayot à Maurice. Des images de l’inondation de mars dernier les hantent toujours et ce malgré le draguage du ruisselet St Louis, cause de tous leurs malheurs.

 

Pas un chat n’est visible à l’entrée du quartier de Canal Dayot. Si ce n’est de timides rafales, l’asphalte détrempé et les quelques branches et feuilles qui jonchent les routes, nous aurions peine à nous imaginer en alerte cyclonique. Il est 13 heures en ce jeudi 6 février, l’alerte cyclonique de classe 3 est encore en vigueur. Nous nous dirigeons vers  les berges du ruisselet St Louis.

 

En mars dernier, ce ruisselet, d’apparence inoffensive, était sorti de son lit, causant dans une course folle la perte de la plupart des biens de la centaine d’habitants de cette région de Port-Louis. Depuis, des travaux de dragage ont été menés par les autorités en vu d’élargir le lit du ruisselet.

 

C’est sur les berges de St Louis que nous rencontrons Bouck Pillay Vythilingum, qui habite la région depuis 1980. «Isi tou dimoun gaygn per», nous lance-t-il en guise de bienvenue, avant d’ajouter «nous n’avons pu dormir de la nuit. Nous avons dû surveiller  la montée des eaux».

 

Ici, depuis l’inondation, la moindre goutte de pluie est loin d’être une bénédiction du ciel. Pourtant, les berges ont été récemment terrassées et le lit du ruisselet agrandi. Pas suffisamment selon Bouck Pillay Vythilingum qui nous montre un morceau de terre encore intact de l’autre côté du rivage. «Ce terrain appartient à un industriel qui refuse qu’il soit terrassé. L’affaire est en cour. En attendant si l’eau monte et qu’il y a un glissement de terrain …. Nous ne voulons pas revivre l’inondation de mars dernier», confie Bouck Pillay Vythilingum.

 

Ce dernier est rejoint par Jean Paul Gillet dont la maison se trouve également à une centaine de mètres des berges de St Louis et qui tout comme son voisin est venu voir l’état de la «rivière». «Ce matin, Jean Paul m’a téléphoné, j’ai pensé qu’il m’annonçait que l’eau montait. J’ai paniqué. Si leker pa solid li kapav arete», ironise Bouck Pillay Vythilingum. Un coup d’œil à ladite «rivière» et nous constatons qu’elle est pourtant loin de gronder. Le niveau d’eau est même plutôt bas en ce temps pluvieux. «Ne vous y fiez pas, l’eau monte d’un coup sans crier gare», explique Jean Paul Gillet.

 

L’inondation de mars dernier est encore vivace dans l’esprit des habitants de Canal Dayot. Jean Paul Gillet n’hésite pas à nous montrer les photos du drame qu’il garde précieusement comme des témoignages de tout ce qu’il a perdu. «Depuis l’inondation, les agences d’assurances refusent d’assurer ma maison».

 

 «Les autorités nous avaient dit qu’elles allaient nous prévenir quand il y aura des perturbations climatiques. Pourtant depuis l’annonce cyclonique personne n’est venu nous voir. Kan zot inn arange enn larivierzot inn fini ar nou», s’insurge Rajaloo Colette, une autre voisine. «Nous voulons savoir quel volume d’eau cette rivière peut contenir et que l’état nous donne l’assurance que nous sommes en sécurité», revendiquent-ils.

 

Plus loin, Ruby Rose et Sarah Yin, deux voisines, sont en pleine discussion. «Le papa de Sarah est handicapé et on se demande comment on va faire si les choses se gâtent», fait soupire Ruby Rose. Sarah Yin lève les yeux vers le ciel : «le cyclone s’en va, je crois.» A toutes deux de confier que tout comme leurs voisins, elles ont peur que le ruisselet sorte de ses gonds.

 

Le climat lui retrouve peu à peu son calme. Les rafales et les crachins ne se font pratiquement plus sentir. Quelques oiseaux sentant le retour du beau temps gazouillent au milieu des arbres. Plus que la peur d’un autre cyclone c’est la colère qui envahit les habitants.