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BoM : le Monetary Policy Committee ‘new look’ au centre d’une controverse

5 avril 2012, 00:00

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BoM : le Monetary Policy Committee ‘new look’ au centre d’une controverse

De nouveaux règlements concernant le Monetary Policy Committee de la Banque de Maurice (BoM) sont entrés en vigueur en décembre 2011 après un amendement au Banking Act de 2004. Elle autorise le ministre des Finances à nommer cinq personnes à cette instance de la BoM.

A-t-on assisté à une perte de souveraineté et de l’indépendance de la Banque centrale au sein du Monetary Policy Committee (MPC) depuis qu’une nouvelle formule pour ce qui est de la composition de ce comité a été introduite en décembre dernier ?

Sir Indur Ramphul, ex-gouverneur de la Banque centrale, estime que la question d’indépendance ne se pose pas. « Ce comité est composé de 9 personnes, dont quatre sont de la Banque Centrale. L’avis de ces derniers est théoriquement acquis pour le gouverneur. Je postule que les autres membres de ce comité ont été choisis en raison de leur compétence et qu’ils sont en mesure de prendre une décision en leur âme et conscience. Pour imposer un argument dans le cadre d’une décision de politique monétaire, il s’agit de réunir 5 personnes autour de soi. Un tel objectif est-il si difficile à réaliser ? »

Invité à donner son avis sur le sujet, Pierre Dinan, membre du MPC, s’en est tenu qu’à la déclaration suivante : « Je me considère comme un membre indépendant du Monetary Policy Committee. »

Dan Maraye, ex-gouverneur de la Banque centrale, est d’avis que la nouvelle formule est « dangereuse ». Il explique : « Ce comité est composé de neuf membres dont quatre seulement sont de la Banque centrale. Il n’est pas juste que le président de ce comité, en l’occurrence, le gouverneur de la Banque, doive assumer l’entière responsabilité en cas de blâme concernant une décision approuvée par cinq personnes. » Il s’élève contre ce qu’il appelle une incongruité.

Pour sortir de cette impasse, Dan Maraye propose deux solutions. La première consisterait à réduire à huit le nombre de membres de ce comité. Cette démarche, a-t-il expliqué, devrait être assortie d’un vote prépondérant au gouverneur en cas d’égalité de voix lors d’un vote. L’autre option serait de confier la tâche de nommer les membres du Monetary Policy Committee à un comité parlementaire composé des élus des deux bords politiques. « On pourrait ensuite inviter le Premier ministre et le leader de l’opposition de nommer chacun deux membres. »

La perception d’une perte de souveraineté de la Banque centrale au niveau du MPC a surgi dans le sillage de l’entrée en vigueur d’une nouvelle formule de composition des membres de ce comité en décembre.

Dans la formule antérieure, le MPC était composé du gouverneur, de ses deux assistants, de deux membres du conseil d’administration et de deux membres étrangers à la banque choisis en raison de leur expérience dans les domaines économiques, bancaire et financier. Les deux directeurs, à savoir Jacques Li Wan Po et Shyam Seebun, de même que Pierre Dinan et Jagnaden Coopamah avaient été choisis par le vice-Premier ministre et ministre des Finances.

La nouvelle formule est entrée en vigueur à la suite d’un amendement de l’article 54 (1) du Bank of Mauritius Act de 2004. Donc une décision du gouvernement. Conséquemment, la Banque centrale est représentée par quatre personnes à savoir le gouverneur lui-même et trois autres Senior Officers.

Il existe deux nouveaux éléments au niveau des membres nommés par le vice-Premier ministre et ministre des Finances après consultations avec le gouverneur. D’abord, le nombre passe de quatre à cinq. Ensuite, les cinq membres ne font pas partie du personnel de la Banque mais ont une expérience confirmée dans les domaines économique, bancaire et financier.

Cette perception de perte de souveraineté a été renforcée lors d’un vote engagé à l’issue de la réunion du MPC tenue le 19 mars 2012. Résultat : les cinq membres nommés par le ministre des Finances ont voté en faveur d’une coupe du taux directeur de la Banque de 50 points de base (un point de base étant l’équivalent à un centième d’un pour cent). Ce qui a ramené à 4,90 % le taux directeur, c’est-à-dire le taux de référence qui détermine les taux auxquels les banques commerciales vont prêter de l’argent.

Ainsi, la nature du vote lors de la dernière réunion du MPC a créé la perception, à tort ou à raison, que la présente formule pourrait potentiellement ronger la marge de manœuvre de la Banque.

Il y a un autre point de discorde qui illustre l’existence d’un profond malaise au sein de la Banque de Maurice. Il s’agit de l’annonce de la décision du MPC sans l’aval du gouverneur. Celui-ci a même consigné une déposition à la police pour enquêter sur l’origine de cette fuite d’information.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est la Banque Centrale elle-même qui, en 2007, prit la décision de mettre sur pied le MPC, un outil indispensable dans l’exercice d’une de ses premières fonctions à savoir la stabilisation des prix.

En effet, pour combattre tout risque potentiel d’inflation, la Banque peut agir au niveau de l’offre de l’argent en relevant le taux directeur. Cependant, la politique monétaire a une autre fonction intimement liée à la stabilisation des prix. Il s’agit de stimuler les activités économiques. Difficile pour la Banque de toujours trouver le juste équilibre entre ces deux facteurs. Autrement dire : satisfaire le consommateur et les opérateurs économiques.