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Aruna Gangoosingh : Entrepreneuse et fonceuse

14 février 2014, 00:00

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Aruna Gangoosingh : Entrepreneuse et fonceuse

Les meilleures intentions du monde auraient pu s’échouer sur les écueils des formalités administratives. Mais c’est mal connaître Aruna Gangoosingh. La jeune femme a transformé la maison familiale de Rivière-des-Créoles en gîte qu’elle a baptisé « Titli », mot hindi signifiant papillon.

 

À 34 ans, Aruna Gangoosingh, qui a enseigné l’anglais pendant 12 ans à La Réunion, a toujours voulu développer son petit coin de paradis natal, soit Rivière-des-Créoles, village situé entre terre et mer. «Je voulais faire bouger ce village qui est très roots.Un peu plus loin, il y a Mahébourg et Pointe-d’Esny, qui sont développés sur le plan touristique, mais il n’y avait aucune offre de ce genre à Rivière-des-Créoles

 

Elle fait alors rénover la maison familiale qui s’y trouve et la scinde en appartements de quatre chambres, équipés chacun d’une cuisine individuelle. Elle y aménage aussi un espace de vie comprenant bar et grillades au feu de bois. «L’idée était d’offrir un service à la carte où le client peut venir pour dormir uniquement, choisir une formule ‘bed & breakfast’ou demi-pension, tout en se voyant proposer des balades et d’autres excursions destinées à lui faire découvrir l’âme du village et les sites touristiques aux alentours», explique-t-elle.

 

Avec son cogérant, Arnaud Govindin-Ramassamy, elle étoffe l’offre en conséquence. Côté restauration, c’est une cuisine typiquement réunionnaise sur feu de bois qui est proposée aux Mauriciens et aux étrangers. Pour obtenir, par exemple, le boucané et les saucisses préparés comme à l’île soeur, les cogérants négocient avec des éleveurs de porc de la région, à qui ils soumettent des recettes. Et là où ils le peuvent, ils s’approvisionnent chez l’habitant afin que celui-ci puisse aussi en profiter. «Le but étant de pousser les produits du terroir

 

Comme un potager et plusieurs arbres fruitiers ont été plantés sur le terrain familial, Aruna Gangoosingh utilise en cuisine les légumes qu’elle récolte et même certains des fruits pour préparer toute une gamme de rhums arrangés. Il n’y a que certaines préparations épicées qu’elle importe de La Réunion comme le fameux masale.

 

Nouvelles règles

Même si elle entend faire un clin d’oeil à la cuisine réunionnaise, elle prépare aussi des plats mauriciens. «Le couchage uniquement est à Rs 800 par personne alors que l’hébergement en demi-pension est àRs 1 360 par personne. Et pour les Réunionnais quipassent par le Journal de l’Île de La Réunion pour venir chez nous ou par le Sésame, qui est le guide pour la zone de l’océan Indien, avecqui nous avons des accords,il y a une offre tarifaire encoreplus intéressante. Et cen’est pas parce que nos tarifs sont bas que notre service n’est pas à la hauteur. Nous sommes peut-être de jeunes entrepreneurs mais nous offrons un service de qualité

 

Elle démarre son projet en 2011 et sur papier, celui-ci coûte Rs 500 000. Elle tombe des nues lors de l’enregistrement de son établissement. Le qualifiant de gîte, elle est incapable de le faire enregistrer comme tel, car si le terme est accepté à Rodrigues, il ne l’est point pour des établissements de ce type à Maurice. La Tourism Authority (TA) lui propose alors d’enregistrer Titli sous la catégorie de Tourist Residence.

 

Et là, partout où elle passe, elle découvre de nouvelles règles qui ne lui avaient pas été spécifiées au départ. «On ne te donne pas toutes les informations dès le départ. Tu les reçois au compte-gouttes. Quand tu déposes ton dossier, personne ne te dit qu’il faut faire tel ou tel aménagement. C’est quand ils viennent faire la visite des lieux qu’ils disent qu’il manque telle ou telle chose et on voit subitement le coût du projet enfler. Et là,on ne parle pas d’une roupie mais de millions tant il ya des détails à voir et qui se greffent sur le budget initial.»

 

Il faut aussi dire qu’elle a joué de malchance car lorsqu’elle démarre sa rénovation, le prix du ciment connaît une hausse. De plus, elle équipe toutes ses chambres de ventilateurs de la marque Pacific et bien qu’elle ait rapporté ces appareils pour vérification au revendeur après les catastrophes matérielles et humaines occasionnées par ces appareils et que les siens aient été décrétés en parfait état de fonctionnement, Aruna Gangoosingh préfère dormir sur ses deux oreilles. «Je ne veux prendre aucun risque. Donc, j’en ai racheté d’autres de marque différente. Cela a occasionné des dépenses additionnelles.»

 

De surprise en surprise

 

Elle vient de recevoir un nouveau «cadeau» sous forme d’une allocation supplémentaire de Rs 800 par chambre à verser au conseil de district. Quand elle demande si cela lui assurera un second jour de collecte d’ordures, on lui réplique que ce n’est pas lié. «Lorsque l’on est dans le tourisme, ce n’est pas possible qu’on vous enlève vos ordures une fois la semaine uniquement.Je suis d’accord pour payer mais le service doit suivre. Cela devait être donnant-donnant.»

 

Elle va de surprise en surprise. Lorsqu’elle se rend à la Mauritius RevenueAuthority pour obtenir une licence en vue de vendre de l’alcool, par exemple, les fonctionnaires disent ignorer ce qu’est une TouristResidence. «Ils m’ont dit d’aller prendre un autre permis en tant que Guest House mais Titli n’est pas une Guest House. Je leur ai rappelé que j’ai rempli mon formulaire entant que Tourist Residence et qu’ils m’ont même donné un Tax Account Number pour cela.Heureusement que j’ai de bonnes relations avec la TA et que je peux prendre conseil.Mais c’est sans cesse ainsi.»

 

Depuis qu’elle s’est lancée dans les affaires, elle se rend compte qu’à Maurice, c’est «la culture de l’à peu près, du mo vini la. Tout le monde est comme ça. Et après, on trouve étrange qu’ily ait une fuite des cerveaux.Ma culture à moi, c’est le professionnalisme.«Je suis rentrée pour faire un développement dans mon pays et j’ai suivi toutes les étapes en étant en règle avec la loi. Ce genre de dysfonctionnement m’agace et draine toute mon énergie positive. Il faudrait que les autorités accordent leurs violons et encadrent mieux les petits entrepreneurs pourqu’ils sachent exactement ce qui les attend.»

 

Aruna Gangoosingh ne manque pas d’idées sur le développement futur de Titli qu’elle verrait bien accueillir des conférences et des ateliers de travail, de même que les expositions d’oeuvres ou les représentations d’artistes les plus divers. Pour que le papillon vole encore plus haut…

 

Pour contacter Aruna Gangoosingh, veuillez lui adresser vos courriels à : info@titli-mauritius.com