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AILES vole au-delà de Mangalkhan

17 juin 2013, 00:00

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AILES vole au-delà de Mangalkhan

Sollicitée par des personnes vivant avec le VIH dans différentes régions, l’association AILES doit trouver des fonds pour assurer son expansion. Une quête sera organisée du 21 au 23 juin.

 

Révoltée par les overdoses parmi les jeunes à Mangalkhan, Brigitte Michel mobilise un groupe de volontaires en 2009 et crée Aides, Infos, Liberté, Espoir et Solidarité (AILES). En cinq ans, l’association a accueilli plus d’un millier de bénéficiaires : des usagers de drogues injectables, des mamans en deuil, des enfants déboussolés...

 

Petit à petit, l’équipe s’est professionnalisée grâce au soutien de la Mauritius Commercial Bank Forward Foundation et compte aujourd’hui trois salariées, dont Brigitte Michel, formée en Community Services Work à l’Institut Charles Telfair.

 

«Depuis 2009, nous avons accompagné 250 usagers de drogues pour qu’ils accèdent au programme méthadone. Les proches ne voulaient plus entamer les démarches par découragement ; or le centre d’induction à la méthadone exige toujours une personne référente et les travailleurs sociaux d’AILES ont joué ce rôle», précise Brigitte Michel.

 

De bouche à oreille, le dévouement des membres d’AILES a dépassé les murs de la cité de Mangalkhan. «Des gens viennent aujourd’hui de Tamarin, Rivière-Noire, Bambous, Rose-Hill ou Quatre-Bornes pour chercher du soutien chez nous à Floréal. Nous avons même reçu une personne de Chemin-Grenier, qui souffre du VIH en phase sida. Elle était éligible à une pension sociale en raison de son état de santé mais elle voulait être accompagnée par un travailleur social, car elle était terrorisée à l’idée que la confidentialité ne soit pas respectée par les fonctionnaires !» raconte Brigitte Michel.

 

En plus des démarches administratives et des visites à l’hôpital, les travailleuses sociales d’AILES, Cindy Trevedyet Cindy Mohabuth, animent des rencontres chaque vendredi pour une trentaine de personnes sous méthadone. «C’est l’occasion de créer une relation de confiance avec nos bénéficiaires ; nous regardons un film avec un thème qui les fait réfléchir à leur situation, comme Midnight Express ou Philadelphia. Lors du débat qui suit, les bénéficiaires partagent leur vécu et se remettent souvent en question», souligne Cindy Mohabuth, travailleuse  sociale. «Pour plus de convivialité, nous partageons un déjeuner ensemble. Certains bénéficiaires vivent dans des conditions terribles, car ils ne travaillent pas ou alors à temps partiel. Mais tous ont la volonté de changer, alors ils apprécient ces rencontres où ils peuvent s’entraider pour rester sur le bon chemin.»

 

Soins à domicile

 

Pour les femmes sans emploi ou vivant de jobs précaires, AILES a aussi développé un programme de formation comprenant des cours de conduite, une initiation à l’artisanat et à la fabrication de produits alimentaires. Un projet soutenu par la Mauritius Telecom Foundation, l’an passé. Mais Brigitte Michel caresse un rêve encore plus ambitieux : former ces femmes afin qu’elles deviennent aides-soignantes.

 

«À Johannesburg, en Afrique du Sud, j’ai vu que c’était possible de limiter les décès des personnes vivant avec le VIH en proposant des soins performants à domicile et en formant les familles. Pour les antirétroviraux, l’observance thérapeutique est cruciale, sinon le patient développe une résistance au traitement. Donc, le soutien des membres de la famille est déterminant pour s’assurer que le patient suit bien les recommandations médicales. Notre projet fonctionnerait avec un médecin et une infirmière de garde, et des religieux pour l’accompagnement spirituel mais l’essentiel des soins serait donné par une équipe d’aides-soignantes issues de la communauté de Mangalkhan. Ce projet aurait aussi l’avantage de limiter les visites à l’hôpital. J’ai déjà contacté un centre hospitalier à Saint Pierre, à la Réunion. Bonne nouvelle, ils sont disposés à nous aider !» s’enthousiasmeBrigitte Michel.

 

La coordinatrice d’AILES espère que ce projet sera retenu pour un financement par le Decentralised Cooperation Programme de l’Union européenne. Les financements étant le nerf de la guerre dans le secteur social, AILES ne fait pas exception et lance un appel aux entreprises qui souhaitent soutenir ses activités en versant leur contribution CSR (Corporate Social Responsibility).

 

Un appel aux bénévoles est également lancé !

 

*AILES. Tél : 755 2950


Lourd bilan depuis janvier

 

L’association AILES a enregistré 37 décès de personnes vivant avec le VIH depuis le début de l’année, dont une quinzaine parmi les jeunes âgés de 18 à 35 ans. «Certains ont interrompu le traitement d’antirétroviraux dont ils ne supportaient plus les effets secondaires, d’autres refusaient de se rendre à l’hôpital à cause de la stigmatisation... La situation est grave !» s’emporte Brigitte Michel. «Il faut parfois insister pour faire admettre une personne à l’hôpital, alors que son état est très préoccupant. Sans l’intervention pressante des travailleurs sociaux auprès du médecin, le patient doit retourner à la maison au risque d’y mourir seul !»

 

L’association AILES enregistre également des décès de jeunes par overdose due à des combinaisons malheureuses de substances. «Actuellement il y a un gros trafic de psychotropes qui touche les jeunes de collèges, entre autres. Le gouvernement devrait avoir un contrôle plus strict de ces médicaments et la police devrait sévir pour faire tomber les pharmaciens véreux. Aujourd’hui, on peut acheter des psychotropes aussi facilement que du Panadol !» regrette amèrement Brigitte Michel.


 

La danse comme rempart contre les fléaux de la société

 

«Des enfants bourrés de talent dansaient dans la rue à Mangalkhan ; c’est en les voyant que nous avons eu l’idée de lancer la ‘Kids Dance Therapy’, en 2012», raconte Cédric Veerasamy, le président de l’association AILES.

 

Après l’initiation par la compagnie Omada de Cécile Gonzalez, les 44 enfants de 7 à 15 ans sont aujourd’hui encadrés par l’équipe de danseurs de Stephen Bongarçon. Les cours de danse ont lieu chaque samedi après-midi et une à deux fois par mois, une session de prévention sur les conduites à risques a lieu après la danse, à travers des projections de film, des quiz, des ateliers d’art plastique. Des activités coordonnées par la travailleuse sociale Cindy Mohabuth : «À travers leurs dessins, nous voyons bien que ces enfants sont confrontés au problème de la drogue et du VIH dans leur environnement proche, alors nous essayons de les éduquer sans faire du bourrage de crâne.»

 

Aujourd’hui, l’association AILES est très satisfaite des résultats de la «Kids Dance Therapy». «Nous constatons que les enfants ont gagné en maturité et sont plus responsables», observe Cédric Veerasamy. «Nous aimerions que ces changements se traduisent positivement sur leur scolarité. La plupart des jeunes de Mangalkhan arrêtent l’école en «Forms»III ou IV, alors nous fixons un gros challenge : leur faire prendre goût aux études et les pousser dans leur formation scolaire ou vocationnelle.»

 

Le projet de «Kids Dance Therapy» soutenu par «Maurilait» du «Groupe Food and Allied» devrait donc s’étoffer avec un suivi individualisé des résultats scolaires de chaque enfant, un contrôle de ses problèmes de santé et des  visites à domicile des familles. «Si ces jeunes réussissent, nous allons changer la réputation du quartier de Mangalkhan… Et je vous assure que certains de ces enfants ont le potentiel pour devenir des danseurs professionnels !» prédit Cédric Veerasamy.

 

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