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Afghanistan-Pakistan : le grand retour des djihadistes

30 juillet 2012, 00:00

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Afghanistan-Pakistan : le grand retour des djihadistes

L''''Otan et l''armée pakistanaise n''arrivent pas à s''entendre pour détruire les sanctuaires talibans et terroristes de chaque côté de la frontière. La situation profite aux combattants islamistes.

La remarque a fait l''effet d''une petite bombe. Vendredi 27 juillet, l''ambassadrice du Pakistan à Washington, Sherry Rehman, participe à une conférence sur l''Afghanistan. La table ronde est organisée par un centre de recherche américain dans le Colorado. Alors que les participants rivalisent de déclarations acerbes sur le Pakistan, Sherry Rehman dissimule mal son exaspération : "Depuis huit mois, nous subissons des attaques de combattants qui passent la frontière afghane. Nous avons informé l''Otan à 52 reprises des zones depuis lesquelles ils opéraient en Afghanistan. []...] Mais on ne peut pas faire le ménage tout seul." La diplomate fait allusion aux talibans pakistanais qui lancent des opérations coup de poing contre des postes-frontière et des villages pakistanais depuis les provinces afghanes du Nuristan et de la Kunar. Et l''Otan ne semble pas les inquiéter.

Piqué au vif, Douglas Lute, le conseiller de Barack Obama pour l''Afghanistan et le Pakistan qui participe au débat, réplique : "On ne peut pas comparer la présence récente de talibans pakistanais en Afghanistan et la relation qui existe depuis dix ans entre des membres du gouvernement pakistanais et les talibans afghans."

Dialogue de sourds

Dimanche, c''est au tour de l''Isaf de lancer sa propre salve dans un communiqué de presse : "Les affirmations (de l''ambassadrice) sont inexactes. À chaque fois que l''armée pakistanaise a demandé notre aide, nous avons envoyé des troupes." La déclaration est inhabituelle de la part des militaires occidentaux en Afghanistan. Elle révèle le dialogue de sourds qui s''est instauré entre les Pakistanais et l''Otan. Ni la coalition ni l''armée pakistanaise ne se font confiance. Chacun accuse l''autre de laisser les insurgés opérer depuis son territoire. Difficile dans ces conditions de partager des informations et de coordonner des opérations militaires.

Zones refuges

Cette discorde profite aux insurgés et aux groupes terroristes. Al-Qaida est présente le long de la frontière afghano-pakistanaise, en particulier dans le Nuristan, aux côtés des talibans pakistanais qui multiplient les raids vers le Pakistan depuis un an. En 2011, ils avaient lancé une douzaine d''opérations, tuant près de 150 civils et militaires. Après la trêve hivernale, ils ont repris leur campagne. En juin et juillet, ils ont attaqué l''armée et les villages à neuf reprises au moins. Bilan : environ 40 morts.

Un échec patent

Leur cruauté a grimpé de quelques degrés. Le 24 juin, une centaine de talibans quittent leurs bases du Nuristan et attaquent des soldats pakistanais de l''autre côté de la frontière. Ils capturent 17 prisonniers qu''ils décapitent. Trois jours plus tard, ils envoient une vidéo à la presse. À l''image, les têtes coupées des 17 militaires sont exposées sur un drap blanc.

La présence de sanctuaires talibans de chaque côté de la frontière afghano-pakistanaise aura des conséquences inquiétantes. Les groupes terroristes comme al-Qaida bénéficient de zones refuges.

 Le Lashkar-e-Taiba, un groupe terroriste pakistanais qui a planifié les attentats de Bombay en 2008, envoie aussi des combattants en Afghanistan depuis au moins deux ans. Or, le Lashkar-e-Taiba ne cache pas sa haine de l''Inde et de l''Occident où il pourrait bien commettre de nouveaux attentats à l''avenir. Pourtant, quand la coalition a envahi l''Afghanistan en 2001, l''opération était censée débarrasser le pays des djihadistes. Dix ans plus tard, l''échec semble patent.