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Affaire Boskalis : Chady sera jugé le premier

19 août 2012, 00:00

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Affaire Boskalis : Chady sera jugé le premier

L’ancien ministre travailliste devrait être inculpé formellement avant la fi n de l’année, dans l’affaire des pots-de-vin liés à l’attribution de marchés publics dans le port.

Le ministère public met les bouchées doubles pour traduire en justice les différents protagonistes impliqués dans le scandale Boskalis. Siddick Chady, l’ex-président de la Mauritius Ports Authority (MPA), sera le premier à faire face à un procès. Il est soupçonné d’avoir reçu des dessous-de-table de la firme hollandaise, qui souhaitait se voir attribuer des marchés publics dans le port de Maurice. L’ancien ministre travailliste risque fort d’y laisser des plumes, des documents accablants ayant été saisis par les autorités néerlandaises au siège de Boskalis. Le parquet mauricien compte placer Chady sous le coup d’une inculpation formelle d’ici la fin du mois d’octobre, au plus tard avant la fin de l’année.


Cette fois, les preuves sont là

L’affaire traîne depuis quatre ans. L’enquête a, dans un premier temps, été placée sous la responsabilité de la commission anticorruption (Icac). Arrêté et inculpé une première fois en 2008, Siddick Chady a bénéficié d’un abandon des poursuites en février 2011, en raison d’un manque de preuves dans le dossier de l’accusation. Pour cause, les Pays-Bas ne pouvaient remettre les documents à charge réclamés par les autorités mauriciennes, la société Boskalis ayant enclenché une procédure judiciaire dans son pays pour s’opposer à cette démarche.

Quand Amsterdam transmet finalement les documents liés à des transferts d’argent de la firme hollandaise vers Maurice, d’autres éléments apparaissent. Tels que le fait que Prakash Maunthrooa, ancien directeur de la MPA devenu consultant pour le compte de Boskalis, aurait joué un rôle dans les versements de pots-de-vin. Le directeur des poursuites publiques décide alors de confier l’enquête au Central Criminal Investigation Department, certains suspects ne pouvant être poursuivis selon les dispositions de la Prevention of Corruption Act. Chady, Maunthrooa, puis l’ancien conseiller du Premier ministre Gilbert Philippe, bénéficiaire d’un versement de Boskalis sur son compte en banque à Singapour, sont arrêtés en juin 2012.

Maunthrooa et Philippe donnent des explications sur le versement d’argent de Boskalis. Le premier en tant que consultant de la société, le second affirmant que Chady lui a remboursé un emprunt. Siddick Chady, lui, a du mal à faire comprendre aux magistrats comment une firme étrangère, spécialisée dans les travaux de dragage en zone portuaire, a pu régler les factures de son entreprise, Blockbuster Video Network, pour l’achat de films. Boskalis a même payé la note pour des longs-métrages de Bollywood directement en Inde…

Si Siddick Chady est aujourd’hui inquiété, c’est à travers un fax de Boskalis envoyé à Blockbuster Video Network, concernant un transfert d’argent vers le compte de Gilbert Philippe à Singapour. Cette télécopie a atterri, en juillet 2008, entre les mains de Rajen Bablee, l’actuel directeur exécutif de Transparency Mauritius, journaliste à l’époque. Celui- ci ne s’est pas fait prier pour publier l’information.

A l’époque, Boskalis venait de conclure un contrat de Rs 537 millions avec la MPA pour le dragage de l’English Channel. Elle aurait ainsi avancé 25 000 dollars à Chady pour être sûre que de futurs contrats ne lui passent pas sous le nez. 60 000 dollars ont aussi été versés sur le compte de la filiale londonienne de Blockbuster Video Network, ce qui a mené à l’arrestation de plusieurs proches de l’ancien ministre.

Dans le cadre de cette affaire, le parquet compte également placer Boskalis dans le box des accusés. Ce qui, pour l’entreprise, s’avère paradoxalement être une bonne chose. Car si elle est poursuivie en Hollande, elle risque d’être interdite de participer aux appels d’offres pour des chantiers publics dans les pays del’OCDE.



Boskalis inquiétée d’Amsterdam à Montevideo

En fouillant dans les documents de la Royal Boskalis Westminster N.V pour aider la justice mauricienne, les autorités néerlandaises auraient levé d’autres lièvres concernant les pratiques en cours au sein de cette multinationale. Des procédures judiciaires pourraient ainsi être lancées contre elle à Amsterdam. En attendant, outre les procès en attente à Maurice, une enquête a été ouverte en mai contre une filiale de Boskalis en Argentine et en Uruguay, RioVia.
Celle-ci aurait proposé un million de dollars au président d’un organisme public pour qu’il facilite l’extension d’un contrat de 19 millions de dollars pour le dragage de deux canaux. Cette affaire intéresse au plus haut point les autorités des deux pays car le canal Martin-Garcia, stratégique pour Montevideo, vise à concurrencer le port de Buenos-Aires.