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Métro: on ne parle plus de transport mais d’immobilier

10 octobre 2022, 11:00

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Métro: on ne parle plus de transport mais d’immobilier

Le discours sur les avantages de ce projet a graduellement changé de direction. On n’entend plus de la diminution de la congestion routière, de la baisse de la pollution, de la réduction de nos importations en carburant, ni de la création d’emplois. Ce sont les «Urban Terminals» qui sont maintenant présentés…

Hier, dimanche 9 octobre, c’était le lancement de la ligne de métro Curepipe– Port-Louis, avec un voyage inaugural entre la ville Lumière et Phoenix-Les Halles. Pourquoi Phoenix-Les Halles ? On ne sait pas trop. Le contenu du discours de Pravind Jugnauth, hier à Curepipe, tout comme ceux que lui et d’autres ministres ont tenus récemment à ce sujet, ne font plus référence à ce qui se disait au début, quand il fallait justifier les investissements de Rs 13 milliards (presque Rs 40 milliards à ce jour) et la fin du DoubleTaxation Agreement avec l’Inde. 

Diminution de la pollution avec l’usage du métro ? Pas si certain, car le nombre de voitures a augmenté sur nos routes avec l’aide notamment des détaxes et en l’absence de mesures incitatives pour utiliser le métro, comme le soulignait l’ingénieur Osman Mahomed. Qui avait aussi parlé des projets paradoxaux de construction de routes en parallèle. 

L’importation de carburants n’a pas non plus diminué et figure toujours en pole position dans nos importations ; ce qui aggrave de jour en jour notre déficit commercial. Les emplois dont on nous faisait rêver, eux, ne sont plus au rendez-vous. Au contraire, on craint une réduction dans ce secteur, notamment dans les transports publics. Les emplois créés pour la construction du chemin de fer sont allés pour leur part aux travailleurs et contracteurs indiens. 

Baisse des embouteillages (qui coûtaient Rs 4 milliards par an au pays en 2017) grâce au métro ? Disparue des allocutions ministérielles. Car la congestion routière demeure et s’est même aggravée, comme nous l’a dit un opérateur d’autobus (l’express d’hier). Le seul argument qui subsiste est la rapidité du transport par métro. Mais au prix d’un ticket plus cher. Et aussi aux dépens d’une augmentation des bouchons sur nos routes malgré, comme le rappelait hier cet opérateur d’autobus, la construction de nouvelles routes et d’autoponts par dizaines. 

Les nervis du MSM ont intimidé notre journaliste en présence de policiers. © Aurélio Prudence

Que reste-t-il donc comme arguments pour justifier tous ces milliards ? Les Urban Terminals et leurs alentours, comme l’a souligné hier le Premier ministre. Sinon, avec le métro, dira Pravind Jugnauth, ce sera moderne et les villes seront transformées avec ces «développements» commerciaux et autres. Comme la facilité pour le shopping à Phoenix Mall que le Premier ministre a tenu à préciser. 

Quant au confort, nul doute que les autobus ne pourront pas rivaliser avec le métro. Cependant, le tram ne pourra jamais le faire avec… les voitures individuelles, que les Mauriciens ne veulent pas ranger au garage. 

Ainsi, les arguments présentés maintenant en faveur du métro concernent plus les Urban Terminals et leurs magasins, entre autres, que le transport. Même pour ces magasins, le succès ne semble pas garanti, les marchands boudant les locaux des Urban Terminals.


Rencontre avec la presse mais pas de questions

Les journalistes ont été priés hier de se mettre à l’arrière du tram, loin des ministres, entourés d’une armada de gardes du corps et de policiers. Lors des arrêts à Vacoas et à Phoenix, les journalistes n’ont pas été autorisés à suivre la délégation à l’extérieur du train. Seuls quelques photographes ont pu sortir. Malgré la promesse de Das Mootanah que le Premier ministre s’adresserait à la presse, à la fin de son discours et de celui, plutôt long et inaudible, de la haute-commissaire indienne, Nandini Singla, Pravind Jugnauth a pris la direction de la sortie. Nous avons quand même pu lui demander s’il est satisfait et croit toujours que le métro apportera une baisse des embouteillages, de la pollution et de l’importation de carburants. Il s’est juste contenté de nous dire : «Je reste confiant.» Alors que notre journaliste s’apprêtait à lui faire remarquer que le discours avait changé, les policiers l’en ont empêché disant que la délégation était pressée pour assister à une autre «fonction».

 

 


Une atmosphère partisane et d’intimidation

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	<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/cyril_souciant.jpg" width="620" />
		<figcaption><strong>Cyril Souciant était le seul à défendre un Curepipien qui se faisait insulter.</strong></figcaption>
	</figure>
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<p>Beaucoup d&rsquo;invités arboraient des T-shirts du MSM et criaient <em>&laquo;Vive Pravind !&raquo;</em> à tout instant. Et lorsque notre journaliste a voulu poser sa deuxième question, quelques nervis s&rsquo;en sont pris à lui et l&rsquo;ont insulté.<em> &laquo;To nek zis poz kestion twa!&raquo;</em> À l&rsquo;extérieur, un autre partisan du MSM insultait copieusement un Curepipien qui voulait s&rsquo;exprimer sur ce raout politique. Heureusement pour lui, un vieil habitant de 75 ans de Curepipe, Cyril Souciant, s&rsquo;en est mêlé, tout en lançant au partisan du MSM : <em>&laquo;Pa kas Pravind sa, nou kas sa. Li gagn drwa kozé.&raquo; </em>Cyril Souciant nous dira plus tard qu&rsquo;il n&rsquo;est pas contre le projet, mais contre la corruption. Il était seul en face des dizaines de nervis du MSM.</p>