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«Future of banking in Mauritius»| Digitalisation et ouverture sur l’Afrique: une vision à concrétiser

14 septembre 2022, 21:00

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«Future of banking in Mauritius»| Digitalisation et ouverture sur l’Afrique: une vision à concrétiser

Le ton est donné pour le secteur bancaire avec cette nouvelle feuille de route après la présentation du rapport condensé, «Future of Banking in Mauritius». Des stratégies proposées, on retrouve la digitalisation du secteur, la diversification des offres de services financiers ou encore une stratégie africaine. Pourtant, cela semble du déjà-vu. Quid de l’intégration de l’intelligence artificielle dans le système bancaire ? Quid de notre positionnement sur le marché africain face à Dubaï ou d’autres centres comme l’Afrique du Sud ? Le potentiel mauricien est sans aucun doute bien présent, mais passer de vision à résultat concret reste le défi.

La montée en puissance et la descente tout aussi spectaculaire de l’engouement pour la cryptomonnaie face au nouvel intérêt grandissant pour la Central Bank Digital Currency (CBDC), qui attire tous les regards récemment, suffisent à nous faire comprendre la rapidité à laquelle le monde financier, incluant le secteur bancaire, évolue. Pour rester à la page de ces progrès dynamiques, la banque de Maurice et la Mauritius Bankers’ Association (MBA) avec la collaboration de la firme Oliver Wyman, ont complété et soumis leur rapport intitulé Future of Banking in Mauritius, dont la version abrégée est disponible au public. Ce rapport vient identifier les principaux objectifs stratégiques du secteur pour doubler la contribution des services financiers à l’économie mauricienne, et son application se fera sous la supervision de la BoM.

Des stratégies proposées dans ce rapport condensé, on retrouve évidemment la digitalisation du secteur bancaire ou encore la diversification de nos offres financières et notre ouverture au marché africain. Faisons un bref survol des avenues que propose ce fameux rapport. Il y est indiqué que comparé à ses pairs, le secteur bancaire mauricien est stable et bien ancré dans le paysage local avec seulement 10 % de la population non bancarisés. Notre juridiction a aussi pu relever le défi de se conformer aux normes internationales pour sortir des listes grise et noire du Groupe d’action financière (GAFI) et de la Commission européenne. Quelle est donc cette «nouvelle» vision ? On retrouve la migration vers le cashless à travers les paiements numériques, ce qui devrait aider à mieux cerner le comportement des clients tout en limitant les activités frauduleuses. Outre la mise en application de plateformes cashless, le rapport propose de renforcer la campagne actuelle explicative de sensibilisation aux offres financières pour augmenter la confiance des Mauriciens dans les systèmes de paiements digitaux.

Or, il faut le dire, la digitalisation du secteur bancaire ne peut en aucun cas se limiter aux paiements digitaux. Ce rapport public étant abrégé, l’on ne connaît donc pas toutes les propositions sur ce sujet mais il est clair que l’adoption du digital implique moins de succursales physiques à travers l’île et plus d’innovations en termes d’intégration et d’utilisation de l’intelligence artificielle pour comprendre les besoins du client et mieux positionner nos produits et services. Or l’application de ces systèmes requiert de l’investissement et des compétences bien précises, d’autant plus que ce type d’expertise est en demande partout dans le monde. Pour commencer, sur la question des paiements digitaux, comment augmenter le nombre d’opérateurs proposant ce service ? «Augmenter le nombre de points d’acceptation des paiements digitaux est, définitivement, un élément essentiel pour réaliser nos ambitions, soit l’avènement d’une économie cashlite. À ce jour, le taux de pénétration de l’acceptation des paiements numériques, au niveau national, est d’environ 10 %. Dans le même temps, presque tous les consommateurs sont équipés de cartes ou d’une application mobile permettant d’effectuer un paiement numérique. C’est la raison pour laquelle nous devons équiper les PME et microentreprises de solutions adéquates pour leur permettre d’accepter les paiements numériques. Afin d’y arriver, le MAUCAS QR interopérable demeure un outil clé» explique Stephanie Ng Tseung, Head of Payments SBU, à la MCB. Pour cette dernière, nous devons également être en mesure de fournir une alternative aux paiements par chèque, qui reste le moyen de paiements privilégié des PME. «Je pense que les différents acteurs du secteur, à savoir les banques, les régulateurs et les clients, doivent être impliqués dans l’élaboration d’une feuille de route nationale vers la suppression progressive de ce moyen de paiement faisant usage du papier, qui est obsolète.»

Soutien et formation 

Cette migration présente pourtant un coût, pourquoi les opérateurs devraient-ils s’y intéresser ? «Il est vrai que d’un point de vue de l’offre, nous devons proposer des solutions d’acceptation de paiements plus efficaces en coûts afin d’équiper des marchés inexploités de terminaux de paiements adaptés tels que des ‘mini POS’, des ‘soft POS’ ou des QR Code papier. La question de la tarification est également un élément clé pour favoriser plus d’adoption. Nous devons aussi être en mesure de démontrer les avantages des paiements digitaux : efficacité, augmentation des ventes et informations sur les clients grâce aux données de paiement, entre autres.» En parallèle, les PME et microentreprises ont besoin de soutien adéquat et de formation appropriés pour ne pas se sentir marginalisées dans ce cheminement vers le cashlite. «Ce cheminement vers le cashlite est une opportunité pour les banques de collaborer avec des fintech et servir le marché avec des solutions innovantes basées sur les besoins des clients» précise Stephanie Ng Tseung.

Dans le même contexte, le rapport parle de faire de Maurice un centre régional d’excellence, comment la digitalisation peut aider ? «Connecter les infrastructures nationales de paiement en temps réel peut permettre à notre centre financier de capter les flux transfrontaliers régionaux. Maurice peut aussi tirer avantage de son positionnement géographique unique, étant situé dans le corridor entre l’Afrique et d’autres régions du monde, facilitant ainsi le commerce intra-africain. Je pense que la mise en place d’une plateforme numérique de financement du commerce consolidera notre juridiction comme un centre innovant de financement du commerce offshore pour les entreprises et les institutions. En renforçant ses capacités et en adoptant de nouvelles technologies, notre centre financier sera en mesure d’instituer l’écosystème nécessaire pour s’ouvrir à de nouveaux marchés.»

Un autre chapitre concerne nos offres financières et notre ouverture sur le marché africain. On retrouve évidemment l’utilisation de services FinTech pour améliorer la compétitivité du secteur et l’expérience client, entre autres. Le rapport mentionne aussi la mise en place d’un Regional Treasury Scheme, avec des incitations fiscales bien définies visant particulièrement les activités de Corporate Treasury. Cela devrait accentuer la visibilité de Maurice auprès des multinationales qui souhaitent installer à Maurice leur base de trésorerie régionale. Faire de Maurice une destination privilégiée pour le Private Banking, en ciblant particulièrement les riches Africains et Mauriciens est aussi de mise. Or, il est intéressant de noter que le centre financier sud-africain est bien positionné, même si sa note de crédit est en baisse et son instabilité politique peuvent être à l’avantage de la juridiction mauricienne. Cela dit, il ne faut pas négliger l’attrait du centre financier de Dubaï pour ces riches Africains. En effet, l’avantage de Dubaï est aussi son réseautage et sa capacité à mettre les clients en contact avec les bonnes personnes, étant une plus grosse structure internationale. De plus, pour l’incorporation de nouvelles entreprises de gestion de patrimoine et de trésorerie à Maurice, l’on peut se demander pourquoi des pointures internationales choisiraient Maurice avec une si petite base de clientèle locale, sans oublier notre désavantage géographique pour un riche Africain, comparé à l’Afrique du Sud, par exemple. «D’abord, il faut reconnaître que le secteur des services financiers, le système bancaire local, en particulier, a bien progressé ces dernières années, maintenant des niveaux de fonds propres supérieurs aux exigences réglementaires internationales. C’est un socle très important pour le pays. L’Afrique est un continent de potentiel pour Maurice. Il est aussi raisonnable de supposer qu’au cours de la prochaine décennie, de nombreuses économies africaines montreront des signes de croissance plus importants. Une croissance accélérée du PIB entraînera des besoins accrus pour gérer et investir ces sommes. Maurice est bien placé pour être le centre qui peut recevoir des capitaux de l’Ouest ou de l’Est, de l’Afrique ou de l’Asie, et ensuite canaliser ces fonds dans des investissements partout où cela est nécessaire», explique MarcAlexandre Masnin, directeur des Investissements d’AfrAsia Bank.

En pleine mutation digitale

 Selon lui, grâce à sa stabilité politique, son cadre juridique, son infrastructure et son système fiscal, le système bancaire mauricien est en pleine mutation digitale et de nombreux opérateurs financiers, ou non, offrent des solutions digitales. «Ces offres sont ce que recherche la clientèle du global business, c’est-àdire des clients étrangers qui utilisent Maurice et son secteur bancaire comme alternative ou en complémentarité à leur secteur bancaire domestique. Nous avons la possibilité d’ouvrir des comptes en devise internationale forte (EUR, USD, CHF…) mais aussi en yuan ou encore en dollar hongkongais, en soutien des transactions internationales réalisées par cette clientèle. Tout comme pour les investissements que nous faisons principalement sur les actifs et marchés internationaux.»

La question reste, Maurice a-t-il le potentiel et l’offre pour attirer clients et opérateurs étrangers à installer leurs opérations ici ? «Le secteur bancaire est constitué de 19 banques, dont 10 sont des filiales de banques étrangères. Les étrangers peuvent avoir confiance dans notre juridiction puisque toutes les banques ont migré, depuis 2014, suivant le durcissement de la réglementation bancaire issue des accords Bâle 3. D’ailleurs, le ratio d’adéquation moyen des banques locales est de 19,5 %, ce qui est très conservateur, permettant à Maurice d’être classée 31e pays sur 139 en termes de sécurité du système bancaire. En revanche, le secteur bancaire est relativement concentré, deux banques se partagent 45 % du total des actifs qui représentent globalement USD 42 milliards. L’arrivée de plus d’opérateurs étrangers va ainsi, d’une part, pousser le secteur à progresser et se rapprocher encore plus des standards internationaux, et d’autre part, permettre de réduire la concentration des actifs. C’est certainement en vue de l’arrivée de ces nouveaux opérateurs que la Banque de Maurice propose des initiatives innovantes que ce soit en termes de banque privée, de stratégie ESG ou d’actifs virtuels», précise Marc-Alexandre Masnin.

Il ne faut pas oublier que beaucoup de riches Africains vont en Europe et à Singapour, s’ils peuvent passer les contrôles préalables. Finalement, il est clair qu’il existe un marché pour nous, mais il est très concurrentiel et nos banques privées sont petites en comparaison aux structures de nos concurrents. L’investissement dans le numérique est donc une bonne stratégie si l’on tient compte des coûts de la cybersécurité et des compétences nécessaires pour faire grandir ces innovations. Donc, la vision de la digitalisation du secteur bancaire de même que la stratégie Afrique, ne sont pas de nouvelles propositions, mais leur mise en œuvre reste le défi à relever.

Daniel Essoo, chief executive officer de la Mauritius Bankers Association
«Nous avons un rayonnement régional, ce qui représente un énorme marché»

<p><em>&laquo;Au niveau de la MBA on accueille favorablement ce rapport qui est le fruit d&rsquo;une étroite collaboration entre la BoM, la MBA et le cabinet Oliver Wyman. Il faut savoir qu&rsquo;il y a eu des discussions très approfondies pour établir les stratégies et notre positionnement sur nos marchés cibles, les continents africain et asiatique plus particulièrement, qui présentent un fort potentiel de croissance. Ce rapport vient donc définir les axes de développement, les nouveaux produits à introduire ou à renforcer. En ce qui concerne la concurrence, il faut mettre en ligne de compte le niveau de service et la réputation solide de notre juridiction, sans oublier notre niveau élevé de sécurité pour les investisseurs. Le monde et le paysage financier changent très vite ; nous avons ici de la place pour d&rsquo;autres prestataires de services car, dites-vous bien, que nous ne sommes pas qu&rsquo;un marché de 1,3 million d&rsquo;habitants, mais nous avons un rayonnement régional, ce qui représente un énorme marché. Nous avons aussi des accords avec des pays d&rsquo;Asie, d&rsquo;Afrique, d&rsquo;Europe et les États-Unis, permettant à Maurice d&rsquo;être un carrefour d&rsquo;affaires avec des infrastructures financières développées.&raquo;</em></p>