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Rodrigues - Nouvelle piste d’atterrissage à Rs 4 Mds: zone de turbulences

6 septembre 2022, 16:15

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Rodrigues - Nouvelle piste d’atterrissage à Rs 4 Mds: zone de turbulences

La piste de Plaine-Corail décollera malgré les obstacles, dont le retrait de l’aide de l’Agence française de développement. C’est ce qu’a annoncé le Premier ministre lors de sa visite à Rodrigues. Mais hormis les finances, d’autres facteurs devront être pris en considération, comme l’impact sur l’environnement.

Le sujet continue à faire grand bruit. La construction d’une nouvelle piste d’atterrissage à Plaine-Corail alimente les débats, suite à l’annonce faite par le Premier ministre lors de sa visite à Rodrigues à la fin du mois d’août. Pravind Jugnauth a d’ailleurs pris l’engagement auprès du gouvernement régional que cette piste verrait le jour malgré les «macadams» sur son chemin.

Un haut cadre d’Airports of Mauritius Limited (AML) affirme, lui, qu’il est confiant que sa compagnie, avec le soutien du gouvernement, aura d’autres bailleurs de fonds pour ce projet estimé à 85 millions d’euros, soit environ Rs 4 milliards. Il tient à préciser que le retrait de l’Agence française de développement (AFD) n’a aucun rapport avec les commentaires de Moody’s sur le fonctionnement des institutions mauriciennes ; c’est plutôt, selon lui, pour des raisons environnementales que cette agence a changé de position. C’est la raison également donnée au gouvernement de Rodrigues. D’après le plan, une partie de l’aéroport devrait être aménagée dans un lieu où poussent des arbres endémiques et il y a également des grottes à proximité de cette piste.

«Pas nécessaire d’emprunter auprès d’institutions étrangères (...) puiser de la MIC.»

D’ailleurs, le Conseil des ministres a accordé une dérogation à ce projet pour qu’il soit exempté d’études d’Environmental Impact Assessment. Il nous revient que l’Assemblée régionale de Rodrigues travaille avec la Mauritian Wildlife Foundation pour réduire l’impact des travaux sur l’environne- ment à Plaine-Corail et les villages avoisinants.

Pour en revenir au financement de ce projet, AML précise qu’elle dispose déjà d’un don de l’Union européenne (UE) qui s’élève à 16 millions d’euros, promis depuis 2018. De plus, notre interlocuteur ajoute que quand le nouveau projet a été lancé sous ce gouvernement, il y avait des discussions avec l’AFD, la Banque mondiale et l’International Finance Corporation. Malgré le retrait de l’agence française, AML demeure confiante qu’elle trouvera d’autres sources de financement afin de ne pas perdre le soutien de l’UE. Car, si le projet ne va pas de l’avant, celle-ci reprendra ses sous.

Dans un courriel envoyé à l’express au cours de la semaine écoulée, Vincent Degert, l’ambassadeur de cette instance, a déclaré : «L’UE s’est engagée de manière forte sur ce projet il y a trois ans. Notre volonté n’a pas changé. Nous étudions donc avec le ministère de la Planification économique et des finances la possibilité de confirmer notre engagement sur ce projet. Par ailleurs, nous travaillons avec l’Assemblée régionale et les autorités mauriciennes dans le contexte d’une vaste consultation citoyenne sur le nouveau plan stratégique de développement durable et intégré de dix ans à Rodrigues.»

Le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, affirme, lui, qu’il n’est pas nécessaire d’emprunter de l’argent auprès d’institutions étrangères pour financer la construction de la nouvelle piste et, dans la foulée, gonfler encore la dette publique. L’ancien ministre des Finances propose de puiser de l’argent de la Mauritius Investment Corporation Ltd (MIC), qui dispose d’un fonds de Rs 35 milliards. De rappeler qu’il y a autant d’argent dans les «special funds». Le leader du Mouvement militant mauricien, Paul Bérenger, estime, quant à lui, que le retrait de l’AFD est «intriguant».

Un aéroport comme «pôle économique»

En 2006, Airbus avait entamé une étude pour le compte de l’Aéroport de Paris, qui allait développer celui de Plaine-Corail en partenariat avec le gouvernement mauricien. Jean-Marie Richard, qui était le représentant et le responsable d’Airbus dans l’océan Indien, a suivi ce projet depuis sa gestation. «Il ne suffit pas d’investir une grosse somme d’argent dans une piste d’atterrissage pour accueillir des moyens porteurs une fois le matin et une deuxième fois le soir, pour ensuite fermer l’aéroport toute la journée. Cela n’en vaut pas la peine», lâche-t-il. L’ancien responsable de communication d’Airbus affirme que Plaine-Corail doit devenir un pôle économique qui fonctionne toute la journée avec des bureaux, des boutiques et d’autres commerces. «Il doit aussi être utilisé pour le fret avec des bureaux et des hangars pour ce type d’activité.»