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Focus: pourquoi la hausse du prix du gaz ménager va nous asphyxier

20 avril 2022, 14:19

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Focus: pourquoi la hausse du prix du gaz ménager va nous asphyxier

Doit-on ressortir le «poukni»? Depuis hier matin, le gaz coûte plus cher. Alors que les consommateurs suffoquent déjà, les commerçants comptent-ils revoir leurs prix à la hausse? Verra-t-on apparaître l’effet domino?

Nouveau coup de massue. Depuis hier, le gaz ménager coûte Rs 60 de plus, augurant un retour à la mode du poukni et la mort à petit feu des snacks et autres marchands de gato délwil, entre autres.

Des commerces pourraient ainsi être amenés à mettre la clé sous le paillasson. Les marchands de gato délwil, eux, ont touché le fond de la karay. Le porte-monnaie du citoyen est, lui, plus que jamais sur le gril.

C’est le cas de Jean-Christophe, un retraité habitant de Bambous. «Il y a des augmentations en cascade. Le consommateur se débat. Il n’était pas opportun d’augmenter ces prix. Avec une pension de Rs 9 000, comment va-t-on vivre ? Après avoir payé les factures, acheté les médicaments et les produits de première nécessité, il ne reste plus grand-chose», confie-t-il.

Farheen, divorcée depuis trois ans, s’occupe seule de ses deux enfants en bas âge. «La vie est amère. La plupart des articles coûtent les yeux de la tête. Et là, la bonbonne de gaz passe à Rs 240. C’est insupportable. Nou pa gagn lapey par Rs 500 000 kouma minis nou. Je ne sais pas jusqu’à quand on tiendra.»

Comme eux, de nombreux Mauriciens ne savent plus comment joindre les deux bouts. «Pé trasé mem, mé tou pri pé monté.» Une phrase qui ponctue les conversations dans les files d’attente devant les tricycles de marchands de gâteaux. Les commerçants estiment que la hausse du prix du gaz vient mettre le feu aux poudres. «Éna kliyan pé boudé, pé dir pou aret asté gato. Bé ki pou ariv nou? Gaz inn monté, kapav pou bizin réget pri», confie Ibrahim, qui travaille dans la capitale depuis qu’il a 15 ans. «Les consommateurs sont devenus plus réti- cents maintenant. Ils achètent le strict minimum. Ils ne se font plus plaisir en achetant ce qu’ils veulent.»

«Nou karay pé rann gaz», ironise Rajesh, un autre marchand de gâteaux. Après la hausse du prix de l’huile en début d’année, il n’a pas augmenté ses prix pour ne pas faire souffrir sa fidèle clientèle. Pour pouvoir garder ses prix inchangés, il a dû grignoter sur ses profits. Il se demande comment il va faire maintenant que le prix du gaz a grimpé. En ce moment, Rajesh emploie six personnes. Il craint de devoir se séparer de certains d’entre eux pour pouvoir tenir le coup.

Autre commerçant affecté par cette augmentation : Désiré Janvier. Ce dernier tient un étal de mines frites. à Curepipe. S’il utilise le gaz commercial qui se vend déjà plus cher que le gaz ménager, ses dépenses restent les mêmes. «Nous ne pouvons actuellement pas augmenter le prix de nos produits. Un bol de mines se vend à Rs 55 ou Rs 65, et nous ne pouvons réclamer plus car cela va faire fuir les clients.» Il ajoute que les ventes sont déjà en baisse. «Avant, les gens pouvaient se permettre de se faire plaisir, lorsqu’ils allaient faire leurs courses, par exemple. Zot vini, manz enn ti minn. Mais avec les hausses répétitives, chaque sou compte.»

À Goodlands, les clients apprécient les dholpuri de Pritesh Appadoo. Tout en débattant du prix du gaz. «Mes clients affirment qu’ils y penseront à deux, trois, quatre fois avant d’acheter quoi que ce soit», soutient le jeune homme. Il n’a, pour le moment, pas l’intention de revoir les prix de ses produits à la hausse. «Mais à la longue, on ne sait pas. Surtout si la clientèle boude le produit. Pour rester à flot, on va devoir aviser…»

 

 

«Le gouvernement agit comme l’armée russe et jette des bombes sur la population»

<p><em>&laquo;Je condamne cette augmentation, malgré ce qui se passe sur la scène internationale&raquo;,</em> déclare, d&rsquo;emblée, Jayen Chellum. Pour le secrétaire général de l&rsquo;Association des consommateurs de l&rsquo;île Maurice (ACIM), c&rsquo;est la hausse de trop. Il blâme la Stade Trading Corporation (STC) et le ministère du Commerce pour cette nouvelle escalade des prix.<em> &laquo;La STC est la compagnie la plus opaque en termes d&rsquo;informations données au public, et ce, depuis de nombreuses années. À part le prix de l&rsquo;essence et du diesel, qui est affiché sur son site, le coût du gaz n&rsquo;est jamais affiché. Surtout quand on recherche le prix auquel elle l&rsquo;a acheté.</em>&raquo;</p>

<p>Jayen Chellum revient sur la flambée des prix des carburants, qui ont été revus à la hausse à deux reprises, soit en décembre et en février. &laquo;Le prix de l&rsquo;essence a eu un impact sur l&rsquo;inflation qui peut grimper jusqu&rsquo;à 12 %, selon moi. Comment donc une compagnie d&rsquo;État a pu recommander cette augmentation avec le soutien du ministre pour la Protection des consommateurs dans un tel cas de figure?&raquo; Le président du Front commun des commerçants de l&rsquo;île Maurice, Raj Appadu, s&rsquo;insurge également. &laquo;<em>Le gouvernement agit comme l&rsquo;armée russe, jette des bombes sur la population. Il est sans pitié. D&rsquo;un seul coup, il avale la pension du retraité avec les prix des commodités et des médicaments qui prennent l&rsquo;ascenseur. Sans oublier que le ticket d&rsquo;autobus et le prix de l&rsquo;électricité vont bientôt augmenter.&raquo; </em>Selon lui, certains ministres n&rsquo;ont pas réellement de plan de travail, surtout pour la relance de l&rsquo;économie. <em>&laquo;On doit également s&rsquo;attendre à une cascade de fermetures. Surtout qu&rsquo;à partir du 1er juillet, les propriétaires de bâtiments commerciaux peuvent revoir le prix du loyer. Vous imaginez ce qu&rsquo;il adviendra de certains commerces, qui galèrent déjà&hellip;</em>&raquo; Raj Appadu craint en outre une hausse du fret, d&rsquo;autant plus que certains ports n&rsquo;opèrent pas actuellement, comme ceux de Shanghai, Durban ou encore celui du Sri Lanka. <em>&laquo;La situation est catastrophique</em>&raquo;, conclut-il.</p>