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En Estonie, les alliés de l'Otan affrontent le grand froid

6 février 2022, 14:46

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En Estonie, les alliés de l'Otan affrontent le grand froid

 

Dans un paysage glacé piqué de bouleaux et de conifères, des fantassins émergent d'un blindé et s'enfoncent dans la neige jusqu'aux cuisses pour rallier les bois. L'exercice "Winter Camp", en Estonie, à 100 km de la frontière russe, met les troupes de l'Otan à l'épreuve de conditions hivernales extrêmes.

Prévu de longue date, cet exercice annuel interallié, qui mobilise 1 300 soldats britanniques, français et estoniens prend un relief particulier alors que la Russie a massé plus de 100 000 hommes plus au sud, autour de l'Ukraine, pour protester contre la présence militaire de l'Otan à ses frontières.

«Cette manoeuvre est une opportunité de montrer que nous sommes capables de travailler dans les conditions les plus exigeantes, dans le froid et la forêt. Et prouver que nous pouvons relever tout défi à venir», explique le lieutenant-colonel britannique, Simon Worth, commandant du bataillon franco-britannique déployé dans le cadre de l'Otan en Estonie.

Dans ces étendues blanches à perte de vue, «on se fatigue un peu plus en se déplaçant, avec le poids du gilet pare-balles, de la musette et de l'armement. Tout à l'heure je me suis enfoncé dans la neige de quasiment un mètre, c'est quelque chose», confie le première classe Kibinda, arme à la main dans une clairière tapissée de poudreuse.

Le jeune fantassin fait partie des 300 Français venus prêter main forte pendant un an avec 12 chars Leclerc et 8 VBCI (véhicule blindé de combat d'infanterie) à cette mission de "présence avancée renforcée" dans les pays baltes.

Objectif: réassurer ces trois nations qui se sont affranchies de l'ex-Union soviétique, aujourd'hui particulièrement fébriles face à l'attitude menaçante de Moscou envers l'Ukraine.

«Nous ne sommes pas là pour provoquer les Russes. Notre dispositif est préventif, dissuasif et non agressif», assure le colonel Eric Mauger, numéro un français en Estonie. «Mais nous sommes prêts, et en mesure de tenir en attendant les renforts».

Gel et marécages 

Avec l'exercice otanien "Winter Camp", sous des températures allant jusqu'à -25 degrés, il s'agit d'éprouver la résistance des soldats et des matériels dans des conditions bien plus extrêmes qu'en France ou au Royaume-Uni. Et radicalement différentes de l'environnement semi-désertique dans lequel les militaires français évoluent au Sahel, où ils sont déployés depuis 2013.

 

«Ici, la première difficulté, c'est le terrain: comme vous pouvez le constater la météo est particulièrement rude et le terrain très marécageux, ce qui va nous empêcher de manoeuvrer et où on risque de s'embourber», souligne le capitaine Julien, du 5e régiment de dragons, emmitouflé dans une tenue grand froid.

«Mais cela aguerrit nos troupes qui ont été plutôt habituées ces dernières années à opérer au Mali ou au Niger, donc c'est une plus-value».

Hors des axes existants, point de salut pour les blindés. A quelques centaines de mètres, un imposant char Leclerc gît sur le bas-côté d'une piste enneigée. Les crampons rajoutés sur ses chenilles n'ont pas pu empêcher la sortie de route.

«Le froid maltraite un peu nos véhicules. On doit les maintenir soigneusement pour éviter que les pièces cassent et que les moteurs s'arrêtent», détaille le lieutenant-colonel Nicolas, commandant en second du battlegroup franco-britannique.

Les Estoniens, eux, ont leur rôle à jouer.

«Pour nous, c'est un hiver normal, je dirais. Nous apportons notre expérience, notre soutien sur l'équipement dont ils ont besoin pour se protéger», indique à l'AFP le colonel estonien Andrus Merilo.

 

Sous une tente recouverte d'une bâche de camouflage couleur neige, un soldat britannique prépare du thé.

«Par ce temps, le plus grand danger c'est d'avoir froid aux pieds. Il faut maintenir sa chaleur corporelle si on veut rester opérationnel», explique le caporal Liam, chaussé de bottes montant jusqu'aux genoux. «Quand le froid s'installe en vous, surtout en position statique, les choses commencent à devenir très compliquées. Mais on a appris à s'adapter.»