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Dr Arnon Shahar: «La vaccination des enfants prévient le Syndrome inflammatoire multi-systémique pédiatrique et le Covid long»

5 février 2022, 19:00

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Dr Arnon Shahar: «La vaccination des enfants prévient le Syndrome inflammatoire multi-systémique pédiatrique et le Covid long»

En début d’année, le ministère de la Santé mauricien a dit son intention d’étendre la vaccination contre le Covid-19 aux enfants de cinq à 11 ans. Une information qui a fait tiquer nombre de parents. Le premier pays à avoir vacciné sa population contre le Covid-19, en novembre 2020, a été Israël. C’est aussi le deuxième pays, après les Etats-Unis, à l’avoir administré aux enfants de cinq à 11 ans dès novembre 2021. Vu que ce pays a du recul en matière de vaccination, l’express a sollicité le Dr Arnon Shahar, membre du groupe d’experts sur le Covid-19 en Israël et responsable du groupe de travail sur le Covid-19 au Maccabi Healthcare Services, deuxième plus important service de santé étatique d’Israël, pour un bilan de la vaccination chez les adultes et les enfants. 

Dr Shahar, comment traitez-vous les adhérents du Maccabi Healthcare Services, qui sont positifs au Covid-19 ?
Le Maccabi Healthcare Services est le deuxième plus important service de santé étatique en Israël avec ses trois millions d’adhérents. Nous avons quatre services au total dans le pays. Comme dans d’autres parties du monde, dès mars 2020, nous avons connu une période très mouvementée avec l’éclatement de la pandémie de Covid-19. Nous avons commencé à zéro car nous ne savions rien du nouveau coronavirus. J’ai fait partie de l’équipe qui s’est constituée pour traiter les cas positifs et peu après, j’en ai pris la direction. Nous avons créé une banque de médecins. Cela a commencé avec un, puis deux, puis trois et le nombre de médecins a grossi. Nous travaillons désormais avec un millier de médecins communautaires, des internistes, des chirurgiens, des pédiatres, etc. 

Si une personne m’avait dit, il y a trois ans, que l’équipe de médecins aurait consulté et fait le suivi de personnes positives au Covid-19 en isolement à la maison par téléphone mobile ou appel vidéo, j’aurais dit que c’est impossible. Or, au milieu de la quatrième vague de Covid-19, nous l’avons expérimenté, faisant admettre à la maison en simultané 20 000 personnes positives au Covid-19 et dont la maladie était de légère à modérée et nous les avons suivies à distance.  

Il n’y a pas eu de consultation directe ?
Durant la première vague, nous avons fait admettre énormément de personnes à l’hôpital, principalement parce que nous avions peur et que nous ne savions pas, par exemple, combien de temps isoler les malades, comment les traiter, combien de temps attendre pour que le PCR devienne négatif. La mise en place du système de PCR a pris du temps aussi. Nous ne savions pas que nous pouvions, comme aujourd’hui, réaliser jusqu’à 100 000 PCR par jour. Au début, nous en faisions une centaine. Mais au fur et à mesure que l’expérience et la connaissance du Covid-19 sont arrivées, nous avons mis en place le système de consultation à distance et jusqu’ici, nous avons traité et suivi à distance 400 000 adhérents du Maccabi Healthcare Services, positives au Covid-19. Si avec les premiers variants, nous consultions et traitions 20 000 malades à distance par jour, avec l’Omicron, nous le faisons à distance pour 75 000 personnes par jour.

Vous êtes le premier pays à avoir démarré la vaccination contre le Covid-19. Comment cela s’est passé ?
La rumeur a commencé à se répandre qu’un vaccin serait prêt à la fin de 2020. A la mi-novembre 2020, nous étions prêts à démarrer la vaccination. Au début, il était question que l’armée ou l’Etat donne un coup de main pour administrer les vaccins. Je n’étais pas en faveur de cela car j’estimais que c’était aux Health Medical Organizations comme la nôtre de le faire car c’était notre personnel qui traitait quotidiennement les patients positifs. Et je savais que médicalement, logistiquement et d’un point de vue d’accueil du public, nous pouvions mieux gérer le programme de vaccination. Nous avons obtenu gain de cause. Le 20 décembre 2020, nous avons donc démarré la vaccination, en commençant par les plus de 60 ans. Quand le gouvernement a réalisé à quel point le système fonctionnait bien et que nous étions efficaces, le programme a été étendu aux plus de 50 ans. 

Si au début de la première vague, aucun enfant n’était affecté par le Covid-19, dès la troisième vague, beaucoup d’enfants l’ont été. La maladie était légère à modérée chez eux mais un petit pourcentage d’entre eux nécessitait tout de même une hospitalisation. De ce fait, dès janvier 2021, nous avons commencé à vacciner les 16 à 18 ans et leurs enseignants car nous voulions qu’ils puissent recommencer à aller à l’école. Et dès que nous avons commencé la vaccination des enfants, le nouveau coronavirus est devenu une maladie évitable car avec la vaccination, nous la rendions asymptomatique. 

Au fur et à mesure, nous avons établi nos priorités jusqu’à ce que la vaccination soit ouverte à tous les Israéliens. Nous avons terminé le programme en mars 2021. Au début, nous étions très efficaces et notre programme était un succès mais nous n’avons pas réussi à vacciner tous ceux qui auraient dû l’être car petit à petit – et c’est une tendance mondiale – nous avons dû lutter contre les Fake news et les mouvements anti-vax, qui ont influencé les gens. Par la suite, nous avons hélas vu les résultats sur les non-vaccinés. 

Combien d’Israéliens adultes et combien d’enfants ont été vaccinés jusqu’ici ?
Sur une population d’environ 10 millions de personnes, 6,7 millions d’adultes ont reçu leur première injection, 6 millions leur deuxième injection et 4,5 millions ont pris leur booster dose. Jusqu’à présent, 650 000 personnes ont pris leur quatrième dose. Et 460 000 enfants de 16 à 18 ans ont reçu leurs deux injections et 360 000 parmi les 12 à 15 ans l’ont reçue aussi. Chez les cinq à 12 ans, ils sont 200 000 jusqu’ici à avoir reçu leur injection. 

«Un enfant sur huit dans la tranche d’âge de sept à 11-12 ans, hospitalisé avec le Covid-19, a ressenti des migraines, de la fatigue, a vécu une chute de cheveux, un manque de concentration, l’essoufflement et cela, même chez ceux qui étaient les plus athlétiques.»

Pas de décès ou d’effets secondaires chez les adultes ?
Non, aucun décès lié à la vaccination. Nous avons vu des réactions locales surtout. C’était plus apparent après les deux premières doses mais je crois que c’était le début de la vaccination et les gens le signalaient davantage. Nous avons mis en place deux systèmes d’alertes par rapport aux effets secondaires – les gens nous le signalent ou nous les appelons. Au Maccabi Healthcare Services, nous allons jusqu’à faciliter la vie des médecins. Lorsque quelqu’un se présente à la consultation d’un médecin de notre banque ou lui fait savoir par texto, appel ou vidéo, qu’il souffre de fièvre ou de diarrhée, le médecin l’indique sur son ordinateur et immédiatement, un message s’affiche et demande si c’est lié à la vaccination contre le Covid-19. Si la réponse est oui, elle entre directement dans le système et nous rapporte l’effet secondaire, ainsi qu’au ministère de la Santé. 

Nous avons surtout noté des réactions locales, une rougeur sur le site de l’injection avec les trois vaccins que nous avons administrés depuis le début de la pandémie (Pfizer, AstraZeneca et Moderna). Nous avons aussi noté un phénomène général de fatigue, de fièvre, de maux de tête, de douleurs abdominales. Il y a eu quelques cas d’engourdissement facial, surtout au niveau des lèvres. C’est un effet neurologique, qui s’est surtout manifesté après la première injection mais nous ne l’avons pas revu avec les autres doses. Il y a eu des réactions allergiques comme des éruptions cutanées et des démangeaisons. Mais à l’administration de la quatrième dose, nous n’avons rien vu d’inquiétant. Je crois que les gens sont habitués aux effets secondaires et les signalent moins. C’est surtout la tranche d’âge de 30 à 50 ans, qui les rapporte. 

Pas de décès et d’effets secondaires chez les cinq à 11 ans après la vaccination ?
Non. S’il y avait eu un décès, nous aurions interrompu le programme et fait des recherches. Dans ce groupe d’âge, on a surtout vu la fatigue, de la fièvre et des maux de tête mais majoritairement, c’était une douleur et une rougeur sur le site de l’injection. Il faut être conscient de l’importance de la vaccination. Même s’il y a des Fake news sur les réseaux sociaux, il y a une grande différence entre les informations qu’ils véhiculent et la réalité.

Pas de mortalité ou d’effets secondaires chez les adolescents après la vaccination ?
Absolument pas. Au début, après la vaccination, chez les garçons de 16 à 19 ans, nous avons noté un signe que nous avons rapporté à Pfizer, à la Food and Drug Administration (FDA) et à l’Organisation mondiale de la santé et c’est une myocardite, soit l’inflammation des parois du cœur. Cela concerne un cas sur 120 000 ados dans cette tranche d’âge. Tous les cas de myocardite que nous avons vus au sein de cette population spécifique en Israël étaient des cas légers et cette complication n’interférait pas avec les fonctions cardiaques. Nous avons partagé l’information car nous considérons que c’est notre devoir d’être transparents avec les Israéliens et les peuples du monde entier. Or, nous avons aussi noté que les garçons dans cette tranche d’âge, qui étaient non vaccinés et qui avaient contracté le Covid-19, présentaient souvent une myocardite sévère. Cela touchait un ado sur 3 000. La FDA et le ministère de la Santé israélien ont alors calculé les risques pour les 16 à 19 ans de souffrir d’une myocardite sévère après une infection au Covid-19 et sans vaccination et les risques de souffrir d’une myocardite légère après vaccination et ils ont estimé que les avantages de la vaccination l’emportaient sur les risques. 

Avez-vous des enfants ?
J’en ai trois et ils ont huit, dix et 14 ans. Deux d’entre eux ont eu le Covid-19 il y a un an et en ont été guéris. L’aîné a reçu ses trois injections. Un autre a reçu sa première injection et le second la recevra prochainement. Mon épouse, qui est médecin interniste, et moi avons reçu notre quatrième dose il y a trois semaines. Dieu merci, je n’ai pas eu le Covid-19. Mais je n’en suis pas à l’abri. Certaines personnes disent que la vaccination ne sert à rien car les vaccinés contractent le Covid-19 aussi. C’est vrai que la première raison de la vaccination est de prévenir la maladie mais la raison majeure de la vaccination contre le Covid-19 est de prévenir une infection sévère et vous empêcher d’être hospitalisé et de mourir. 

Nous avons noté les deux premiers mois après la vaccination que celle-ci réduisait très efficacement la transmission du virus. Nous pensions que ses effets allaient durer au moins six mois mais nous avons vite réalisé que l’effet protecteur baissait au bout de quatre mois, d’où l’introduction de la troisième injection et de la quatrième dose. Il y a des personnes qui disent que les vaccins sont inefficaces car il faut ensuite recourir aux booster doses. Or, si une personne vaccinée est positive, qu’elle s’isole à la maison et est asymptomatique ou légèrement malade, je considère que c’est une réussite. Si un de mes patients, qui avait reçu une greffe du poumon, contractait le Covid-19 avant le début du programme de vaccination, il serait mort à coup sûr. D’ailleurs, avant que le programme de vaccination ne démarre en Israël, la plupart des patients qui ont eu une transplantation de poumon et qui ont été testés positifs au Covid-19 par la suite, en sont morts. Un de mes patients transplanté, qui s’est fait vacciner mais qui a contracté le Covid-19, était furieux de devoir rester à la maison plus longtemps que les autres personnes car il est immunodéprimé. Mais avec le temps, il a réalisé que bien qu’il ait contracté le Covid-19, il n’a pas été gravement malade et n’en est pas mort. 

Que diriez-vous aux parents, qui ont des enfants de cinq à 11 ans et qui craignent la vaccination pour eux ?
Nous n’avons pas suffisamment de recul par rapport à l’Omicron mais avec les précédents variants, nous avons vu que des enfants non vaccinés ayant contracté le Covid-19 pouvaient être légèrement à modérément malades. Un enfant sur 17 non vacciné et hospitalisé avec le Covid-19 était sévèrement malade. Et chez eux, nous avons remarqué, quelques semaines après la contamination, l’apparition du Syndrome Inflammatoire Multi-systémique pédiatrique (MISC), (NdlR : de la fièvre pendant plus de trois jours, des éruptions cutanées, un état de choc et une myocardite ou péricardite). Et même quand l’infection était légère, nous avons vu ce MISC. Jusqu’ici en Israël, nous avons eu 220 cas de MISC chez les enfants non vaccinés dont deux ou trois résultaient de l’infection à l’Omicron. Le MISC met la vie de l’enfant en danger. Chez les enfants vaccinés, nous n’avons pas aucun cas de MISC. 

Ensuite, nous avons remarqué les effets du Covid long chez les enfants positifs et non vaccinés. Un enfant sur huit dans la tranche d’âge de sept à 11-12 ans, hospitalisé avec le Covid-19, a ressenti des migraines, de la fatigue, a vécu une chute de cheveux, un manque de concentration, l’essoufflement et cela, même chez ceux qui étaient les plus athlétiques. C’est surtout les filles qui en ont été affectées. Leur nombre est sous-rapporté pour trois raisons : ces symptômes apparaissent deux à trois mois après l’infection au Covid-19 et les enfants ne savent pas comment l’interpréter. Ils pensent qu’il s’agit d’une phase. Les parents ne comprennent pas ces symptômes mais ne les associent pas au Covid-19. Et puis, il y a aussi des médecins, qui ne connaissent pas ces signes car la maladie est nouvelle. Il n’y a pas de manuel à ce sujet. 

Il faut éviter ces complications issues du Covid-19. Sans compter maintenant les effets psychologiques des écoles fermées et des cours en ligne sur les enfants. La semaine dernière (NdlR : dernière semaine de janvier), nous avons décidé de rouvrir les écoles et seuls les enfants testés positifs ou exposés restent à la maison et sont testés deux fois la semaine. Les autres reprennent l’école en présentiel. Depuis la quatrième vague de Covid-19, nous essayons le plus possible de garder ouverts les marchés, les supermarchés, les écoles, etc. avec un minimum de restrictions. 

Je dirai donc aux parents qu’après avoir vu les effets de la vaccination à l’échelle mondiale et en Israël, je préfère protéger mes enfants car ils en ont besoin. Je leur recommanderai la vaccination car elle protège contre les formes graves de la maladie. Un petit pourcentage en souffrira sévèrement, malheureusement, mais si on peut prévenir la maladie chez la majorité c’est essentiel. Et puis, nous voulons que nos enfants reprennent leur routine et retrouvent la vie normale qu’ils méritent. Si vous me parlez des effets secondaires du vaccin chez eux, je vous dirai que je les connais et que j’ai vu qu’ils sont bénins et minimes eu égard aux effets de la maladie elle-même sur eux. 

Des trois vaccins administrés en Israël, lequel préférez-vous pour son efficacité ?
Ce n’est pas une question de préférence, même s’il y a un débat sur le sujet en Israël actuellement. Nous avons commencé avec Pfizer et quand ce laboratoire a réalisé que nous pouvions servir d’exemple au reste du monde, nous avons disséminé nos informations et plusieurs pays se sont alignés sur nous. C’est très important pour moi de partager nos statistiques, nos connaissances, notre expérience, nos systèmes, pas parce que nous sommes plus intelligents mais parce que nous avons contracté le Covid-19, que nous sommes les premiers à avoir testé la vaccination et que nous nous en sommes bien tirés. Si le gouvernement mauricien voit comment nous avons procédé, comment les Italiens, les Espagnols, les Anglais ont fait et qu’ils peuvent, de tout cela, déduire ce qui est mieux pour les Mauriciens, c’est le plus important. Chaque pays peut s’inspirer de l’expérience de l’autre, comprendre ce qui a été fait mais envisager ce qui est mieux pour sa population. 

Devrons-nous être vaccinés tous les quatre mois ?
Je ne le crois pas. Cela s’est passé ainsi en Israël car nous étions submergés par des vagues de variants mais je crois qu’Omicron va changer la donne. Si vous m’aviez dit, il y a trois mois, que vous deviez avoir un vaccin tous les six mois, je n’aurais pas trouvé ça déraisonnable. Mais je crois que l’Omicron, qui se répand beaucoup plus vite et qui est sept à huit fois moins violent que les variants précédents, va changer les règles et modifier notre façon de penser et notre théorie de la vaccination. Mais avant d’avoir réussi à mieux cerner l’Omicron, notre priorité était de faire la quatrième injection et de protéger notre population fragile contre l’infection, l’hospitalisation et la mort. Maintenant que nous sommes dans la cinquième vague, nous avons réalisé que la quatrième injection fonctionne contre l’Omicron. Elle protège les vaccinés deux fois plus contre sa transmission et trois fois plus contre la maladie grave.
 
En novembre dernier, les Italiens ont voulu savoir de moi combien de fois je vaccinerais la population israélienne. J’ai dit que je le ferai à chaque fois que je pense que je sauverais plus de vies que je n’en perdrais. C’est notre objectif. Bien sûr, nous devrons tenir compte des anticorps, de ceux neutralisants, de l’immunité complète et des éventuels dégâts immunologiques et pas voir uniquement les effets secondaires mais le bien que la vaccination apporte aussi. Jusqu’ici, elle a été très efficace et sans vouloir minimiser ses effets, je crois que nous avons sauvé 20 000 vies d’Israéliens depuis le début de la vaccination. Je ne connais aucun médicament qui ait sauvé autant de vies en si peu de temps. 

Depuis un an, le gouvernement israélien a accepté de traiter les gens positifs au Covid-19 à la maison. Excepté pour ceux nécessitant l’oxygénation, l’intubation, des perfusions sanguines et du plasma, tous les autres malades du Covid-19 sont vus par des médecins à la maison. Avec l’Omicron, les cas sont légers à modérés et nous avons plusieurs médicaments antirétroviraux comme le Paxlovid et le Molnupiravir que nous administrons à la maison aux malades. Nous avons dû recruter beaucoup de médecins et du personnel médical supplémentaire pour cela mais je crois que le futur est là. Nous arriverons à un point où nous soignerons de mieux en mieux le Covid-19, qui deviendra comme une grippe. 

Vu la contagiosité de l’Omicron, pensez-vous que tout le monde le contractera ?
Oui, une personne sur deux y sera exposée et sera positive à l’Omicron. Mais ce que nous pouvons faire c’est prévenir la maladie, l’hospitalisation et la mort. Voir l’hospitalisation d’une personne, la voir intubée et placée sous respirateur artificiel me fend le cœur car ce scénario catastrophique est évitable. En tant que médecin, mon rôle est de sauver des vies. Voir quelqu’un mourir alors qu’il a un vaccin à portée de main mais ne l’a pas fait me désole. 

Pensez-vous que l’Omicron ramènera la pandémie à l’état d’épidémie ?
Au cours d’un entretien en novembre dernier en Italie, on m’a demandé quand je prévoyais la fin du Covid-19. Même si je n’aime pas faire des prévisions, je me suis laissé aller à le faire et j’ai dit que nous en verrions la fin en mai-juin 2022 lorsque suffisamment de personnes dans une population seraient vaccinées et que nous pourrions protéger les personnes les plus fragiles. Penser qu’avec l’Omicron, la pandémie deviendra épidémie est un vœu pieux. Je le souhaite. Mais je crois que nous devons rester sur nos gardes et être moins arrogants car la pandémie nous a donné des leçons au quotidien durant ces deux dernières années. S’il n’y a pas de variants plus infiltrants dans les mois à venir, je crois que nous pourrons reprendre le cours de nos vies dans quelques mois. Mais je crois que nous devrons tout de même continuer à porter des masques pour encore longtemps. Je crois que nous allons devoir apprendre à vivre avec le Covid-19. 

Pourrons-nous le vaincre un jour ?
Ce n’est pas notre rôle de le vaincre. Le virus nous combat plus que nous le combattons. Il nous montre que la victoire n’est pas à portée de main mais qu’apprendre à vivre avec lui l’est. Le virus partira quand il le voudra. Maintenant, si par le vaincre, vous pensiez à un retour à la vie normale, je dirai oui que c’est possible mais l’éradiquer de la Terre n’est pas notre objectif. Ce que nous pouvons décider c’est de nous protéger suffisamment pour cohabiter avec lui et protéger nos populations les plus vulnérables.