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Portrait │ Anthony Leung Shing: «Covid oblige, le déficit et la dette publique ont plongé…»

31 décembre 2021, 12:30

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Portrait │ Anthony Leung Shing: «Covid oblige, le déficit et la dette publique ont plongé…»

Le patron de PwC, un des Big Four, n’a pas sa langue dans sa poche. Successeur d’André Bonieux à la tête du cabinet d’audit en 2018, il est connu pour son franc-parler, loin des propos complaisants de certains de ses confrères. Économiste, formé à l’université de Manchester et ex-expert-comptable à PKF de Londres, ses commentaires économiques sont souvent dérangeants face à l’establishment de l’Hôtel du gouvernement. 

À l’aube de 2022, Anthony Leung Shing jette un regard froid sur la gestion sanitaire et économique du pays. S’il est difficile d’exercer un benchmark sur la manière dont le pays a géré la crise du Covid-19, son bilan de cette gestion est nuancé. «Certaines mesures ont fonctionné, d’autres non.» 

Or, même s’il reconnaît que la situation était difficile, vu que les connaissances sur la pandémie étaient limitées au moment de la prise des décisions, le senior country partner trouve que «dans l’ensemble, même si les cas de Covid ont pris l’ascenseur ces dernières semaines, le pays a enregistré un faible taux de cas et de décès en proportion de la population comparé à d’autres pays à travers le monde». D’autant plus, dit-il, qu’il a fallu gérer les différentes vagues du virus, les dégâts sociaux et sanitaires et les implications éducatives. 

Reste cependant la campagne de vaccination avec l’avènement des premiers vaccins au début de 2021. Le no1 de PwC note que l’objectif du gouvernement a été d’inoculer 60 % de la population pour atteindre le plus rapidement possible l’immunité collective. «Je pense qu’il était important de le faire pour assurer une reprise de l’activité économique et procéder à l’ouverture des frontières. Aujourd’hui, avec les nouveaux variants qui déferlent en Europe et ailleurs, avec une présence dans le pays, la question de l’échappement immunitaire et de l’efficacité des vaccins disponibles se posent avec acuité.» 

Préserver le lien social… 

Face à ces problématiques, même si les premières données scientifiques suggèrent que les vaccins sont moins efficaces contre les variants, Anthony Leung Shing plaide en faveur d’une troisième dose de vaccin permettant aux anticorps de regagner une capacité de neutralisation du virus plus importante. À cet effet, il est convaincu que les programmes de vaccination devront continuer. «À mon avis, vaccination, mesures sanitaires et distanciation physique font tous partie d’un ensemble pour lutter contre le virus avec lequel il faudra apprendre à vivre.» 

Il va sans dire que l’impact économique de la crise sanitaire sera financièrement lourd avec des conséquences sur les finances publiques. Anthony Leung Shing note déjà une détérioration du déficit budgétaire et de la dette publique, vu que la priorité gouvernementale a été de soutenir les entreprises et l’emploi. «Beaucoup dépendra de l’évolution du virus et d’une reprise économique mondiale.» 

Même si les nouveaux variants du coronavirus accentuent l’incertitude économique, l’expert-comptable estime que les pays à l’échelle mondiale sont aujourd’hui mieux armés pour faire face aux nouvelles vagues de contamination. D’ailleurs, les économistes prévoient que la reprise économique continuera en 2022 malgré la situation fragile alors qu’à Maurice, l’expérience a prouvé que le taux d’activité d’un secteur peut évoluer dans un sens comme dans l’autre et très rapidement. «Juste avant que le pays ne soit mis sur la liste ‘rouge écarlate’, les opérateurs du secteur du tourisme prévoyaient une croissance pré-Covid. Ce qui n’a pas été le cas car tout a basculé par la suite.» Il s’appuie sur l’avis des spécialistes pour rappeler que le variant Omicron est plus contagieux, mais moins dangereux. D’où l’urgence de rester vigilant tout en étant optimiste ! «N’oublions pas que le pays est aussi sorti de la liste noire de l’Union européenne et cela aura un effet positif sur le secteur financier.» 

Pour autant, la crise sanitaire a entraîné dans son sillage le télétravail qui s’est imposé dans les entreprises. Anthony Leung Shing vit ce phénomène au quotidien. «Il est devenu la norme avec beaucoup d’entreprises évoluant sur un format hybride pour combiner le travail en distanciel et en présentiel.» Cependant, même si les entreprises sont maintenant bien équipées pour travailler en mode hybride, le plus grand défi reste le maintien de la culture d’entreprise et du lien entre les collègues. «Les entreprises devront repenser la manière dont leur culture se diffuse et se concrétise au quotidien. Il faut que chaque employé sente qu’il appartient pleinement à sa société et, pour cela, les méthodes de travail et la culture d’entreprise sont appelées à évoluer.» 

Du pain sur la planche pour les directeurs de ressources humaines qui doivent intégrer ces nouvelles responsabilités dans la gestion hybride de leur organisation. Avec toutefois un défi majeur, selon l’économiste et expert-comptable : préserver le lien social entre les collaborateurs, tenir compte de l’intrication croissante entre vie privée et vie professionnelle, et renforcer leur motivation et leur engagement dans l’entreprise.

 

Bio-data

<p>Après des études secondaires au collège St Joseph, Anthony Leung Shing a étudié l&rsquo;économie à l&rsquo;université de Manchester pour ensuite commencer sa carrière professionnelle d&rsquo;expert-comptable chez PKF Grande-Bretagne comme stagiaire. Après dix ans passés chez PKF, ayant gravi les échelons en assumant diverses fonctions jusqu&rsquo;au poste de directeur associé, il a rejoint PwC Maurice en 2009. Depuis son arrivée, il a dirigé le pôle fiscal de PwC Maurice et en 2011, il a été admis comme associé. En 2018, il est nommé senior partner de PwC Maurice et siège aussi sur le conseil de gouvernance de PwC Afrique.</p>