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Covid-19: les centres de santé sens dessus dessous

9 novembre 2021, 21:00

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Covid-19: les centres de santé sens dessus dessous

Plusieurs «flu clinics» et hôpitaux régionaux sont pris d’assaut par des personnes positives au Covid-19 après un test antigénique rapide ou d’autres qui ressentent des symptômes du virus. Ils témoignent…

«Je fais malheureusement partie de ceux qui ont fait la queue les vendredi 5 et dimanche 7 novembre à l’hôpital Victoria de Candos pour me faire tester. Vendredi soir, j’ai fait la queue de 21 h 30 à 23 h 45 pour me faire tester. Dimanche, j’y étais de 14 heures à 17 h 30. J’étais dans une file avec une centaine de personnes à chaque fois et la plupart d’entre elles étaient des cas de Covid positifs», explique Krish, un jeune homme. Il ajoute avoir pu constater le stress sur le visage des infirmiers dans le Covid-19 Testing Centre. «Ils avaient l’air fatigués, dépassés, mais faisaient toujours de leur mieux avec ce qu’ils avaient.» La meilleure option, selon lui, aurait été de décentraliser les tests vers des centres communautaires des villages/villes.

De son côté, Zoël explique sa mésaventure à l’hôpital de Candos toujours. Il y était samedi car son père avait été testé positif au virus. «Sur place, des membres du personnel nous ont fait comprendre qu’il n’est pas nécessaire de venir faire le test si un membre de la famille est positif.» Il suffit de s’isoler et de prendre du paracétamol qu’il pouvait aller chercher à la pharmacie de l’hôpital. Le plus grave, selon ce dernier, c’est que tous, patients positifs et négatifs, étaient mélangés dans la salle d’attente et qu’il n’y avait aucune coordination. Selon d’autres témoignages, «ou pli malad kan ou rant laba». Des gens sont dans des situations graves, il s’agit de personnes âgées, des enfants qui toussent, qui vont mal. Difficile de ne pas attraper le virus si vous êtes négatif. Par exemple, si vous accompagnez une personne qui nécessite une assistance. «De plus, on vous met dans une grosse foule sans sanitizer. Il y a même ceux qui ne portent pas le masque convenablement.»

À la flu clinic de l’hôpital de Flacq, ceux qui y étaient vendredi sou- tiennent que plus de 100 personnes s’étaient massées dans la salle et attendaient d’être auscultées par un médecin. «Il y a des personnes qui ont attendu plus de quatre heures. Il y en a même qui ont perdu connaissance car elles étaient tellement malades.» Le pire, c’est que les soignants ont pris leur pause déjeuner sans se soucier de la santé des gens sur place. «Nous sommes d’accord qu’ils sont aussi des humains, mais il fallait un système de rotation dans le fonctionnement de ces flu clinics.»

Mauvaise image

À l’hôpital Jeetoo, soutient le député Patrice Armance, le personnel hospitalier est effectivement dépassé par le nombre de cas qui ne cesse d’augmenter. «Des personnes qui sont venues se faire tester et celles qui y sont pour leur traitement sont laissées pour compte. Certaines sont laissées dans les couloirs pendant des heures, sur une civière. Cela démoralise ces patients et donne une très mauvaise image de nos services de santé.» La solution serait de pallier ce manque de personnel, selon Patrice Armance, mais aussi de les encadrer.

Kristabella déplore, elle, le manque de professionnalisme dans ce même hôpital. «La semaine dernière mon époux avait tous les symptômes du Covid. Mercredi soir nous sommes partis à la flu clinic à l’hôpital Jeetoo et il a bien précisé qu’il avait eu des contacts avec des personnes positives une semaine plutôt et qu’il est asthmatique, le personnel a refusé de lui faire un test sous prétexte qu’il faut avoir 40+ de fièvre pour cela. Le lendemain il était encore plus mal que la veille. On a alors dû prendre un test à la pharmacie.»

Xavier Duval : «Choqué et alarmé par la situation»

Les membres de l’entente de l’Espoir se sont réunis hier pour passer en revue la situation sanitaire dans le pays. Après la rencontre, Xavier Duval, leader de l’opposition, a fait savoir que la situation dans le pays est grave. «Nous sommes choqués par l’inaction du gouvernement et alarmés par l’augmentation des cas», a-t-il déclaré. Avec le nombre de transmissions qui grimpe, le nombre de morts augmente aussi. «Toutes les tranches d’âges sont concernées. On va vers la saturation des hôpitaux et un débordement du système», a déclaré Xavier Duval. Dans la foulée, il a fait savoir qu’il s’attend à ce que les autorités fassent d’urgence des propositions pour réduire la contamination.

Un appel à l’esprit civique des citoyens lancé par des syndicalistes

Alors que le pays semble être de nouveau plongé dans une nouvelle vague dévastatrice du Covid-19, le corps médical commence à s’essouffler. Le manque de personnel se fait ressentir. Même si, pour l’heure, dans certains milieux, l’on arrive à gérer la situation. Mais pour encore combien de temps ?

Justement, Amarjeet Seetohul, président de la Ministry of Health Employees Union (MHEU), demande aux Mauriciens de se ressaisir. «La situation va empirer si la population n’assume pas ses responsabilités.» Comme le soutient ce dernier, des consignes ont été données à maintes reprises. «On a parlé de la distanciation physique, de l’utilisation du sanitizer, de porter le masque correctement. Le peuple a tous ces atouts en sa possession. Et s’il ne s’en sert pas comme il faut, alors cela va déboucher sur une situation de débordement.»

Pour le président de la MHEU, l’on ne peut pas tout mettre sur le dos des officiers de la santé. «On ne pas peut dire à chaque fois que le système n’est pas bon. S’il y a des manquements, je serai le premier à venir le dénoncer mais actuellement, c’est à la population de prendre les actions qu’il faut. Au sein des hôpitaux, la situation est encore gérable.» Toutefois, ce dernier ne peut s’empêcher de demander au ministère de la Santé de revoir sa copie sur l’emploi de health care assistants car ces derniers, avec des cours adaptés, peuvent prêter main forte surtout dans la situation actuelle.

Mais pour le président de la Nurses Union, Nasser Essa, la donne est différente. Selon lui, la situation est devenue chaotique dans les hôpitaux. Il s’explique. «Nous faisons face à un problème car les infirmiers sont aussi testés positifs au Covid-19. Actuellement à l’hôpital Jeetoo, du côté des infirmiers, l’on se retrouve sans 20 membres du personnel. En effet, 16 ont attrapé le Covid et quatre autres ont eu un contact direct avec un proche qui en est atteint. Je ne sais pas du côté des infirmières combien manquent aussi à l’appel. En sus de cela, du personnel est enrôlé à l’aéroport et d’autres sont affectés à l’hôpital ENT.» Cette situation pourrait même empirer avec les congés que les employés demandent à prendre avant la fin de l’année.

Pour Nasser Essa, la peur s’est aussi installée au sein du personnel. «Le personnel travaille avec une certaine appréhension. Cela nous fait faire un bond dans le passé comme c’était le cas l’année dernière.» Il soutient qu’avec le manque de staff, quelquefois les infirmiers se retrouvent à gérer une salle. «Ce n’est pas facile car dans cette situation l’on ne peut se donner à 100 %, mais je sais que tous font leur maximum pour prodiguer les meilleurs soins.»

Au niveau du ministère de la Santé, l’on est conscient que beaucoup de patients se rendent dans les hôpitaux régionaux. «D’où la création de salles additionnelles. On place les personnes dans les isolation wards en attendant d’avoir leur résultat. Et dépendant de ce dernier, on les place dans les salles adaptées.» En revanche, notre interlocuteur confie qu’il est demandé à plusieurs personnes de rentrer chez elles pour s’auto-isoler. «On constate que leur état n’est pas grave. D’autres personnes sont par la suite admises dans les hôpitaux et si leur état inspire des inquiétudes, elles sont envoyées à ENT.» Ce dernier tient à préciser qu’il y a de la place à l’hôpital de Vacoas. «Même dans les hôpitaux, les gens ne restent pas beaucoup de jours. Une fois qu’ils se portent mieux, ils partent.»

Certes, il sait qu’actuellement, il y a beaucoup de travail, mais cela ne veut pas dire que les hôpitaux sont débordés. «Le ministère a recruté du personnel pour pallier le manque.» Il confie que des visites surprises sont même effectuées dans les hôpitaux par le ministre et les directeurs pour vérifier si les protocoles sont respectés et si le travail est bien fait.