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Covid-19 - Onzième décès: pourquoi avoir mis les patients négatifs en quarantaine ?

23 avril 2021, 12:00

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Covid-19 - Onzième décès: pourquoi avoir mis les patients négatifs en quarantaine ?

Des infirmiers, des proches de patients décédés, des patients toujours en quarantaine et des malades expriment leur colère. Après le 10e décès, le ministre Jagutpal a refusé une enquête et il est toujours dans le déni : pour lui, seuls six patients sont morts du Covid-19. Au-delà du débat «Covid ou pas Covid ?», il semble évident que des dialysés ne seraient pas morts s’ils n’avaient pas été mis en quarantaine en premier lieu. Kailesh Jagutpal a défendu son choix au Parlement, mardi, «pour protéger la communauté et la famille».

«Pour empêcher une possible contamination, on envoie donc les dialysés à l’abattoir», rétorque Kishna Ramsamy, l’époux de Sarojini Ramsamy, la 11e victime. «Un abattoir où le sacrifié n’est même pas nourri convenablement», ajoute-t-il.

Pour le Dr Vasantrao Gajadhur, le virus du Covid tue surtout les personnes vulnérables. Mais comment devient-on vulnérable ? «Quand on souffre d’une maladie nécessitant une dialyse, par exemple, si de surcroît l’on n’est pas nourri convenablement et l’on est isolé des siens, eh bien, c’est la recette idéale pour que le virus emporte le patient.» Il rappelle aussi que les dialysés sont déjà immunodéficitaires. L’ancien directeur de la santé n’est pas contre l’isolement des dialysés mais «qu’ils soient accompagnés», recommande-t-il. Il estime que le stress lié à l’isolement de leurs proches et au manque d’attention a contribué à affaiblir ces patients.

Sarojini Ramsamy racontait à son mari son calvaire au quotidien. Elle avait été testée au quinzième jour de sa quarantaine. «Mais elle se sentait mal au huitième jour déjà. Je me rappelle qu’elle m’avait dit qu’elle avait des palpitations.» Ensuite, explique Kishna Ramsamy, la quinquagénaire avait changé de centre de dialyse, de Souillac à Rose-Belle. «Mé ti éna enn gro mank ékipman laba. Enn swar li finn apel mwa pou dir mwa li pé toufé.» Sarojini devait attendre jusqu’à 22 heures pour sa session de dialyse, mais après l’intervention de son mari, elle n’a fait qu’une heure de dialyse.

Mouroir…

Comme tous les dialysés n’ont pas pu se faire accompagner, notamment pour des raisons financières, certains se seraient donc retrouvés perdus, comme le témoignent les proches d’Avishna Jena, 10e patiente dialysée décédée. Le Dr Gajadhur nous rappelle qu’en France, par exemple, les patients positifs s’isolent chez eux. «On ne vient à l’hôpital que quand c’est bien nécessaire, lorsque le malade commence, par exemple, à éprouver des problèmes respiratoires.»

Or, l’époux de Sarojini Ramsamy décrit comment celle-ci lui disait qu’elle avait des difficultés respiratoires. L’a-t-on mise sous respiration artificielle ? Kishna ne peut le confirmer puisque le contact avec son épouse a été interrompu, les soignants interdisant à Sarojini d’utiliser son portable tout comme ce fut le cas pour Avishna Jena. «La raison était qu’elle avait un problème à la gorge», nous dit Kishna. «Pa finn gagn kontak ek li. Zot ti dir so lagorz ti pé segnié akoz linn tro tousé.»

Les centres de quarantaine et des salles d’hôpital ont-ils été transformés en mouroirs ? La protection de la famille contre une éventuelle contamination justifiait-elle l’envoi des dialysés à une mort certaine dans la souffrance et la solitude ?

Dialyse à 3 heures du matin

<p>Des infirmiers nous signalent un élément troublant. À l&rsquo;hôpital de Rose Belle, les séances de dialyse commencent à 3 heures du matin. <em>&laquo;La nuit est faite pour dormir&raquo;,</em> nous rappelle une infirmière. <em>&laquo;Certains ne ferment pas l&rsquo;œil de toute la nuit sachant qu&rsquo;ils doivent se réveiller à 2 heures.&raquo; </em>Nous avons contacté deux responsables de cet hôpital. Ils disent ne pas être au courant bien que l&rsquo;un d&rsquo;eux reconnaisse que ce soit possible vu le nombre élevé de patients et le besoin de séparer les positifs des négatifs. Tout de même, à 3 heures du mat !</p>