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Coupe de France: à Canet, la «grinta» catalane des bourreaux de l'OM

6 avril 2021, 12:38

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Coupe de France: à Canet, la «grinta» catalane des bourreaux de l'OM

La senyera, drapeau rouge et jaune de la Catalogne, flotte dans un ciel sans nuages au-dessus de l'église en briques Saint-Jacques de Canet-en-Roussillon, tout près du stade des bourreaux de l'OM en Coupe de France, fiers de leur identité et de leur "grinta".

En temps normal, les commerçants de la ville côtière des Pyrénées-Orientales, proche de Perpignan, auraient sans doute paré leurs vitrines des mêmes couleurs pour soutenir leurs "petits" de Nationale 2 avant leur huitième de finale mercredi contre Boulogne-sur-Mer, club de l'échelon supérieur.

Mais les portes des restaurants et des glaciers du front de mer sont tristement closes avec la pandémie et seuls quelques oriflammes municipaux le long de la route entre les plages et le bourg historique marquent l'exploit des amateurs locaux, vainqueurs de Marseille au tour précédent.

Sans le huis clos, Canet n'aurait eu aucun mal à remplir le stade Brutus de Perpignan, où évolue habituellement l'équipe de rugby à XIII des Dragons catalans, qui n'a pas eu à se faire prier pour lui mettre ses installations à disposition, avec l'aide de l'autre club de rugby phare de la région, l'Usap.

L'expression "naturelle", pour le jeune manager des footballeurs canétois Jordi Delclos, d'une "solidarité catalane" indifférente à la forme du ballon: "On peut cohabiter. Dans cette période ultracompliquée, voir notre petite équipe battre l'OM est une bouffée d'oxygène pour tout le département".

Terre de rugby 

Sur ces terres d'ovalie, le club doit aussi faire face au pouvoir d'attraction du FC Barcelone, dont le Camp Nou n'est qu'à un peu plus de deux heures de route.

Si le Canet Roussillon FC n'en partage pas toujours le jeu léché, les joueurs du coin, comme Toufik Ouadoudi, disent puiser dans leur "sang catalan" une "grinta" caractéristique: «On peut rater certains matches techniquement, mais on ne va jamais rien lâcher.»

«Les gens ici aiment le combat et ce sont des valeurs que l'on essaie de transmettre à l'ensemble du groupe», abonde Maxime Ferry, policier municipal quand il ne garde par les cages canétoises.

L'identité catalane du club s'est quelque peu diluée au fil des divisions gravies depuis la DH et des recrues extérieures, mais une poignée de fidèles en sont encore les garants, parmi lesquels Pascal Vié ou Jérémy Posteraro, auteur d'un coup franc splendide contre l'OM en 16e de finale.

«On souhaiterait idéalement, dans les cinq ans à venir, que la moitié de notre effectif soit formé chez nous», se projette Jordi Delclos depuis les bureaux, dont l'un des murs est orné d'un lion rugissant. «Il est important de redonner au club une image locale. C'est une identité forte, la Catalogne. On en est fier.»

Partenariat avec Gérone 

S'appuyer sur le vivier catalan n'a pas toujours été une priorité dans les Pyrénées-Orientales, même à l'âge d'or du Perpignan FC, monté en division 2 dans les années 1990.

«Le club a grandi très rapidement et n'a pas eu le temps de poser les bases d'une vraie formation pour se servir des produits du pays. Quelques jeunes sont passés à travers les mailles du filet», regrette l'ancien milieu défensif perpignanais Jean-Luc Escayol, aujourd'hui recruteur pour Auxerre.

On sent chez lui un peu de nostalgie de "l'ancien football". Celui des «gifles et des coups de pression dans le couloir des vestiaires», mais aussi des "magouilles" qui ont précipité la chute du Perpignan FC, placé en liquidation judiciaire en 1997.

Le Canet RFC en est aujourd'hui l'héritier indirect, après fusion et scission, et des années de "guerre de clochers", soupire Escayol. «On a perdu du temps.»

Dans leur reconstruction, avec l'ambition de retrouver à terme le monde professionnel, en National, les dirigeants canétois regardent de l'autre côté de la frontière toute proche.

Ils ont récemment engagé un partenariat avec un pensionnaire de la deuxième division espagnole, Gérone, l'un des nombreux clubs de haut niveau de Catalogne derrière le FC Barcelone (Espanyol Barcelone, Sabadell, Tarragone...).

«Il s'agira d'échanges au niveau des jeunes et des éducateurs. Gérone a l'expérience de la Liga et cette identité dont on essaie de s'imprégner», détaille le manager Jordi Delclos, un "fanatique" du Barça.

A force d'épopées en Coupe de France, son Canet espère aussi devenir dans le paysage footballistique local "més que un club" ("plus qu'un club"), la devise du voisin barcelonais.