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Virginie Gaspard: «Je suis en colère, j’ai deux mots à dire à Pravind Jugnauth»

18 mars 2021, 13:20

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Virginie Gaspard: «Je suis en colère, j’ai deux mots à dire à Pravind Jugnauth»

Cette ancienne candidate de l’émission The Voice en a gros sur le cœur. C’est en reprenant une chanson de Beyoncé que Virginie Gaspard a voulu interpeller le Premier ministre au sujet des dures réalités et des discriminations subies par certains compatriotes.

Une «spéciale dédicace» au «cher» Premier ministre (PM). Avant que ne résonne la voix soul, puissante et rocailleuse de Virginie Gaspard. «I told you how you hurt me baby, but you don’t care.» Cette vidéo d’une reprise de la chanson I care de Beyoncé, la chanteuse Virginie Gaspard l’a partagée la semaine dernière. S’adressant directement au PM, elle ironise : «Normalman mo pran kas ar dimounn, la mo fer enn lizaz ar ou, la prosenn fwa ou pey mwa.»

En 2018, Virginie Gaspard était finaliste de la première édition du concours de chant Vibe, organisée par MCB Group. Cela lui avait ouvert les portes de l’émission The Voice sur la chaine française TF1, en 2019. Son aventure parisienne s’était arrêtée aux «battles». Par la suite, elle avait animé l’émission Vibe diffusée à la télé nationale.

De Kewal Nagar où elle vit, Virginie Gaspard explique que «pa ti pou mal» si elle avait pu rencontrer, un jour, Pravind Jugnauth. «Je ne suis pas sûre qu’il soit suffisamment au courant des réalités des ti dimounn.» Surtout après l’impact du premier confinement, l’année dernière. «Dimounn inn fini akablé par sa.»

Voilà pourquoi elle estime qu’il fallait une «voix du peuple» pour rappeler au PM le quotidien difficile de nombre de nos compatriotes. «Si on ne se fie qu’aux statistiques ou aux experts, cela n’a rien à voir avec ce qui se passe sur le terrain.»

Quel meilleur moyen pour l’artiste que de pousser son cri du cœur à travers une chanson? En reprenant les paroles qui pleurent l’indifférence face aux souffrances de la chanson de Beyoncé, Virginie Gaspard veut rappeler à quel point «tout le monde est affecté, à part peut-être les 37 % qui ont voté pour lui. Je ne crois pas que c’est toujours à 37 %». La jeune femme assure que si auparavant elle ne s’intéressait pas à la politique, elle est maintenant «estra trakasé par séki pé déroulé isi».

Concrètement, que souhaite-t-elle dire au chef du gouvernement ? Virginie Gaspard précise : «Je n’ai rien contre lui personnellement.» Elle affirme vouloir l’interpeller en ces termes: «Vous dites que vous êtes là pour travailler et que vous faites bien votre travail. Mé ou pa tann nou soufrans. Ou pa trouvé?»

La chanteuse se décrit ainsi : «Je suis une afro-mauricienne. Mo éna dread lor mo latet. Je vis dans une cité. Je suis chanteuse.» Virginie Gaspard clame haut et fort subir des discriminations, dont «le racisme». Si avant le confinement l’an dernier, elle se produisait lors de showcases, «par la suite, c’est devenu compliqué».

Celle qui s’est fait connaître grâce aux émissions télévisées explique que suite à sa participation à The Voice, «zamé mo’nn atann ki gouvernman vinn donn mwa kas». Ses déplacements ont été pris en charge par le MCB Group. «Quand je suis allée m’inscrire comme artiste au ministère des Arts, ils n’étaient pas au courant que j’avais représenté Maurice à The Voice. On m’a demandé de fournir des preuves.»

Comme la musique «pour le moment ne rapporte pas», Virginie Gaspard a été obligée de faire un choix. «Mo’nn oblizé met li dé koté.» Sauf que même en changeant d’orientation, «al rod travay pa gagné paski mo éna dread lor mo latet», témoigne celle qui a étudié jusqu’en Form IV. Elle est loin d’être la seule à subir ces expériences. Au temps des beaux jours, quand elle côtoyait des touristes sur les plages où elle allait se produire, «à notre manière, on faisait la promotion de notre île». L’une des questions qu’elle posait souvent aux touristes c’était «qu’est-ce que vous aimez le plus à Maurice ?» Réponse récurrente : «La culture mauricienne. Le producteur de The Voice l’a dit : il y a tellement de talents ici, mais on n’en fait pas la promotion alors que cela aurait pu enrichir l’économie.» Selon la chanteuse, des touristes lui auraient confié avoir moins envie de revenir. «Pa kapav zot kit zot péi kot éna enn ta batiman pou vinn get batiman ankor dan Moris.»

Virginie Gaspard est aussi une mère de famille. Elle s’interroge sur les critères pour obtenir une aide sociale. «C’est une petite somme et les femmes qui l’obtiennent ne peuvent pas travailler, sinon elles perdent cette aide sociale. Misié la li gagn drwa péna kas pou donn pansion zanfan, selman li kapav al réfer so lavi.» Autant de situations qui font que Virginie Gaspard ne décolère pas.

Si, l’année dernière, elle avait donné un coup de main au sein d’une association, pour aider des gens dans le besoin, «sa lanél a, kom di kozé mo mem mo bizin led. Je ne sais pas ce que deviennent ceux qu’on a soutenus en 2020. Ni comment ils s’en sortent ? Pravind Jugnauth n’est-il pas le PM de chaque citoyen ?»

La chance de Virginie Gaspard : «Mo res pré ar bwa.» À Kewal Nagar, Mère Nature est généreuse. Une rivière coule pas loin. Cela tombe bien. Virginie Gaspard aime la pêche. «Je sais aussi que je peux compter sur des proches.»

Malgré sa voix puissante et son ton décidé, Virginie Gaspard confie avoir peur. «Au-delà de la colère, je suis triste.» Face à la montée du communalisme. «Je me demande ce qui s’est passé ? Est-ce que mes enfants connaîtront l’harmonie que j’ai vécue quand j’avais leur âge ?»

 

«Sintétik péna lockdown»

<p>Virginie Gaspard ne cache pas qu&rsquo;elle est en faveur de la légalisation du cannabis. <em>&laquo;On entend parler des saisies de drogue. Mé sintétik péna lockdown.&raquo;</em> Elle confie que ces substances illicites sont arrivées <em>&laquo;jusqu&rsquo;a Kewal Nagar&raquo;.</em> Celle qui est née à Port-Louis avait toujours <em>voulu &laquo;élever des enfants à la campagne. Mais on a été rattrapé par ces substances. Cela fait peur. Ki pou fer kont sa ? J&rsquo;ai déjà vu de vieux fumeurs de cannabis, mais jamais de vieux drogués&raquo;</em></p>