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Meurtre Khashoggi: un tribunal turc refuse de verser le rapport américain au dossier

4 mars 2021, 16:53

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Meurtre Khashoggi: un tribunal turc refuse de verser le rapport américain au dossier

Un tribunal turc a refusé jeudi de verser au dossier un rapport américain accusant le prince héritier d'Arabie saoudite d'avoir validé l'assassinat de l'opposant Jamal Khashoggi, lors du procès de cette affaire qui a lieu à Istanbul.

Jamal Khashoggi, un ancien proche du pouvoir saoudien dont il était devenu un féroce détracteur, a été assassiné en 2018 au consulat de son pays à Istanbul, un meurtre qui a suscité une onde de choc planétaire.

La semaine dernière, Washington a rendu public un rapport des services de renseignement américains accusant le puissant prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, surnommé "MBS", d'avoir «validé» le meurtre de Khashoggi.

Lors de la troisième audience d'un procès par contumace qui a lieu à Istanbul, la fiancée turque de Khashoggi, Hatice Cengiz, a réclamé le versement de ce rapport au dossier, selon un journaliste de l'AFP.

Mais le président de la cour a rejeté cette requête au motif que le rapport n'«apporterait rien», tout en affirmant que Mme Cengiz pouvait renouveler sa demande auprès du procureur en charge de l'accusation.

Le rapport américain «attribue une responsabilité directe au prince héritier. Par conséquent, nous voulons que cela soit pris en compte par le tribunal», a déclaré Mme Cengiz après l'audience.

Verser le rapport américain au dossier «aurait pu fournir de nouveaux moyens dans la quête de justice, mais on peut dire qu'aujourd'hui le tribunal a adopté une position un peu passive», a regretté le représentant en Turquie de l'ONG Reporters sans frontières (RSF), Erol Onderoglu, présent à l'audience.

«Anormal»

Au total, 26 Saoudiens, dont deux proches de MBS, sont jugés par contumace à Istanbul pour le meurtre de Khashoggi.

Lors de l'audience jeudi, le tribunal a auditionné deux témoins, un chauffeur et un agent de sécurité turcs travaillant au consulat saoudien.

Le chauffeur, Edip Yilmaz, a affirmé que le jour du meurtre, le responsable de la sécurité du consulat l'avait enfermé à clé dans une salle avec des collègues, avec interdiction de sortir jusqu'à nouvel ordre. 

«Cela m'a donné l'impression que quelque chose d'anormal se passait», a-t-il déclaré.

Le meurtre de Khashoggi, dont les restes n'ont jamais été retrouvés, a plongé Ryad dans l'une de ses pires crises diplomatiques et terni l'image de MBS.

Ryad a affirmé qu'il a été tué lors d'une opération non autorisée. Cinq personnes ont été condamnées à mort lors d'un procès opaque en Arabie saoudite, mais leurs peines ont été commuées en 20 ans de prison.

Les relations entre Ankara et Ryad, deux rivaux régionaux, se sont considérablement dégradées après le meurtre.

Mais la Turquie, qui cherche à apaiser ses relations avec l'Arabie saoudite, s'est abstenue de commenter le rapport américain mettant en cause MBS.

M. Onderoglu, de RSF, redoute que le tribunal turc adopte, dans l'affaire Khashoggi, «une position plus passive en raison des relations stratégiques ou de l’état des relations diplomatiques». 

«Nous espérons que ce ne sera pas le cas», a-t-il ajouté.

La prochaine audience doit se tenir le 8 juillet.