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Boycottées par l’opposition, législatives sans surprise au Venezuela

7 décembre 2020, 09:07

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Boycottées par l’opposition, législatives sans surprise au Venezuela

Le parti du président Nicolas Maduro s’apprête à reprendre le parlement, seule institution qui manquait à son pouvoir hégémonique, dimanche à l’issue des législatives au Venezuela boycottées par l’opposition et qualifiées de «mascarade» par les Etats-Unis.

«L’heure est venue. Nous avons su être patients de l’attendre pour enfin nous débarrasser de cette désastreuse Assemblée nationale (...) qui a apporté le fléau des sanctions (américaines), de la cruauté, de la douleur, de la souffrance», a déclaré M. Maduro après avoir voté dimanche en milieu d’après-midi.

Les Etats-Unis, qui soutiennent Juan Guaido, président du parlement unicaméral depuis 2015, appliquent de fortes sanctions économiques au Venezuela, dont un embargo pétrolier en vigueur depuis avril 2019, destinées à renverser le successeur d’Hugo Chavez (1999-2013).

«Ce qu’il se passe aujourd’hui au Venezuela est une imposture et une mascarade, pas une élection», a écrit dimanche Mike Pompeo sur Twitter. «Les résultats annoncés par le régime illégitime de Nicolas Maduro ne reflèteront pas la volonté du peuple vénézuélien», a ajouté le secrétaire d’Etat américain.

Quelque 14.000 candidats désignés par 107 partis sont en lice pour s’emparer des 277 sièges soumis au suffrage de 20,7 millions de votants, auxquels l’opposition a demandé de «rester à la maison».

«Ce sera le meilleur moyen de rejeter la fraude» que représente cette élection, a tweeté plus tôt Juan Guaido.

«Ceux qui s’abstiennent ont tort. Comment pouvez-vous laisser les autres décider à votre place?», a estimé Fany Molina, électrice de 70 ans dans une école de Caracas reconvertie en bureau de vote.

Pour Juan Rivas, électeur de 73 ans, «la nouvelle Assemblée doit donner le pouvoir au peuple» et «s’attaquer au blocus criminel de l’agression américaine et sauver les valeurs éthiques, la lutte contre la corruption et l’impunité».

Cette élection, que ne reconnaîtra pas une majeure partie de la communauté internationale soutenant Juan Guaido, autoproclamé président par intérim et reconnu par plus de cinquante pays, Etats-Unis en tête, se déroule dans un pays qui traverse une profonde crise politique et économique.

Etouffé par une inflation galopante (+4.000% sur un an), paralysé dans d’interminables files d’attente pour faire le plein d’essence, fatigué du manque d’approvisionnement en eau et en gaz, et excédé par les brutales coupures de courant, le Venezuela est aux abois.

«Si vous voulez que nous relancions l’économie, que nous relancions le pays, que nous retrouvions nos salaires, il faut aller voter», a déclaré Nicolas Maduro dans l’un de ses nombreux appels à la participation pour légitimer son «triomphe» annoncé, les instituts de sondage tablant sur un taux de participation de 30%.

Pour Félix Seijas, directeur de l’institut Delphos, le chavisme «a un plafond électoral d’environ 5,5 millions de votants. Son souci est de savoir comment les faire venir aux urnes».

«Aider le Venezuela»

Les sanctions américaines, qui suscitent 71% de rejet dans la population selon l’institut Datanalisis, ont été au centre de la campagne du camp Maduro.

Juan Guaido appelle pourtant à les «amplifier» lors d’une consultation populaire qu’il tiendra la semaine prochaine, sur laquelle il compte s’appuyer pour proroger son mandat au-delà de sa date d’expiration, le 5 janvier.

Dimanche, Nicolas Maduro a appelé l’opposition à «abandonner la voie extrémiste» pour demander d’une seule voix la levée de toutes les sanctions au nouveau gouvernement des Etats-Unis de Joe Biden».

En choisissant une nouvelle fois de boycotter un scrutin qu’il estime sans garantie, après la présidentielle de 2018 ou le vote sur une Assemblée constituante en 2017, il joue son va-tout avec cette consultation aux effets incertains.

M. Guaido, dont la popularité s’est érodée, se montre pourtant confiant: «j’ai plus que de l’optimisme, j’ai des certitudes».

Les Vénézuéliens auront également la possibilité de se prononcer via un vote électronique.

L’opposition avait déjà organisé une consultation indépendante en juillet 2017 contre l’Assemblée constituante proposée par Nicolas Maduro, recueillant 7,5 millions de voix.

Cette Assemblée constituante est toujours installée et, depuis une décision de la Cour suprême aux mains du chavisme, elle remplace même dans les faits l’Assemblée nationale en annulant toutes ses décisions.

Outre Washington, l’Organisation des Etats américains (OEA) ne reconnaîtra pas non plus la validité de ces législatives que l’Union européenne avait appelé, sans succès, à reporter, les estimant ni «transparentes», ni «crédibles».

Pour l’ex-Premier ministre espagnol José Luis Zapatero, qui mène des tentatives de dialogue entre pouvoir chaviste et opposition, l’UE devra faire plus que «ne pas reconnaître» les résultats, mais «réfléchir à la manière d’aider le Venezuela».