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Éthique parlementaire : La suspension du leader de l’opposition et la Constitution

4 décembre 2020, 09:21

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Éthique parlementaire : La suspension du leader de l’opposition et la Constitution

La Constitution de Maurice est claire: article (73) (1): “There shall be a Leader of the Opposition who shall be appointed by the President.” Et pour savoir, au cas où certains semblent l’avoir oublié, où s’exercent les fonctions du leader de l’opposition, il suffit de lire le paragraphe 2 du même article, où les mots ‘IN THE ASSEMBLY’ sont sans équivoque.

Si notre Constitution prévoit un leader de l’opposition, ce n’est pas seulement pour que son avis soit sollicité dans certaines nominations où dans certaines procédures mais, c’est surtout pour qu’il remplisse une fonction avec tous les représentants du peuple qui s’opposent au gouvernement.

In the Assembly

Selon la Constitution, c’est au Parlement que cette opposition doit se manifester, donc à l’Assemblée nationale, au cours des séances parlementaires. Et c’est dans cet espace que le leader de l’opposition doit opérer. Celui-ci n’a pas été nommé par le président de la République, selon les dispositions de la Constitution, pour exercer ses fonctions constitutionnelles en animant des conférences de presse hors du Parlement ou sur les estrades dans des meetings publics. L’article 73(2) précise le point :

2) Where the President… appoint

– (a) … opposition party whose numerical strength In the Assembly… who is the leader In the Assembly of that party; or

(b) where… acceptable to the leaders In the Assembly of the opposition parties:

Celui qui est nommé leader de l’opposition travaille essentiellement à l’intérieur du Parlement et s’oppose au gouvernement du jour. Il doit donc être présent dans l’hémicycle, dans la Maison du Peuple, cette instance suprême de la démocratie parlementaire, pour représenter ceux qui pensent différemment du gouvernement.

L’exclusion du leader de l’opposition du Parlement doit être vue sous l’angle de la Constitution du pays. Aucune procédure n’est prévue pour son remplacement lorsqu’il est expulsé d’une séance. Ce qui entraîne une situation contraire aux dispositions de la Constitution, puisque les séances parlementaires vont devoir se dérouler sans leader de l’opposition. Donc l’opposition parlementaire est appelée à travailler sans chef de file, alors que la Constitution de Maurice prévoit, de manière claire et nette, qu’il doit y en avoir un.

Ad interim

Par ailleurs, le leader de l’opposition a des attributions spécifiques, que lui confèrent les Standing Orders de l’Assemblée nationale, et qui ne peuvent être exercées par nul autre que lui. Devraiton songer à nommer un leader de l’opposition par intérim, comme cela se fait lorsque le leader of the House, le Premier ministre, est absent ? Mais alors, qui va nommer son remplaçant ? Cela devrait être le président de la République. La situation risque de devenir cocasse. Mais au moins, elle aurait attiré l’attention sur le drame, ou le burlesque, que traverse notre système de démocratie parlementaire.

Absence de recours

Encore plus grave dans tout le spectacle affligeant que subit la population, c’est l’absence d’un recours quelconque afin de mettre un terme à cette situation toxique pour la démocratie. Le judiciaire n’est pas sollicité alors qu’il est là aussi pour établir un certain équilibre entre les pouvoirs en s’assurant que l’esprit de la Constitution ou la lettre de la Constitution soit respecté. Il n’y a eu aucune tentative de la part de l’opposition de saisir la Cour suprême, qui est habilitée à interpréter la Constitution, pour mettre un frein à ces pratiques antidémocratiques qu’elle dit constater au Parlement. Cela laisse planer des sous-entendus sur la capacité du judiciaire à s’occuper d’une telle situation. Si tel est le cas, sommes-nous donc condamnés à vivre un système qui nous rapprocherait d’une dictature, soit-elle constitutionnelle ?