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Liens Govinden-Jugnauth : enter Heinemann

4 novembre 2020, 19:40

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Liens Govinden-Jugnauth : enter Heinemann

Pravind Jugnauth s’est réfugié derrière la clause de confidentialité de l’ICAC pour ne répondre à aucune question, lors de la PNQ d’hier, axée surl’enquête sur le financement de ses achats immobiliers à Angus Road. Mais Arvin Boolell a donné une piste «quasi» inexplorée jusqu’ici: Alan (Loganaden) Govinden est-il le courtier de la société Gebr. Heinemann dans les contrats que celle-ci a obtenus avec Mauritius Duty Free Paradise? «Quasi», puisqu’un journal, à l’époque dirigé par Rudy Veeramundar, avait déjà enquêté…

«Can the Prime minister say whether Mr A.G. is an agent of Gebr. Heinemann?» Cette question d’Arvin Boolell au Premier ministre, au Parlement, semble sortir de nulle part dans l’affaire Angus Road. En attendant que Pravind Jugnauth se décide à répondre aux questions que l’express lui a envoyées il y a maintenant plus de dix jours, l’affaire, qui a fait l’objet de la Private Notice Question (PNQ) du leader de l’opposition, hier, se résume à cela : Pravind et Kobita Jugnauth signent devant un notaire pour jurer qu’ils ont payé Rs 20 millions, tandis qu’Anil Nemchand, ex-responsable des ventes immobilières à Bel-Air Sugar Estate (le vendeur), affirme dans une déposition écrite et signée à l’Independent Commission against Corruption (ICAC) et publiée par l’express, que c’est Alan Govinden, un riche businessman mauricien établi en Angleterre, qui a payé.

Enter, depuis hier matin, donc, un nouveau dénominateur à cette affaire : la compagnie allemande Gebr. Heinemann. Celle-ci, depuis 2002, est le principal fournisseur de Mauritius Duty Free Paradise (MDFP). Elle n’a été délogée que durant la période 2012-2015, quand le contrat avait été alloué à Dufry. A priori tout sépare Gebr. Heinemann du scandale Angus Road et le sens de la question d’Arvin Boolell est difficile à cerner. Or, nous avons retrouvé un article publié par le journal Capital en 2012. Celui-ci était dirigé par nul autre que Rudy Veeramundar, aujourd’hui directeur de communication au bureau du Premier ministre. Cet article, sous le titre «Qu’est-ce qui fait courir Pravind Jugnauth ?», impute de sombres motivations à ce dernier, qui dénonçait à l’époque que le contrat d’approvisionnement de MDFP avait été alloué à Dufry au détriment de Gebr. Heinemann.

«C’est la question qu’on est en droit de se poser compte tenu du nombre de conférences de presse consacrées par le leader du MSM à ce dossier, donnant l’impression de s’être transformé en lobbyiste de l’un des soumissionnaires non-retenus», écrivait l’auteur. Le journal dirigé par Rudy Veeramundar révèle ensuite qu’un Mauricien établi à Londres et aux initiales A.G. agit comme agent de Gebr. Heinemann.

 Autre révélation de Capital dans cette même édition de 2012 : A.G «avait même mis une berline à la dis- position de l’homme politique, le temps d’une campagne électorale. De plus, selon notre enquête, quand l’homme politique et les membres de sa famille séjournent à Londres, c’est A.G. qui se charge de la réservation aussi bien que du règlement de la note à l’hôtel Dorchester dans la capitale britannique (…) Toujours selon notre enquête, A.G. versait mensuellement une rétro-commission de Rs 1,5 M à l’homme politique mauricien pendant toute la durée du contrat liant Gebr. Heinemann à la MDFP, c’est-à-dire de 2004 (sic 2002) à janvier 2011.» Les insinuations sont claires et les identités établies après une lecture entre les lignes. Voilà pourquoi Arvin Boolell a lié Gebr. Heinemann au scandale Angus Road.

L’express a joint Rudy Veeramundar au téléphone hier pour lui demander s’il maintenait les allégations qu’il a publiées. «C’est vrai qu’à la parution de cet article, j’étais le rédacteur en chef du journal. Il a été écrit par un collaborateur et il a été publié», reconnaît le conseiller de Pravind Jugnauth. «Vous étiez donc satisfait des vérifications effectuées par l’auteur ?» lui demande-t-on. «Je ne dirai rien de plus puisque j’ai entre-temps appris qu’il y a une enquête de l’ICAC.»

Ce qui est sûr, par contre, c’est que Pravind Jugnauth n’a pas poursuivi Capital à l’époque. Bien au contraire, le rédacteur en chef est aujourd’hui au Prime Minister’s Office. Entre-temps, Pravind Jugnauth avait, lors d’une conférence de presse, en mars 2015, démenti tout lien avec Gebr. Heinemann, en précisant cependant : «Mo koné ki bann insinyasion ki pé fer dan zurnal. Inn fer alégasion. Mé mo péna nanié pou fer avek sa!»

Nous avons aussi écrit au siège de Gebr. Heinemann, à Hambourg, pour savoir si Loganaden Govinden a été agent de la compagnie sur les deals conclus avec MDFP. Gebr. Heinemann a accusé réception de notre e-mail et nous attendons sa réponse