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Vente frauduleuse de terrains: la liste des victimes du notaire Roopun s’allonge

25 septembre 2020, 12:30

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Vente frauduleuse de terrains: la liste des victimes du notaire Roopun s’allonge

Rs 1,4 million. C’est la somme qu’aurait réceptionnée le notaire Dharmaveersing Roopun, dit Soudesh, pour la vente d’un terrain résidentiel de 1 088 mètres carrés à Midlands à un certain Jamil J. Mais ce dernier est tombé des nues lorsqu’il a appris que le terrain qu’il a acquis était déjà enregistré au nom d’une autre personne au Registrar-General’s Department.

Presque le même stratagème qu’avec les victimes Nasowah et Quirin (voir l’express du 18 septembre 2020) a été utilisé. Sauf que cette fois, la vente a bien été enregistrée au Registrar-General’s Department. Jamil J. a récemment tenu à mettre au jour cette vente frauduleuse. Voici comment s’est passée la transaction.

Sandeep Appadoo, connu comme courtier, montre à Jamil J. un terrain résidentiel de 1 088 mètres carrés à Midlands avec le PIN 103040781. Après réception de Rs 1,4 million par chèque, le notaire Soudesh Roopun établit l’acte de vente en décembre 2017 et l’enregistre. La vendeuse est une certaine Suzanne A., heureuse héritière lointaine de Jean Clément, décédé dans les années 1920. Et l’arpentage est exécuté par le même arpenteur que dans l’affaire Nawosah/Quirin, Ravndranath Bhurtun.

En février 2018, Jamil J. décide de procéder à une division dudit terrain en faveur d’une de ses proches et de construire une maison sur la partie restante. Après avoir fait la demande de construction auprès du conseil de district de Grand-Port, celui-ci lui adresse une lettre le 10 mai l’informant que le conseil est en présence d’une plainte déposée par un certain Aboo qui déclare être propriétaire de ce terrain.

La correspondance indique en outre avoir référé le cas au ministère du Logement et des terres. Contacté, celui-ci ne nous a pas répondu, tout comme pour les autres scandales concernant les faux PIN et les faux permis de morcellement. Selon nos informations, le terrain a été identifié par Sandeep Appadoo avec l’aide de S. J. B. du département du cadastre de ce même ministère.

Jamil J., las d’attendre une réponse du ministère, se tourne vers le notaire Soudesh Roopun. Ce dernier lui aurait alors lancé : «Al get Land Fraud Squad !» De son côté, Sandeep Appadoo, tout comme son compère Mahendra Chooneea (voir l’express du 18 septembre 2020), se montre plus accommodant et parle d’une confusion. Il promet de rectifier le tir et montre aussitôt à Jamil J. un autre terrain à Midlands, village décidément transformé en terrain de chasse par la bande du notaire Roopun.

C’est l’arpenteur Dogan Nuckcheddy qui établit cette fois le plan de situation et le rapport d’arpentage. Le Registrar, de son côté, fournit un autre PIN, le 1703100321, le 25 juillet 2019, pour ce nouveau terrain avec exactement la même contenance, et ce, sans poser de questions. La vendeuse est toujours la même Suzanne A. Le notaire Roopun exige Rs 350 000 supplémentaires comme frais additionnels. Mais Jamil J. refuse et commence déjà le défrichage du terrain. Lorsqu’apparaît un certain C., avec son titre de propriété en main.

Jamil J. contacte à nouveau le notaire Roopun, qui lui conseille, ironiquement, d’aller faire une déposition à la Land Fraud Squad. Avant de lancer : «Kot mo’nn foté mwa ? Mo travay sé checker ki péna ipotek lor térin é ki li aparténir a madam Suzanne A. Lézot zafer, mo pa rant ladan mwa.» Jamil J. se retrouve donc détroussé «légalement» de Rs 1,4 million, sans compter les frais d’enregistrement.

Qu’en est-il de Suzanne A. ? A-t-elle touché de l’argent après la «vente» ? Contactée, elle nous avoue qu’elle n’a touché en tout et pour tout que Rs 50 000. Elle ajoutera qu’elle n’a jamais juré d’affidavit pour dire qu’elle est la descendante d’un certain Jean Clément décédé dans les années 1920. Elle a simplement signé l’acte de vente, dit-elle, sans toutefois que le notaire Roopun lui explique le contenu.

Pour l’heure, on ignore le nom de l’avoué qui a fait jurer cet affidavit. On n’en voit que des copies, sans que le nom de l’avoué soit visible. Contacté à ce sujet, le notaire Soudesh Roopun dit ne pas se souvenir du nom de cet avoué. Quant à la Chambre des notaires, elle ne sera d’aucune aide à Jamil J. Un représentant, après avoir écouté les doléances de ce dernier et de son épouse, leur dira de lui adresser une plainte formelle, tout en les prévenant que les dossiers contre le notaire Roopun sont mis dans un tiroir au bureau de l’Attorney General. Sollicité, ce dernier ne nous a pas répondu.

En attendant, le notaire Roopun et son collaborateur Sandeep Appadoo ont promis à Jamil J. de lui rembourser l’argent ou de lui trouver un autre terrain.

«Le Registrar ne vérifie pas si le pin correspond bien au terrain indiqué dans l’acte de vente», dit un officier

<p>Mais comment l&rsquo;enregistrement du premier terrain a-t-il pu être effectué au &laquo;Registrar General&rsquo;s Department&raquo; même si le PIN ne correspondait pas au terrain ? Nous avons posé la question à un officier de ce département. &laquo;Le Registrar General, en dépit de son informatisation, ne vérifie pas si le PIN correspond bien au terrain indiqué dans l&rsquo;acte de vente.&raquo; Et le système LAVIMS, qui a couté plus de Rs 800 millions, ne sert à rien, déplore notre interlocuteur. &laquo;Comment procéderait-on à des ventes frauduleuses et accorder de faux PIN si le système était efficace&raquo;, ironise-t-il. Tout en expliquant que ce n&rsquo;est qu&rsquo;en cas de revente éventuelle du terrain, de division ou de demande de permis de construction comme dans le cas de Jamil J. que le pot aux roses est découvert. Y aurait-il donc des ventes frauduleuses enregistrées au &laquo;Registrar General&raquo; ? &laquo;Bien sûr, surtout concernant des terrains de descendants d&rsquo;esclaves et d&rsquo;autres pauvres gens qui sont facilement intimidés par des hommes de loi et leurs acolytes courtiers.&raquo;</p>