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Bélarus: l’UE incapable d’adopter des sanctions malgré l’appel de Tikhanovskaïa

22 septembre 2020, 08:19

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Bélarus: l’UE incapable d’adopter des sanctions malgré l’appel de Tikhanovskaïa

Venue lundi à Bruxelles plaider pour l’adoption de sanctions contre le régime du président Loukachenko, l’opposante bélarusse Svetlana Tikhanovskaïa repart bredouille. Les Etats membre ne sont pas parvenus à s’entendre sur la nécessité d’intervenir en urgence pour mettre un terme à la répression féroce menée dans son pays, a déploré l’Espagnol Josep Borrell.

«Il n’a pas été possible de trancher aujourd’hui, car il faut l’unanimité et elle n’a pas été réunie», a expliqué le chef de la diplomatie européenne à l’issue d’une réunion avec les ministres des affaires étrangères des 27.

«C’est regrettable. Malgré les promesses, Mme Tikhanovskaïa va repartir sans rien», a confié l’un d’eux à l’AFP.

Il revient désormais aux dirigeants européens de trancher la question lors de leur sommet de jeudi et vendredi, a indiqué Josep Borrell. «Les chefs d’Etat et de gouvernement vont devoir donner des orientations pour permettre une décision lors de la prochaine réunion des ministres» le 12 octobre, a-t-il précisé.

«La répression au Bélarus est d’une violence inédite et elle monte en puissance. Nous devons adopter des sanctions. J’en fais un engagement personnel. Si nous ne parvenons pas à le faire, alors la crédibilité de l’UE sera mise à mal», a-t-il estimé.

L’Union européenne a préparé des sanctions contre une quarantaine de personnes jugées responsables de la répression, mais l’unanimité est nécessaire pour leur adoption. Or, Chypre conditionne toujours son accord à l’adoption de mesures pour contraindre la Turquie à cesser ses forages gaziers dans les eaux de sa zone économique.

«Notre réaction à tout type de violation de nos valeurs et principes fondamentaux ne peut se faire à la carte. Elle doit être cohérente», a averti le chef de la diplomatie chypriote Nikos Christodoulidis à son arrivée.

«Prise d’otages»

Plusieurs ministres ont dénoncé cette position. «Il est regrettable qu’aujourd’hui nous n’ayons pas pu décider de sanctions pour les violations des droits de l’homme dans ce pays en raison d’une +prise d’otages+ par un État membre. Cela envoie un mauvais signal aux Bélarusses, à nos sociétés et au monde entier», s’est insurgé le chef de la diplomatie de la Lettonie Edgars Rinkēvičs.

Mais Josep Borrell a dit comprendre la position de Nicosie. «Si la Turquie ne change pas d’attitude, il faudra alors envisager des sanctions contre la Turquie», a-t-il déclaré. «Le problème est à résoudre lors du sommet», a-t-il insisté.

Or, l’Allemagne bloque cette décision. Berlin la juge «inopportune», car l’adoption de sanctions risque de ruiner sa médiation avec Ankara, ont confié à l’AFP plusieurs diplomates.

Dans le même temps, le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas préconise que les sanctions concernent également le président Loukachenko, considéré comme «le principal responsable» de la répression.

«Il n’y a pas d’accord pour l’instant», a reconnu Josep Borrell.

Les ministres ont en revanche confirmé ne «pas reconnaître la légitimité d’Alexandre Loukachenko» car les élections du 9 août ont été «truquées», a dit l’Espagnol. «Mais il faut faire avec la réalité: Loukachenko contrôle l’administration et le territoire», a-t-il rappelé.

Un appel a été lancé aux Etats membres pour ne pas «interférer dans les affaires intérieures du Bélarus». Une demande qui vise, sans les nommer, les pays baltes et la Pologne.

Il faut soutenir une médiation de l’OSCE pour permettre une nouvelle présidentielle, a souhaité M. Borrell.

Svetlana Tikhanovskaïa a rencontré les ministres des Affaires étrangères des 27 Etats membres de l’Union au cours d’un petit déjeuner lor duquel elle a plaidé pour des sanctions. Elle a ensuite été reçue au Parlement européen.

Candidate lors de la présidentielle, Mme Tikhanovskaïa a été menacée et contrainte à l’exil. Elle est réfugiée en Lituanie et dit ne pas pouvoir rentrer dans son pays, car elle serait «jetée en prison».

Candidate à la présidentielle d’août pour remplacer son mari qui a été arrêté, elle a confirmé sa volonté de ne pas être à nouveau candidate au cas où une nouvelle élection serait organisée, car «le Bélarus traverse une crise économique profonde et a besoin d’un leader fort, un expert économique fort» pour la surmonter.

Le Bélarus est toujours sous le coup d’un embargo sur les ventes d’armes et de matériel pouvant être utilisé pour la répression. Quatre personnes sont par ailleurs interdites de séjour dans l’UE et leurs avoirs ont été gelés.