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Karl Lamarque: «Des skippers croulent sous des dettes…»

11 septembre 2020, 22:30

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Karl Lamarque: «Des skippers croulent sous des dettes…»

L’allocation de Rs 10 200 de la «Wakashio Solidarity Grant» aux skippers ne fait pas l’unanimité. Ceux opérant à temps partiel n’en bénéficieront pas. Déjà affectés par des pertes, ces hommes de la mer participeront à la marche du 12 septembre. Quelle est l’étendue des dégâts ? Et les autres difficultés ? Le secrétaire de la «Federation of Pleasure Craft Operators» se confie.

Une enquête est actuellement réalisée par la Tourism Authority par rapport à la «Wakashio Solidarity Grant». Pourquoi?
Ce relevé est nécessaire. Les skippers opérant de Belle-Mare jusqu’au Chaland sont tous concernés. Ils sont tous dans le besoin et doivent être inclus.

À l’échéance du 8 septembre, combien d’entre eux se sont enregistrés pour la compensation et comment ?
Une bonne partie des skippers se sont inscrits. Pour les critères, aucun formulaire ne les spécifie au préalable. J’ai demandé mais il n’y en a pas. Durant le confinement, les skippers percevaient le Self-Employed Assistance Scheme (SEAS) mais, à l’extension de ce plan d’aide, beaucoup n’ont pu en bénéficier, comme des propriétaires de bateaux de plaisance qui sont des oneman companies. Ceux opérant en freelance ne doivent pas non plus être exclus. 

Justement, sous la «Wakashio Solidarity Grant», les skippers à plein temps seront com- pensés mais pas ceux à temps partiel. Votre avis ?
En général, 50 % des skippers opèrent à plein temps et l’autre moitié à temps partiel. Ce n’est pas normal qu’ils soient exclus. D’autant plus que cette proportion ne bénéficie plus des plans de soutien post-Covid-19. C’est injuste de ne pas les considérer. 

À combien estimez-vous les pertes encourues depuis le naufrage et le déversement du fioul ?
Avant même l’épisode du Wakashio, nous étions pénalisés par la pandémie. La situation a empiré avec ce naufrage. Précédemment, nous bravions d’autres difficultés à la suite de l’application de nouvelles règlementations occasionnant plus de coûts. Le chiffre d’affaires pour un opérateur peut atteindre en moyenne Rs 100 000 par mois. Dépendant de l’entreprise et des activités, cela peut aller à Rs 1 ou 2 millions par mois. En dépit de l’ouverture des frontières qui se fera au compte-gouttes, on sera toujours affecté. L’État doit considérer les conséquences à long terme car tout ne reviendra pas à la normale même si les touristes reviennent à Maurice et encore moins dans le sud-est de l’île. Aujourd’hui, les répercussions de ces catastrophes sont nationales.

Comme les pertes étaient déjà cumulées avec la fermeture des frontières, les plaisanciers ne risquent-ils pas de les passer sur le compte de la compensation du «Wakashio» ?
Évidemment, nous sommes déjà sous une accumulation de pertes. Nous n’avons aucun revenu. Le Wakashio a aggravé les choses. La compensation de Rs 10 200 elle-même ne suffit pas. Les besoins alimentaires d’une famille tournent autour de Rs 15 000 par mois. Ajoutez à cela les frais d’électricité, d’eau, de scolarité, etc. La situation est dramatique.

Cette compensation astreint-elle les skippers au silence pour rester dans les bonnes grâces de l’État ?
Certainement, il s’agit d’une stratégie de l’État. Cette tentative est là. On a vu cela aussi pour les pêcheurs. Avant qu’on ne tienne la manifestation, on les a appelés pour leur donner de l’argent. Au vu de la situation précaire, je ne crois pas que la compensation démobilisera les griefs des plaisanciers. Officiellement, la fédération continue à les y encourager. Il faut que le gouvernement entende notre voix et ne fasse pas la sourde oreille. On a demandé à tous les opérateurs d’y participer. Car même si on ajoute la compensation au SEAS, on atteint Rs 15 300. On pourra tir ration avec mais pour le reste ? Plusieurs skippers croulent sous les dettes. Comment survivre? Nous maintenons d’ailleurs qu’au niveau national pour tous les skippers, la somme de Rs 5 100 du SEAS ne suffit pas et nous revendiquons Rs 10 200 à la place.

Dans l’impossibilité de travailler, y a-t-il moyen pour les opérateurs de se recycler ?
Nous sommes des bosseurs. Moi, par exemple, je m’oriente vers l’agriculture. On essaie de faire ce qu’on peut face au chômage technique. Cependant, de par nos permis, on ne peut pas travailler ailleurs. Chacun a sa base d’opération. Nous ne sommes pas comme des chauffeurs de taxi. En dépit de son positionnement spécifique, il n’est pas limité. Si son client est hors de sa zone de couverture, il pourra toujours assurer sa course. Il y a quelques exceptions. Par exemple, en temps normal, les clients nous rejoignaient sur la base d’opération mais on peut trouver des arrangements pour les récupérer. Mais on ne peut pas le faire régulièrement. Sinon, on s’exposera à des protestations d’autres opérateurs et des garde-côtes ainsi qu’à des sanctions.

Les skippers participent-ils à la marche du 12 septembre ?
J’ai participé à la marche du 29 août. Et je compte reprendre le 12 septembre avec mes autres collègues. Nous ne sommes pas satisfaits. L’État a mis sur pied des mesures pour nous aider mais c’est nettement insuffisant à notre survie. Nous sommes soumis à diverses complications, pas uniquement celles liées au Covid-19. Comme je vous le disais, plusieurs facteurs étaient à notre détriment. À l’exemple de l’institution de nouvelles réglementations pour le permis, qui engendrent plus de coûts et diminuent nos revenus. Avec le Covid-19 et le Wakashio, nous sommes en pleine détresse. Parallèlement, nous devons payer certains frais fixes même en l’absence d’opérations. Cela inclut les frais de permis, les assurances, l’entretien et la maintenance, etc. C’est ce que nous voulons dénoncer : les difficultés pré-Covid, pendant la pandémie et entourant le Wakashio. Il faut des mesures concrètes pour survivre. De plus, Maurice reçoit des aides internationales. On doit avoir une transparence à 100 %. Disons que le Japon nous donne tel montant et l’Union européenne, une autre somme. Il faut savoir comment ces ressources sont attribuées et à quelles fins, etc.