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A Portland, les «mamans» font le mur pour protéger les manifestants

25 juillet 2020, 12:59

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A Portland, les «mamans» font le mur pour protéger les manifestants

Bev Barnum n’aurait jamais cru qu’elle obtiendrait un tel résultat en publiant la semaine dernière un simple message sur internet pour réagir à l’arrestation d’un manifestant par des policiers fédéraux dans une rue de Portland.

«Ca disait quelque chose comme Je ne sais pas vous, mais moi je n’ai jamais manifesté», raconte à l’AFP cette mère de famille de 35 ans, qui habite Portland, la plus grande ville de l’Oregon, dans le nord-ouest des Etats-Unis.

«Je pense qu’on devrait faire quelque chose. Et si vous aviez cent mamans derrière vous et qu’elles fassent la différence?», poursuivait le message.

En quelques heures seulement, sa messagerie était saturée de mères emballées par sa proposition.

Depuis lors, ces militantes de la dernière heure ont formé «Le Mur des Mamans» et descendent toutes les nuits dans les rues de Portland pour gonfler les rangs des manifestants anti-racistes.

Vêtues de jaune, coiffées de casques de vélo et brandissant des fleurs de tournesol, des centaines de mères de familles se tiennent bras dessus-bras dessous pour former une barrière humaine entre les militants et les policiers fédéraux dépêchés par le président Donald Trump pour rétablir «la loi et l’ordre», selon son slogan de campagne.

Certaines agitent des pancartes «En colère comme une mère» ou «Laissez nos enfants tranquilles», en référence aux derniers mots de George Floyd, quadragénaire noir asphyxié fin mai sous le genou d’un policier blanc. Après avoir supplié le policier et s’être plaint d’étouffer, George Floyd avait appelé sa mère au secours.

«Nous faisons ça pour nos enfants», insiste Shawn Roberts, une mère noire surprise mais ravie de la solidarité de ses homologues blanches.

«Les mamans font bouger les choses», lance Mme Barnum. «On a plein de casquettes différentes. Pour l’instant, on porte celle de protectrices farouches», dit celle qui a choisi la couleur jaune pour s’allier au noir de «Black Lives Matter», et rappeler ainsi les abeilles.

Après avoir impulsé le mouvement, Bev Barnum dit avoir maintenant passé les commandes de la «ruche» à trois mères noires de Portland, mais son initiative a déjà inspiré des «murs» similaires dans d’autres villes du pays, comme New York et Chicago.

Les «papas» aussi

Pour Jayla Lindseth, jeune femme noire qui manifeste depuis huit semaines, l’arrivée des «mamans» a fait une différence. «Beaucoup d’entre elles m’ont prise dans les bras et m’ont dit Je suis ta maman maintenant, je suis là pour toi. Ca donne de la force», explique-t-elle.

De son côté, c’est en lisant des informations sur ces étonnantes manifestantes que Zack Duffly a eu l’idée d’étendre le mouvement aux pères de famille, au départ presque une blague lancée sur Twitter.

Il assure à l’AFP que pendant plusieurs semaines, il craignait trop les brutalités policières pour oser descendre dans la rue. Il se contentait donc de faire des dons aux organisations anti-racistes et d’appeler des élus locaux pour leur demander d’agir.

Et puis il a décidé de sauter le pas. «Les raisons pour lesquelles c’est dangereux sont celles qui font que c’est important», dit-il, parlant d'«obligation morale».

Pour couleur de ralliement, il a choisi l’orange, souvent associé aux produits pour hommes et équipements de bricolage, comme ces souffleurs à feuilles qu’il a vu utilisés à Hong Kong par des manifestants pour dissiper les gaz lacrymogènes.

Lundi dernier, pour son premier jour de mobilisation avec des dizaines d’autres pères de famille, l’avocat a joué de malchance. Après avoir été coursé par certains des policiers fédéraux dont le déploiement à Portland est si controversé, il a été arrêté et accusé de troubles à l’ordre public.

Cela n’a pas empêché une escouade de «papas» de participer depuis lors à chaque manifestation nocturne. Et de se ruer en avant dès qu’une grenade lacrymogène explose en faisant vrombir leurs souffleurs à feuilles.